Chapitre 47 « Vous vous êtes vengé ? »

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Nous venions d'entrer dans le commissariat et j'avais déjà envie de partir en courant. Cette histoire ne me plaisait pas, j'avais un très mauvais pressentiment. Assise à côté d'Hakim, je broyais sa main déjà bien abimée. Nous attendions que notre tour arrive.

— Haks... Je peux pas faire ça.

Il soupira, je sentais qu'il était aussi peu à son aise que moi dans cet environnement. C'était l'horreur absolue. Je me revoyais à dix ans, serrer la main de ma grand mère pendant que ma mère était interrogée, à douze ans pour mon premier vol à l'étalage, à dix-huit ans sur un banc de garde à vue ou dans une cellule de dégrisement, à vingt-deux ans, venant récupérer ma soeur pétée à la mort... Je haïssais ce genre d'endroit de tout mon coeur.

— Hakim, je t'en supplie, ne parle pas de la baston, dans tous les cas ce sont deux affaires différentes qui ne seront pas jugées ensemble. Si ça se trouve on pourra négocier avec Benoit pour qu'il ne porte pas plainte contre toi. S'il te plait ne dis rien.

Le rappeur caressa doucement ma paume et me jeta un regard à la fois triste et encourageant.

— On verra Namira, en fonction des keufs. Le plus important c'est que toi tu portes plainte.

Finalement, une femme d'une quarantaine d'année en uniforme vint nous trouver.

— Vous êtes là pour déposer une plainte, c'est cela ?

Je hochai la tête comme une automate.

— Suivez moi.

Hakim se leva plus vite que moi et je l'imitai, dans le couloir, il ne lâcha pas ma main et me murmura :

— Joue pas la meuf forte, montre bien que t'es traumatisée, c'est mieux.

J'acquiesçai d'un signe de tête, j'étais très bonne comédienne, c'était une grande partie de mon métier et j'avais toujours su attendrir les flics quand il avait fallut que je me prête au jeu pour sortir plus vite de garde à vue. De toutes façons, dans ce cas précis, je n'aurais pas à beaucoup forcer.

La policière nous fit assoir de l'autre côté de son bureau. Elle jaugea quelques seconde les bleus présents sur nos deux visages, me demanda ma carte d'identité, puis me lança un regard encourageant.

— Je vous écoute.

— Je voudrais porter plainte pour viol.

Elle hocha la tête.

— Je vais prendre votre déposition, essayez d'être le plus précise possible.

L'agent de police me posa ainsi plusieurs questions, sur les circonstances, l'auteur, les faits et pendant près de quarante cinq minutes, elle tapa sur son ordinateur ce que je lui racontais. Elle lançait de fréquents regards à Hakim qui ne cillait pas, se contentant de garder ma main dans la sienne pendant que je parlais. Je sentais qu'il n'était vraiment pas dans on élément, j'avais dû lui murmurer de retirer sa casquette pour ne pas perdre des points d'entrée en étant impoli.

Quand je n'eus plus rien à ajouter, la policière imprima les pages et me les fit relire avant de les signer.

Finalement, elle nous détailla tous les deux et me jeta un regard entendu avant de se tourner vers mon rappeur.

— Puis-je vous demander de sortir afin de parler à Mademoiselle seule à seule ?

Ma main se resserra aussitôt sur celle d'Hakim.

— S'il vous plaît je préfère qu'il reste... murmurai-je en amplifiant légèrement ma voix plaintive.

Mais elle ne l'entendait pas de cette façon.

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