23. 1 - London Calling

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Les lumières dansantes de la ville qui s'infiltraient dans la chambre à travers la fenêtre ouverte parvenaient à peine à égayer les pensées sombres qui tournoyaient dans la tête du jeune homme. L'esprit embrumé, les poings serrés, tous les muscles de son corps se tendaient à mesure que ses yeux guettaient la jolie femme. Plus par nervosité que par besoin, il passe une main dans sa chevelure, ses doigts manquant un peu d'arracher quelques-unes de ses mèches pour calmer son angoisse montante. Il souffla.

Ce trouble ne lui ressemblait aucunement, et l'effrayait plus qu'il n'aurait su le dire. En toute situation, en tout instant, le jeune homme parvenait à maintenir le cap, à conserver son sang-froid et son sérieux ; c'était par ailleurs cette capacité à ne jamais s'émouvoir de rien qu'il l'avait conduit au poste qu'il occupait dorénavant. Implacable, impitoyable, impassible, sa réputation reposait sur ces trois piliers. Jamais rien n'avait réussi à entraver son besoin de puissance, de reconnaissance ; rien ne surpassait ses désirs.

Quiconque décidait de se mettre en travers de ses plans devait en subir les conséquences. Personne ne lui résistait d'ailleurs jamais bien longtemps, homme comme femme, en amour comme en affaire.

Mais aujourd'hui, pour la première fois depuis le début de sa carrière, le trouble et le doute l'envahissaient. Si l'entreprise était toujours passée avant toute chose, y compris lui-même, pour la première, il n'était plus aussi sûr de lui.

Son assurance lui échappait, ses rêves perdaient de leur couleur, son avenir lui glissait littéralement entre les doigts. Et si rien de ce qu'il avait construit jusqu'à présent, de toutes les expériences qu'il avait vécu et dont il était fier n'avait de sens ? Tous les sacrifices faits et le mur de glace qu'il avait érigé autour de son cœur en valaient-ils vraiment la peine ?

Tout au fond de son âme, il nourrissait une haine viscérale envers lui-même : il s'était piégé lui seul, et sans l'aide de personne. Il avait décidé en son âme et conscience d'oublier ses désirs, sa famille, sa vie, sa propre humanité pour devenir le monstre d'aujourd'hui. Ses poings se serrèrent de rage et de dépit. Il avait travaillé si fort, si intensément, à en perdre le sommeil, l'appétit, qu'il avait songé que rien ne pourrait plus jamais l'atteindre.

Allongé dans son lit, les yeux rivés sur le plafond dans la vaine tentative de se soustraire à ses pensées, le visage de la jeune femme apparut clairement dans son esprit. Son sourire éclatant, la lueur brillant au fond de son regard tandis qu'elle contemplait les mannequins défiler, la grâce de ses mouvements... Le souvenir d'elle le réveilla un peu plus, le désir recouvrant légèrement son épiderme, jusqu'à s'étendre à son bas-ventre. Il déglutit. L'odeur de son parfum le hantait encore, et leur récent face-à-face lui revint en mémoire. Il serra les poings plus fort alors que son cœur se mettait à tambouriner contre sa poitrine. Ce n'était pas comme cela qu'il envisageait la suite des événements.

Comment avait-il pu songer un seul instant que le charme d'Elena n'opérerait pas sur lui ? Comment avait-il pu être naïf à ce point ? La pensée de leurs peaux qui s'effleurent et des non-dits qui dictaient leur conduite l'un envers l'autre, les poussant à se haïr et à se désirer mutuellement le fit frissonner de plaisir. Que n'aurait-il pas donné pour ressentir à nouveau cette sensation ? La lueur de défi qui brillait dans ses yeux et qui l'interpellait continuellement... il ne pouvait pas résister à cela.

Il aimait beaucoup trop braver les interdits pour cela.

Depuis trop longtemps maintenant il considérait que l'amour n'avait pas sa place dans le monde sombre qu'il s'était taillé, que c'était de s'autoriser d'être faible d'adorer quelqu'un si fort, de lui offrir son âme sans aucune mesure : aux côtés d'Elena, si proche, si insaisissable, il comprenait que la véritable torture était de ne pouvoir succomber.

De laisser sa frustration guider la moindre de ses réflexions, le moindre de ces gestes ; foutu poison de l'amour dissimulé...

Il se retourna dans son lit, la fureur grondant au fond de son ventre. À présent qu'il songeait à elle, il était tout à fait réveiller, incapable de s'endormir. Ses pensées dérivèrent une fois de plus vers elle ; sa peau d'albâtre, l'expression de plaisir qui recouvrait son visage innocent quand il la touchait, et cette sauvagerie qui naissait au fond de ses prunelles de miel quand il passait ses mains sur son corps doux. D'un seul coup, la vision de la jeune femme, totalement nue, apparut clairement devant lui ; ses longs cheveux bruns retombaient en cascade en de subtiles boucles sur ses seins ronds et fermes, qui ne demandaient qu'à être attrapés et mordillés. Sa taille fine et son ventre plat se soulevaient à mesure que les doigts de l'homme amorçaient leur descente vers ses chairs humides et roses.

Sans qu'il ne s'en rende compte, la main de l'homme glissa sous son caleçon et effleura doucement le membre tendu qui trahissait son excitation. Dans son esprit, il entreprit de la caresser lentement afin de faire monter le plaisir ; hors de question de lui accorder une entière satisfaction au commencement, depuis le temps qu'elle le faisait mourir de désir... D'un même mouvement, d'un même rythme, il prit son sexe en main au moment il s'imaginait introduire un doigt en elle, tout en embrassant l'intérieur de ses cuisses. Le goût sucré de la jeune femme lui emplit les narines, mais pas question de suivre ses instincts. Il devait d'abord la rendre folle de lui, il voulait entendre ses gémissements et crier son nom dans une ultime supplique... D'un geste aussi assuré qu'affirmé, il enfonça un peu plus profondément son index en elle alors qu'il remontait vers son visage pour la surplomber de toute sa hauteur. De cette manière, elle était à sa merci, il la dominait, et l'excitation grandissante qui montait en elle n'avait plus aucun secret pour lui. Le souffle d'Elena s'accélérait tandis qu'il explorait sa vulve trempée, ses yeux se fermaient, elle ondulait sous lui. Leurs peaux se frottaient et s'effleuraient au rythme des caresses qu'il voulait bien accorder.

D'une main ferme, il releva sa tête vers lui et traça le contour de ses lèvres de son pouce, qu'elle lécha avidement, un air malicieux au fond des yeux. Sa langue s'enroula autour de son doigt avant de le prendre en bouche complètement, dans un gémissement d'appréciation qui arracha un soupir d'envie au jeune homme. La main de la jeune assistante rejoignit la sienne au niveau de son vagin, et à son tour, elle inséra un doigt en elle provocatrice.

- Bordel de merde...

Il émit un grognement tandis que les mouvements sur sa verge s'accéléraient à mesure que son imagination se débridait. Une légère sueur perlait sur son front alors que le plaisir recouvrait son épiderme et que ses poils se hérissaient ; il était dans un autre monde, un monde où il ne faisait plus qu'un avec Elena, où les machinations n'avaient plus leur place, où il pouvait enfin la faire gémir comme il en rêvait depuis la première fois il avait posé les yeux sur elle.

Au moment même où il atteignait une forme d'extase qu'il n'avait jamais connue avec aucune autre, un léger tapement à sa porte le fit se relever précipitamment sur son lit et retirer sa main de son sexe, la respiration haletante.

Every Breath You Take : Alliances | Tome 1.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant