Hervé s'est finalement rétabli assez rapidement, même s'il passe encore la majeure partie de ses journées à dormir. Je suis content qu'il aille mieux, et en même temps je ne peux pas m'empêcher d'être légèrement déçu. J'aime avoir à prendre soin de lui, le dorloter, le soigner, l'aider à se laver... Je me sens important quand il a besoin de moi. Et puis ce sont des instants qui ne sont qu'à nous, une complicité impossible à partager avec d'autres. Je suis le seul à connaître Hervé dans ses faiblesses, lorsqu'il ne va pas bien. Je me sens encore plus proche de lui quand je deviens son seul confident. Devant les autres il se montre toujours fort et sûr de lui. Il n'y a qu'avec moi qu'il peut laisser s'exprimer ses défauts. Et même ces derniers, je les aime !
Voilà plus de deux heures que nous bossons, chacun à notre bureau. Il est temps de prendre une pause.
– Je suis monté sur la balance ce matin, le résultat n'est pas bon.
– Qu'est-ce que tu racontes ?
– On mange un peu n'importe quoi et on ne fait plus de sport, regarde cette couche de graisse !
Il pince la peau de son ventre. Moi je le trouve absolument parfait. Mais je dois bien avouer que du point de vue de la nourriture nous ne sommes pas vraiment au top. On ne bouffe que des plats préparés qui se réchauffent en moins de deux minutes au micro-ondes. Aucun de nous deux n'aime cuisiner.
– On pourrait profiter de la salle du campus.
– Bonne idée !
Sans surprise, je trouve la proposition d'Hervé géniale.
Et il ne perd pas de temps pour la mettre à exécution. Nous rassemblons nos affaires et nous nous rendons à la salle de sport du campus. L'abonnement est payant, mais disons que cinquante euros par an pour profiter de toutes les machines, c'est un prix défiant toute concurrence. Dans les vestiaires, je suis un peu gêné. On aurait pu se changer à l'appartement, on s'en fiche de traverser une partie de la ville en short ! Je n'ai pas envie de me montrer en boxer devant des inconnus. En réalité, ce qui me gêne le plus ce sont tous ces corps de mâles bien bâtis qui s'exhibent sans pudeur. Nous sommes entre hommes, donc ils n'auraient aucune raison de se cacher. Moi, je ne peux pas m'empêcher de jeter des coups d'œil, il y en a qui sont vraiment appétissants.
Sauf que nous sommes ici pour bosser. Je vais suivre Hervé durant tout l'entraînement qu'il propose. Nous commençons par quinze minutes sur le tapis de course. Puis nous entamons une série d'exercices avec les appareils de musculation. Je ne suis pas peu fier de m'entraîner avec le plus bel homme de la salle !
– Je vais rechercher de l'eau.
Je me sens nul quand je suis seul. Celui qui attire les regards, c'est Hervé. Moi, quand je fais les exercices, ça ne ressemble pas à grand-chose.
– Salut, t'es nouveau ici ?
Un mec vient me parler, c'est étrange. Disons que nous sommes entre étudiants et que donc il n'y a rien de choquant.
– Ouais, c'est mon premier jour à la salle.
– Il est mignon ton petit copain.
Je suis en train de rougir, je le sens. J'espère que l'autre va croire que c'est à cause des efforts que je viens de fournir, j'en doute.
– Ce n'est pas mon petit copain, juste mon colocataire.
Je n'apprécie pas la phrase que je viens de prononcer. Mais je ne peux pas non plus mentir. Je m'en fiche de ma réputation, par contre je ne veux pas qu'on commence à croire qu'Hervé est gay, il n'aimerait pas.
– Cool, alors ça te dit d'aller boire un verre un de ces soirs ?
Mince, ce type est en train de me draguer. Je ne sais pas comment réagir, en revanche je ne suis pas mécontent qu'il soit venu me parler, il est plutôt mignon.
– Ce serait sympa.
– File-moi ton numéro.
Est-ce que c'est aussi simple que ça ? Après tout, je ne vois pas pourquoi ce serait plus compliqué...
Hervé revient.
– C'était qui ce mec ?
– Un type qui veut faire connaissance.
– Cool, il est temps qu'on se fasse des nouveaux potes sur ce campus.
– Ouais, je crois d'ailleurs qu'il est dans le même amphithéâtre que moi.
Une information difficile à confirmer puisqu'en début d'année il y a beaucoup de monde, certains sont même assis dans les allées.
– On finit par une demi-heure de course ?
– Je te suis.
Je suis épuisé, mais je ne vais pas laisser tomber Hervé.