Chapitre 72 : Je sais ce que je veux.

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Point de vue d'Adriano Gucci

Je rentre, seul, comme je ne l'avais pas prévu. Mais tout est de ma faute. Je lui ai dit de partir, que je la rejette, elle et le bébé, alors pourquoi m'aurait elle suivie. Je la connais, elle a besoin d'espace, de tranquillité pour réfléchir convenablement. Et je suis pareil. J'ai besoin d'aller penser à cette situation dans mon bureau. Je me sers un verre de whisky avant d'aller m'assoir dans mon siège. Je l'aime à en crever, et bien sûr que je suis fou de joie à l'idée de devenir papa, mais sa demande de quitter les miens m'a refroidit complètement et j'ai dit des choses que je ne pensais pas. Et maintenant voilà que je regrette. Mais je sais qu'elle va revenir d'un moment où un autre. C'est évident. Elle va vouloir qu'on s'explique, qu'on essaye de régler ce problème. Je n'ai plus qu'à l'attendre sagement...

Cependant, la porte s'ouvrit brusquement laissant apparaître ma soeur, insouciante.

_ Alors, comment ça c'est passé ? Et où est-elle ?

_ J'en sais rien.

Ma réponse est brève, courte, sans harmonie. Mais j'en ai que faire, je viens de la perdre elle et mon bébé pour rester avec la mafia, alors il ne faut surtout pas venir me parler maintenant. Alcina ne semble pas le comprendre car elle continue à me poser des questions, mais surtout elle commence à comprendre :

_ Comment ça tu ne sais pas ? Tu dois forcément savoir !

_ Et bien non, je ne sais pas ! Tu vas me faire chier encore longtemps comme ça ? Lui dis-je d'un ton qui se veut agressif.

Elle semble déstabilisée un petit moment, surtout choquée par le ton dont j'ai employé avec elle pour la première fois. Mais là, il y a une raison.

_ Elle te l'a dit n'est-ce pas ?

_ Me dire quoi ?

_ Qu'elle est enceinte. Elle te l'a dit ?

_ Oui. Et elle m'a aussi posé un putain d'ultimatum de merde, si tu veux tout savoir !

Je me lève tellement brusquement que je fais valser ma chaise, et contourne mon bureau pour faire les cent pas, ma tête entre mes mains. Pris d'une subite autre colère, je me mets à tout lui expliquer alors qu'elle ne m'a rien demandé, mais elle reste quand même du début à la fin. J'ai besoin de parler à ma soeur, j'ai besoin d'avoir ses conseils ou qu'elle m'engueule si j'ai fais quelque chose de mal, mais en tout cas, j'ai besoin qu'on me remette les idées en place et c'est la meilleure pour ça.

_ Elle m'a avoué qu'elle en avait marre de vivre dans la peur, dans le danger que baignait ce monde, elle m'a dit qu'elle voulait se sentir en sécurité pour elle et notre enfant ! Alors elle m'a dit de faire un choix entre la mafia et elle et l'enfant ! Elle a insisté pour que j'accepte et au final, je me suis mit dans une colère monstrueuse et j'ai dit des choses que je ne pensais pas ! Je... je lui ai dit de partir car jamais je ne vous abandonnerais, et que la mafia passait avant tout même elle et l'enfant. Je me suis retourné sans un regard. Je l'ai laissé toute seule sur la plage, en pleine nuit. Mais à ce moment, je m'en foutais, j'étais - et je suis encore énervé -, alors je n'ai pas pensé aux conséquences. Je lui ai dit de partir, et je suis rentré seul...

Sans que je ne m'y attende, je reçois une monumentale gifle, qui fait pivoter ma tête sur le côté.

_ Tu es vraiment un abruti de première, bon Dieu ! Dis-moi, est-ce que je te pique une colère maintenant ou j'attends encore un peu ? Non mais sérieusement qu'est-ce qu'il t'a pris ?

_ Si tu crois pouvoir me faire la morale...

Sans que je ne puisse finir, j'en reçus une autre.

_ Tais-toi ! Alors je commence par quoi ? Par le fait que tu as abandonné Lola et ton enfant jute pour une mafia alors que tu risques de mourir tout le temps ou par le fait que tu l'as laissé seule dehors en pleine nuit, avec plein de danger ? Imagine elle se suicide ?

_ Arrête tes conneries, Lola n'est pas suicidaire !

Comme on dit, jamais deux sans trois. Ma soeur est en forme. En revanche, je peux accepter que j'ai fait de très belles grosses conneries, mais il ne faut pas abuser au niveau des gifles quand même !

_ Arrête de me frapper !

_ Et toi arrête de faire l'imbécile !

_ Je sais que j'ai joué au con, mais en même temps, qu'est-ce que tu voulais que je fasse ? Elle me demande de choisir entre ma vie de toujours et une vie future ! Le choix pour moi était simple.

_ Un choix qui te la fait perdre, et pas seulement elle mais le bébé aussi ! Adriano, tu aurais pu construire une nouvelle vie avec eux, avoir pleins d'autres enfants et vivre heureux ! Qu'est-ce qu'il t'en empêche, hein ? Dis-moi parce que même moi je ne vois pas là !

_ Je ne peux pas choisir une vie qui m'est inconnue voilà le problème ! J'ai peur, peur de l'inconnu, peur que si je choisis cette vie, ça ne fonctionne pas avec Lola ! Je ne veux pas être faible, je veux être quelque chose, avoir un nom dans la société ! Je veux que les gens me connaisse tel que je suis et non ce que j'aurais choisi d'être !

_ Et tu ne penses pas que la mafia a été un choix ? Ce n'est pas toi, réellement ça, le grand Chefe qui se croit le plus fort d'entre tous. Au fond de toi, tu rêves d'être père, tu rêves d'avoir une femme et des gosses qui attendent bien sagement à la maison que tu rentres ! Tuer des gens et torturer, ce n'est pas toi, ou en tout cas, ça ne l'est plus depuis que tu as rencontré Lola.

_ Je suis juste complètement perdu Alcina. La mafia a toujours fait partie de ma vie, et je ne peux pas passer d'une vie à une autre comme ça d'un claquement de doigts. Je ne peux pas changer, bousculer toute ma vie pour aller vers l'inconnu.

_ Mais c'est pourtant ce que te demande Lola. Qu'est-ce que tu ne ferais pas pour elle ?

_ Rien. Il n'y a rien que je ne ferais pas pour elle, mais ce qu'elle me demande, c'est trop, beaucoup trop.

_ Non, ce n'est pas trop. Elle te demande la sécurité avant le danger, le bonheur avant la tristesse, le tranquillité avant le carnage. Ce n'est pas ce que j'appelle trop, mais tout simplement une vie de famille. Et ça, ça n'a pas de prix Adriano.

Ce qu'elle me dit me parait plausible. Mais ça ne change pas mon état d'âme. Je suis profondément perdu et incertain. Je ne sais pas ce que je dois faire, dire. Je ne sais pas. Je ne sais plus.

En me demandant de faire ce choix là, Lola a totalement bouleversé mes sens, mes repères. Elle m'a intégralement déstabilisé, sans forcément s'en rendre compte. Mais maintenant je comprends. Maintenant je réalise l'importance de sa demande, car elle tous, ce qu'elle veut, c'est vivre sans avoir peur. Elle veut vivre normalement.

Et au fond, c'est ce que je veux aussi, même si jamais je n'abandonnerai ma mafia, jamais je ne les abandonnerai eux.

J'ai compris ce qu'elle voulait, et aussi, j'ai compris ce que moi je veux. Et je veux être un mari et un papa.

Je veux construire ma propre famille.

Alcina qui me regarde fièrement, ayant compris que moi même j'avais compris, elle me dit calmement :

_ Va retrouver ta belle et tâche de ne pas faire une autre connerie...

_ Compte sur moi, sœurette.

Je lui embrasse le front, rapidement avant de courir pour la rejoindre.



Rien que pour ToiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant