LGDC Tragédies ~ Cycle 1 ~ Tome 6 ○ Jouer avec le Feu ○

Chapitre 45 : La Bataille de l'Arc-En-Ciel ( 6 )

média : ??? 

Etoile Sanglante ne disait rien. A part quelques murmures, la foule restait silencieuse. Vent Mauvais était énervé et tourmenté. Il fouettait l'air de haut en bas avec sa queue et scrutait la scène avec animosité. Si elle aime Patte de Feu, alors moi, je suis quoi ? se demanda t-il. Sa colère et sa jalousie se transforma en un profond chagrin. Des larmes lui montèrent aux yeux, et il s'éloigna en poussant un soupir exaspéré. Son pelage était trempé, mais il s'en fichait, il voulait juste trouver un moyen de raisonner Etoile Sanglante. 

~°~

 Feuille Brisée, quant à elle, était à l'abri dans la pouponnière. La pluie se calmait peu à peu ce qui la soulageait. Cela éviterait qu'un potentiel orage reprenne, une chose dont elle avait vraiment peur. Elle était fatiguée, et pourtant ne pouvait pas aller dormir. Elle était trop troublée par sa tristesse d'avoir perdu sa famille et sa haine envers celle qui lui avait mentit. Elle envisageait d'ailleurs d'aller lui parler plus tard. Les nuages noirs s'éloignèrent peu à peu au-dessus d'elle, même si la jeune reine avait l'impression qu'il y étaient toujours. Elle était dans une sorte de solitude paralysante, l'empêchant de faire un seul mouvement. Son regard lui semblait perdu dans une brume épaisse de larmes, mais personne ne pouvait la sortir de là. 

 Une queue passa sur son dos. Elle leva la tête mais n'eut même pas besoin de pouvoir voir correctement pour reconnaître Pelage D'écureuil. D'un coup folle de joie, elle frotta sa tête contre sa fourrure en ronronnant. Elle avait l'impression qu'un gros poids sur son cœur avait disparu. Sa voix était tellement étranglée qu'elle pût à peine dire : 

« - Merci, Pelage D'écureuil. » 

~°~

 Etoile Sanglante remarqua que quelques membres du Clan de l'Arc-En-Ciel s'étaient retirés, en même temps, la fin d'après-midi arrivait. Elle regardait toujours Patte de Feu, qui était inconscient depuis tout à l'heure, baignant encore dans son sang. Après cette sieste, il devrait se sentir ragaillardit. Elle passa sous son ventre pour le hisser sur son dos. Elle devait l'amener autre part, il commençait vraiment à faire froid en cette fin de saison des feuilles vertes. Elle soupira rien qu'à cette pensée ; la saison des feuilles mortes allait bientôt arriver. Elle porta le blessé jusqu'à son antre. Elle posa sa tête sur sa fourrure mais ne pût s'endormir : toutes ses machinations et sa peur l'en empêchait. 

 Elle repensa soudain à Vent Mauvais et à cette question qu'il lui avait posé ; est-ce qu'il comptait vraiment à ses yeux ? Cette question lui préoccupa alors ses pensées. Elle ne savait plus quoi penser de lui, mais, pour être honnête avec elle-même, elle devait avouer que ces derniers temps elle s'était en quelques sortes détachée de lui. Alors... je ne l'aime pas ? Son ventre se noua mais cela ne lui faisait rien. En fait, le problème c'est qu'elle ressentait des sentiments pour Patte de Feu aussi. Peut-être n'aimait-elle pas autant Vent Mauvais que lui, peut-être aimait-elle plus Patte de Feu ? C'est peut-être mieux ainsi, songea t-elle. Si je dis sincèrement ce que je pense à Vent Mauvais, peut-être ne m'en voudra t-il pas. Si jamais je continue à lui mentir en lui disant que je l'aime, je lui ferais du mal. Je ne veux pas. Mieux vaut qu'on reste au moins amis. 

Etoile Sanglante se sentait déterminée à lui parler à présent. Elle se redressa et quitta son antre, le cœur battant. Ses yeux papillonnèrent en le cherchant. Elle l'aperçu en bas de la plaine et elle la descendit à pas lents. Une fois à quelques queues de renard de lui, elle poussa un soupir silencieux et se décida à lui parler, en gardant la queue droite pour ne pas paraître agressive. 

« - Vent Mauvais ? » 

Le guerrier gris dressa les oreilles et pivota. En la voyant, il ne savait pas comment l'aborder. Avec haine ou bien calmement ? Voyant qu'elle ne semblait pas triste en le voyant, il lança malgré lui : 

« - Salut, Etoile Sanglante. 

- Euh salut. Je peux te parler, s'il te plaît ? demanda t-elle en s'efforçant rester gentille dans son ton. 

- Euh pas de problème... » 

Elle s'assit et le regarda dans les yeux. Vent Mauvais rougit, mais il ne savait pas ce qu'elle allait lui dire. 

« - Je voudrais te répondre au sujet de ta question de tout à l'heure... J'espère que tu ne le prendras pas mal... » commença t-elle. 

Les yeux du guerrier gris brillèrent d'une lueur d'inquiétude. 

« - Parle, déglutit-il sans la quitter des yeux. 

- Je sais que tu es en colère après moi, et je sais que j'aurais beau te crier désolé, tu ne me pardonneras pas si vite. Je t'aime beaucoup mais... je dois avouer que... que j'aime Patte de Feu aussi, » révéla t-elle. 

La lueur qui brillait dans les yeux de Vent Mauvais s'éteignit. Il s'obligea à ne pas s'énerver, ni à sangloter. Etoile Sanglante secoua la tête avec un certain chagrin. 

« - Mais... mais... je... voulut-il dire. 

- J-je sais ce que tu ressens Vent Mauvais, mais tout n'est pas rattaché à toi. Ce n'est pas parce que tu m'aimes que je t'aime autant. J'ai peur de ne pas t'aimer autant que tu m'aimes, et c'est pour toi que je fais ça. Tu ne me contrôles pas, ne crois pas ça. J'ai le droit d'aimer qui je veux. Mais... je préfère qu'on ne brise pas nos chaînes, c'est pourquoi je te propose que l'on reste amis malgré tout. » 

 Vent Mauvais sentit son cœur cesser de battre. A ce moment, il eut l'impression qu'on l'empêchait de respirer. Il sentit ses yeux s'embrumer en regardant la patte que lui tendait Etoile Sanglante, comme quoi s'il acceptait ce qu'elle avait dit, ils restaient amis. Mais il ne voulait pas accepter. Il l'aimait plus que tout au monde, et, même s'ils restaient amis, il aurait l'impression qu'un grand mur se serrait construit entre eux. Il la voyait sourire et entortiller sa queue avec amusement, gardant un calme imperturbable. Malgré lui, il ne pût empêcher ses larmes de couler. Ne voulant pas qu'Etoile Sanglante le voit comme ça alors qu'elle lui avait parlé honnêtement et calmement, il détala d'un coup et disparu derrière les sapins, en sanglots.