heureux.

chapitre 26 • les parisiennes

K E N

Ses yeux plantés dans les miens, elle me fixe sans chercher à se rapprocher de moi.

On se regarde, juste, et un sourire prend finalement place sur ses lèvres en même temps que moi. Parce qu'on a vraiment l'air cons, à rester immobiles sans se quitter des yeux comme ça. C'est sûrement ce que se dit également 2zer, qui passe derrière la réunionnaise et la pousse vers moi.

- Vas-y zer2 laisse-les se bouffer du regard, tu gâches tout ! s'exclame Framal.

- C'est toi qui gâches tout avec ta voix de phacochère ! Faut bien les secouer un peu, à ce rythme là ils se décideront à faire des gosses dans 30 ans.

Je ris en lui adressant un doigt d'honneur, puis je parcours les derniers centimètres qui me sépare de Noleïa. Je glisse un bras derrière son cou, et la rapproche de moi pour embrasser son front sous les regards peu discrets des autres. Elle enserre ma taille et se plaque contre moi, j'inspire l'odeur de ses cheveux. Sa tête posée sur mon torse, je la sens écouter les battements de mon cœur.

- J'crois qu'elle est en train de lui mordre le pec', murmure Moh.

-Vas-y ta gueule, c'est toi que je vais mordre si tu continues, grogne Noleïa sans se détacher de moi. Elle murmure un plus bas de sorte à ce que je sois le seul à entendre : tu m'avais manqué. J'avais presque oublié à quel point t'es moche.

J'ris, et sa tête se secoue de concert avec ma cage thoracique. J'me demande si elle a remarqué les cernes qui ornent mes yeux, me faisant paraître plus vieux.

- Elle lui dit des trucs cochons, suppose Framal.

Noleïa roule des yeux et se décolle légèrement de moi pour saisir le livre posé sur la table basse à l'entrée. Orgueils et préjugés, il me semble. Elle a du le relire pour la 8e fois. Elle m'a un jour avoué qu'elle connaissait certains passages par cœur, à force. Ce doit être pour ça qu'elle n'a aucun scrupule à le lancer sur Fram', qui l'esquive dans un cri. Résultat, c'est sa meilleure amie - Katherine, je crois - qui le prend en pleine tête.

- Aïe ! Mais t'en as pas marre de me martyriser ?

- Je visais la musaraigne, c'est pas de ma faute s'il s'est décalé ! tente de se défendre la métisse en s'éloignant vraiment de moi cette fois-ci, me privant de la chaleur de son corps.

- "La musaraigne" ? répète Fram' en comprenant qu'elle le compare à cet animal. C'est quoi ?

- Nan, t'es pas sérieux ? hallucine son frère. Tu connais pas les musaraignes ?

- Moi je sais c'que c'est ! s'écrie Doums fièrement. Un jour j'ai regardé un documentaire dessus.

- Bravo Doudou, c'est bien, ironise Noleïa.

Il la tchèque, ne comprenant pas qu'elle se moque de lui. J'sais pas le pire entre la naïveté de l'un et la gaminerie de l'autre.

- Elle se fout d'ta gueule, Doums.

- Je sais, et moi je me fous de sa gueule en faisant semblant que je ne sais pas qu'elle se fout de ma gueule, explique le renoi d'un air satisfait. Vous me suivez ?

Nous plissons tous les yeux de concert, tentant de comprendre sa phrase. 2zer préfère s'éclipser dans la cuisine pour aller chercher des bières, et nous prenons place dans le salon, reprenant notre discussion. J'avais failli oublié le bonheur de retrouver son appart'. Nous sommes en plein débat sur la nourriture du Mexique quand Moh nous coupe :