5. ANOTHER ME (PARTIE I)

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Sa réponse était simple. Concise. Dépourvue d'ambiguïté. Il venait de passer quarante-huit heures compliquées, nous nous étions accidentellement rapprochés, et nos corps avaient parlé à notre place. D'accord, il en avait envie – et je ne l'avais pas repoussé, après tout –, raison pour laquelle il était donc passé à l'action. Mais j'avais décidé d'y mettre un terme – pourquoi ? – et il n'était pas allé plus loin, point à la ligne.

Mais une question subsistait au milieu de tout ça. Pourquoi, mais pourquoi avais-je répondu à son invitation avec une telle ardeur ? Enfin, c'est vrai, quoi, si j'étais prête à reconnaître une petite attirance pour N.J., je n'en étais quand même pas à me jeter sur lui à la moindre petite étincelle électrique ! Il avait suffi que nous nous retrouvions un poil plus proche que ce que la situation n'exigeait... Non, ça n'avait pas de sens.

Je m'étais empressée d'arrêter la machine lorsque je m'étais rendu à quel point je désirais ce rapprochement, à quel point j'avais envie qu'il aille plus loin. Je m'étais promis de ne pas m'attacher, de ne pas éprouver ce genre de sentiments à son égard, mais ce n'était plus mon esprit qui était aux commandes à ce moment-là. C'était une autre version de celle que j'étais, une autre « moi », quelqu'un capable de renoncer à tout contrôle.

Pourtant, vu mon objectif final, je n'aurais jamais dû m'arrêter en cours de route. N'était-ce pas exactement ce que j'aurais dû souhaiter ? Nous ne nous connaissions que depuis une semaine, aucun sentiment n'était donc censé entrer en jeu. Et il avait pris cette initiative seul, qui plus est. Loin d'éprouver le blocage que j'avais redouté, tout s'était au contraire enchaîné avec une évidence déconcertante.

J'aurais pu repartir chez moi et retrouver Nate, sans plus avoir à me soucier des complications qui n'allaient pas manquer de survenir entre N.J. et moi. Sans plus avoir à craindre un quelconque attachement, ne serait-ce qu'amical, qui rendrait le tout plus inhumain qu'il n'y paraissait déjà.

Sauf que je n'avais pensé à rien de tout cela lorsqu'il m'avait embrassée. La seule chose dont je rêvais à ce moment-là, c'était qu'il continue et qu'il me fasse tout oublier. Je ne nourrissais aucune arrière-pensée, et c'était paradoxalement ce qui m'avait freiné.

Je ruminai ce qu'il venait de se passer – ou plutôt, ce qu'il ne s'était pas passé – durant l'heure qui suivit, en basculant sur le ventre lorsque mon dos commença à me faire souffrir. Du moins, j'imaginais qu'il s'était écoulé un peu plus d'une heure, même si je n'en étais pas sûre, vu que je finis par sombrer au bout d'un moment. J'eus vaguement conscience d'être déplacée et bordée au cours de la nuit, mais ne me réveillai réellement qu'aux alentours de quatre heures du matin. Mon horloge biologique ne semblait plus savoir où donner de la tête, depuis mon arrivée à l'Union Bleue.

Je repoussai la couverture que quelqu'un – N.J. – avait posée sur moi et découvris l'intéressé à mes côtés, les yeux clos. Nos lits étaient repoussés l'un contre l'autre chaque matin et n'avaient pas été séparés, cette nuit-là. Son corps était beaucoup plus proche du mien que d'habitude, ce qui me perturba malgré la manière dont il m'avait plantée – même si c'était moi qui avait stoppé la machine.

ENDLESS RAINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant