Every Breath You Take : Alliances | Tome 1.

14.3. Lights Of Shadows

La jeune femme termina de s'admirer dans la glace une dernière fois pour s'assurer que rien ne clochait dans sa tenue. Ses longs cheveux châtains avaient été relevé en un chignon élégant, et son pantalon noir ainsi que sa chemise blanche avaient été troqués pour une jolie robe fluide d'un beau vert émeraude, rehaussant la pâleur de sa peau ainsi que l'ambre de ses yeux. Elena souffla de nervosité ; jamais elle ne s'était autant appliquée pour un maquillage.

La pauvre pochette qui venait parfaire la tenue d'Elena fut légèrement écrasée par la pression de sa propriétaire. L'angoisse mêlée d'excitation lui nouait les entrailles. C'était la première fois depuis quatre longues années de célibat que la jeune femme avait un rendez-vous.

La première fois depuis qu'elle avait décidé de rompre avec Marco.

Tremblante, elle souffla une dernière fois et sa main toucha délicatement le collier à la chaîne d'or qui ornait son cou, non sans une certaine émotion et une certaine confusion. Travis le lui avait offert, cette après-midi même, arguant qu'elle se devait d'être parfaite pour séduire Harold, ce soir. Le cœur d'Elena n'avait pu s'empêcher de d'accélérer et sa peau se hérisser lorsque les doigts de Travis l'avaient effleuré doucement pour le lui attacher.

A cet instant, elle aurait donné cher pour se retourner et l'embrasser, mais elle ne pouvait se permettre d'éprouver ne serait-ce qu'une once de désir pour lui.

Une seconde de plus pour les dernières vérifications, et elle rejoignit le salon, la tête basse et l'estomac contracté. Travis était assis sur le canapé, sa jambe droite repliée sur la gauche, plongé dans la lecture d'un journal. Elena l'observa un instant, avec le sentiment dérangeant mais bien présent qu'elle aurait préféré passer cette soirée avec lui.

Une toux discrète fit lever les yeux de Travis vers elle, et un sourire l'accueillit.

- Comment me trouves-tu ? s'enquit-elle, gardant sa voix la plus neutre possible.

Elle ne savait pas bien si elle espérait ou non un ébahissement de sa part. Un éclat dans les yeux, une expression trahissant son admiration... quelque chose, n'importe quoi. Le jeune homme se contenta de rester stoïque, la dévisageant de loin, passant lentement son doigt sur son menton dans un geste de réflexion, les yeux plissés.

Putain, pourquoi faut-il qu'il soit si...

- Tu es parfaite, Elena. Harold sera incapable de te résister, coupa-t-il en retournant à son journal.

Le souffle lui manqua durant une seconde, estomaquée par le manque évident - et cruel - d'intérêt pour elle. Elena se retint de soupirer de déception, et un coup frappé à la porte acheva de chasser ses tracas. Travis tourna la tête vers elle et se leva, las.

- Prête à faire tourner les têtes ? lui murmura-t-il en lui serrant brièvement la main.

- Prête, approuva-t-elle, ignorant tant bien que mal les tambourinements de sa poitrine.

***

Harold s'engouffra dans la limousine à son tour et s'assit côté d'elle, une expression de joie à peine dissimulée sur son visage. Elena se sentit rougir jusqu'à la racine de ses cheveux devant le sourire radieux qu'il lui adressa.

- Une coupe de champagne ? lui offrit-il tandis que la voiture démarrait.

- Pourquoi pas, répondit gracieusement Elena, les yeux pétillants.

A peine avait-elle échappé à la surveillance de Travis, seule avec Harold, que la jeune femme s'était aussi sentie reprendre son assurance. Etre avec Harold ne l'effrayait jamais ; bien au contraire, le courant qui passaient entre eux était si évident, si simple, qu'il n'y avait pas de place pour une quelconque anxiété.

Harold saisit deux flûtes ainsi qu'une bouteille de champagne, soigneusement cachée dans le mini-frigo de la limousine. La lumière des lampadaires dansait délicatement avec ses cheveux blonds, et l'éclat de la lune qui s'infiltrait parfois dans l'habitacle transformait son regard, charmant Elena.

- Alors, quel est le programme pour cette soirée ? demanda-t-elle d'une voix enthousiaste.

- L'improvisation, la taquina-t-il. Te surprendre est ma priorité, ajouta-t-il en lui tendant la coupe de champagne.

Elle lui sourit et trinqua avec lui, l'admirant discrètement tandis qu'elle avalait une gorgée.

L'expression du jeune homme était sereine ; à croire que la confidence sur ses fiançailles n'avaient jamais eu lieu. La facilité avec laquelle il avait oublié ce petit incident et leur différend était déconcertante, et Elena ne pouvait croire qu'un membre des Anderson avait si peu de rancune. C'était ce qu'elle appréciait chez Harold, contrairement à Travis, foutument incapable de demander pardon ou de passer à autre chose.

Pourquoi repensait-elle à ce despote ?

Harold lui saisit la main, et la pressa légèrement.

- Je suis contente que tu aies accepté de sortir avec moi.

Sa voix suave et sensuelle provoqua un léger frisson qui secoua le corps d'Elena. Son souffle se hacha lorsqu'elle prit conscience à quel point Harold s'était rapproché imperceptiblement d'elle, enroulant plus fermement ses doigts autour des siens. La sensation n''était pas dérangeante, et la peau veloutée du jeune homme augmentait sensiblement la température du corps d'Elena. Immobile, raide comme un piquet, l'envie inexplicable de se blottir contre son torse musclé grandissait pourtant en elle.

Comment ? Comment Harold parvenait-il à provoquer ce genre d'émotions en elle, alors qu'elle ne songeait qu'à Travis quelques secondes plus tôt ?

Il se pencha jusqu'à effleurer l'oreille d'Elena avec la pointe de son nez.

- Tu es magnifique, ce soir.

Les dents d'Elena vinrent trouver refuge sur ses lèvres, sans qu'elle ne le veuille, et elle dut faire un effort pour ne pas gémir sous le chatouillement provoqué par la rencontre du souffle d'Harold sur sa nuque.

Il s'écarta, apaisant la pression qui pesait sur les épaules d'Elena, et dirigea son regard vers la rue, sans toutefois lâcher sa main. Elle put expirer longuement, se remettre de la chaleur et du désir qui avaient subitement pris possession d'elle. La soirée s'annonçait des plus troublantes...

Après cinq minutes dans un silence solennel mais intense, la limousine s'arrêta enfin. Elena jeta un discret coup d'œil vers la rue, assombrie par les vitres teintées. Elle pouvait voir que les vives lumières aux milles couleurs aux frontons des théâtres et les gens qui se pressaient autour des entrées, mais son cœur fit immédiatement un bond devant cette foule et cette ambiance mythique qu'elle n'avait expérimenté qu'au travers les livres et les séries.

Ses yeux se mirent à briller, et soudain, elle ne songeait plus à aucun des frères Anderson.

Harold la fixa du coin de l'œil, charmé par l'émerveillement qu'il lisait sur son visage délicat. Il adorait cette lueur dans ses yeux de miel, et, ce rouge qui lui montait aux joues sous l'ébahissement. Si seulement il avait pu faire taire ses doutes et crever toutes les méfiances qu'il avait à son égard, il lui aurait voler un baiser sur ces lèvres si tentantes.

Mais non, ce n'était pas encore le bon moment.