10. SEND ME HOME (PARTIE II)

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Je me rapprochai davantage, si cela était encore possible. Si nous n'étions pas en train de nous hurler dessus, quiconque ayant surpris la scène de loin aurait pu croire que nous étions sur le point de nous embrasser. Et ô combien j'aurais préféré !

— J'ai perdu deux de mes meilleurs amis en essayant de nous épargner ça ! insistai-je. Je les ai presque envoyés à la mort pour aller chercher Nate et me le ramener. Tout ça pour qu'il finisse encore plus en danger qu'il ne l'était déjà !

— Si tu savais déjà au moment où ils étaient morts que tu n'avais soi-disant plus d'autre choix, tu aurais au moins pu éviter de me servir tes mensonges. Parce que tu m'as menti ! Tu m'as fait croire que si tu étais avec moi, c'était uniquement parce que tu ressentais la même chose. Tu n'as même pas l'air de réaliser... Tu m'as quand même certifié que personne n'en saurait jamais rien !

— Parce qu'à ce moment-là, je le pensais sincèrement ! J'étais résignée à mourir, quitte à laisser mon meilleur ami s'occuper de Nate, plutôt que de rentrer dans le jeu d'Adamson. Je savais que je n'en avais plus pour longtemps, mais je ne voulais pas t'impliquer dans son jeu de pouvoir – ou appelle ça comme tu veux. Tu veux savoir à quel moment j'ai fini par prendre ma décision ? Ce soir, quand j'ai regardé tous les résistants se recueillir sur les corps de Fox et de Genesis. Je me suis rendue compte que même jusque-là, j'étais prête à envoyer quelqu'un d'autre en sacrifice pour t'épargner. Mais j'avais déjà trop de monde à pleurer, tu comprends ? Surtout que mon petit frère est placé sous une telle surveillance que je n'avais pas le droit à une deuxième tentative tout aussi foireuse, voire plus, que la première. Je me suis maudite d'avoir envoyé le signal de confirmation à mon père, mais je n'avais pas d'autre choix !

Je repris haleine à grand-peine.

— Ça prouve juste que tu n'es pas foutue de faire les bons choix ! hurla-t-il en agitant les bras. Pourquoi tu ne m'en as pas parlé avant ? Pourquoi tu ne m'as pas dit ce que ton père attendait de toi ? J'aurais pu t'aider !

— Ah oui, et comment ? En te faisant tuer, comme Fox ? Comme Genesis ? Tu as raison, ça aurait été nettement mieux ! Et puis, c'est tellement facile à dire : « Ah, au fait, je ne savais pas trop comment te le dire au début, mais maintenant que c'est sérieux entre nous, sache que mon père attend de moi que je m'allonge là où il me le demande pour déclarer la guerre au tien ». Rien que de le dire, j'ai envie de vomir ! Tu t'imagines l'estime que je peux avoir de moi, après ça ?

— C'est bien ce que je dis ! Tu ne fais pas les bons choix parce que tu ne penses qu'à toi, dans toute cette histoire, parce que tu n'es qu'une putain d'égoïste ! Égoïste de vouloir mourir, que ce soit vis-à-vis de la seule famille qui te reste ou de moi, égoïste de ne pas avoir suffisamment confiance en moi pour me raconter ça, égoïste au point de mener tes amis à une situation dont ils ne pouvaient évidemment pas se sortir seuls...

Il s'interrompit une seconde en voyant que des larmes silencieuses roulaient au goutte-à-goutte sur mes joues, mais ne renonça pas à son agressivité envers moi.

— Tu te rends compte à quel point ton histoire est tordue ? me jeta-t-il en pleine figure. Tu te rends compte que tu es venue jusqu'ici en sachant dès le début que tu allais déclencher une guerre ? Ce n'est pas parce qu'on ne l'a pas connue qu'on ne sait pas à quel point la dernière s'est révélée dévastatrice.

— Je n'ai jamais voulu ça. Dès le début, j'ai cherché un moyen de contourner son chantage, mais...

— Ouais, bien sûr ! Franchement, quelle réussite !

Il baissa la tête imperceptiblement, de manière à me regarder bien en face.

— Tu as couché avec moi uniquement dans le but de nous trahir. Ça me dégoûte de voir que tu as laissé Adamson faire de toi une p...

Je lui assénai une gifle d'une puissance insoupçonnée. Je pouvais en supporter beaucoup, à commencer par lui et sa colère, mais jamais je ne le laisserai me traiter de cette façon. Je l'avais peut-être mérité, c'était peut-être bien ce que j'étais, après tout, mais je ne pourrais jamais continuer à vivre s'il l'énonçait à voix haute. C'était la limite à ne pas franchir.

— Mais à quoi tu joues ? s'emporta-t-il en m'attrapant par les poignets.

ENDLESS RAINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant