12. WILD CHILD (PARTIE XI)

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Nous restâmes ainsi à le contempler pendant plus de vingt minutes, plongées dans nos réflexions. La jeune femme ne cessait de lisser entre l'index et le pouce de sa main droite la petite étiquette qui dépassait de la jambe de Baruch – que Nate avait fini par laisser glisser de ses bras – tandis que les doigts de sa main gauche pianotaient un air qu'elle seule semblait entendre. Je finis par me relever, ce dont elle profita pour m'inviter à manger quelque chose.

— Où est-ce que tu as dégoté ça ? ne pus-je m'empêcher de m'exclamer en avisant les petites tartelettes au citron qu'elle me tendit.

Elle éclata de rire.

— Kaplan travaille au Centre de Culture, expliqua-t-elle en souriant toujours. Naturellement, ça aide.

— Oui, j'imagine...

— Pourquoi tu la regardes comme si elle allait te donner toutes les réponses de l'univers, au lieu de la manger ?

J'éclatai de rire, ce qui ne m'était plus arrivé avec un tel naturel depuis des lustres.

— J'étais en train de réfléchir à tout ça, tentai-je d'expliquer en joignant le geste à la parole.

Marie avisa mon index que je fis tourner encore une fois devant sa perplexité, ce qui eut le mérite de lui faire hocher la tête.

— Tu ne connaissais pas du tout la Résistance, avant d'atterrir ici ?

— En fait, si, objectai-je devant son regard intrigué. C'est un peu compliqué mais... on a tenté de me recruter quand j'étais encore chez mon père. C'était peu de temps avant ma rencontre officielle avec N.J.

— Comment ça, officielle ?

Je fronçai les sourcils.

— Rassure-moi, tu sais qui je suis ?

La jeune femme ouvrit de grands yeux, frappée par un éclair de compréhension.

— Tu es la fille d'Adamson !

— Eh oui... désolée, je croyais que c'était évident. Comme tu m'as dit que Ghost t'avait amené Nate et qu'il t'avait parlé de moi...

— Ce sont deux choses totalement différentes ! objecta-t-elle. Il m'a simplement dit que la petite amie d'N.J. avait des problèmes et qu'il fallait que quelqu'un s'occupe de son petit frère...

Elle poussa une brève exclamation.

— Ça veut dire que... Adamson a un fils aussi ?

— C'est... compliqué.

Je passai les heures qui suivirent à lui expliquer dans les grandes lignes ce qu'avait été ma vie jusqu'ici – en omettant les détails sur le drame que nous avions vécu mon compagnon et moi. Nous ne fûmes interrompues qu'aux alentours de huit heures, lorsqu'un homme d'une vingtaine d'années au visage en pointe débarqua brusquement dans la pièce, se délestant de son sac à dos qui semblait visiblement peser. Marie se remit sur ses pieds et vola presque à sa rencontre, passant une main inquiète dans sa chevelure sombre.

— Comment ça va ? l'interrogea-t-elle, l'inquiétude assombrissant son visage rieur.

Il posa un baiser sur ses lèvres.

— Je suis claqué, mais ça va. La nuit a été longue, rien de plus.

La porte se rouvrit sur celui que j'aimais, qui se dirigea instantanément vers moi.

— Qui est-ce ? demanda celui que je devinais être Kaplan en me désignant du menton, au moment où mon compagnon posait sa main au creux de mes reins.

— Mon âme sœur, répliqua-t-il en m'entraînant déjà vers la sortie. Et je te laisse avec la tienne.

— Merci pour tout, Marie, la saluai-je, un peu prise au dépourvu.

— De rien. Reviens me voir quand tu veux.

— Je n'y manquerai pas.

ENDLESS RAINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant