Chapitre 82 : Râpeux comme une langue de chat

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Les bannières violettes flottaient sur tout l'horizon, derrière les champs qui entouraient les premiers quartiers de la cité, ceux privés de la protection du mur d'enceinte. Elles étaient souvent accompagnées des drapeaux du Surda que le roi Orrin avait fait ériger bien haut aux quatre coins de son camp comme pour défier l'Empire dissimulé à couvert de ses créneaux de roche. Bien piètre assortiment de puissance contre un tel rempart.

D'un côté du mur, le dédale des ruelles avait été déserté par la populace qui avait pris la route peu avant l'arrivée de l'armée Varden approchant depuis le sud et Belatona, tombée quelques jours auparavant. De l'autre côté, ce même enchevêtrement de passages grouillait de vie, celle-là même qui coulait à Dras Leona, nauséabonde, infesté par la vermine qu'elle soit pauvre ou aisée ; des gueux faisant l'aumône, des catins, des esclaves et des maîtres engraissés arpentaient chaque jour et chaque nuit les pavés enfoncés dans la terre.

Plus loin encore au centre de la ville les tours menaçantes de la cathédrale dominaient la région. Elles répondaient à la forme lointaine de Helgrind, le repaire des Ra'zacs. Les viles créatures avaient subi la lame meurtrière d'Eragon quelques semaines plus tôt, lorsque le Dragonnier avait été les retrouver et avait achevé ce pourquoi il était parti de Carvahall : venger la mort de son oncle Garrow. Une perte qui avait entraîné la colère de Galbatorix et dont beaucoup autour de lui en avaient fait les frais.

Le pas désordonné de deux soldats claqua sur le chemin de ronde. Jéanna se détourna du spectacle des tentes et des fanions colorés et son regard suivit un instant les hommes vêtu d'un uniforme rougeoyant, orné au centre du symbole de l'empire brodé au fil d'or. Ils brillaient d'un éclat qui manquait à la cité, exprimant par là la vertu qui lui faisait également défaut car, Dras Leona n'était en effet que l'antre du vice et du mal, incarnés par ses prêtres mutilés qui prêchaient la servitude des faibles et la dévotion sanglante envers feus les habitants de Helgrind. La jeune femme fit la moue à cette seule réflexion et s'empressa d'oublier qu'elle devait quotidiennement souffrir leur apparition aux conseils que tenaient Murtagh et le gouverneur de la ville.

Elle abandonna son poste de gué et rejoignit Thorn allongé plus loin, à une centaine de pas de la porte Sud. Il restait là jour et nuit, fixant tous les mouvements dans le camp des Vardens. Plusieurs jours auparavant il avait annoncé l'arrivée d'un grand contingent aux armures étincelantes : les Nains se joignaient à la guerre. Depuis, à part quelques troupes partant ou revenant, il n'y avait rien de suspect à signaler.

-                     Aucun changement ? Demanda tout de même Jéanna en arrivant près du dragon.

Son œil immense obliqua vers elle, la paupière cligna lentement.

« Ils attendent toujours.

-                     Ils espèrent trouver le moyen de franchir ces murailles.

« Ils ne passeront jamais tant que je serai là, déclara Thorn d'un ton sans appel.

Etait-ce la fin des Vardens ? La Main Noire se demanda si la rébellion allait lamentablement s'échouer aux portes de Dras Leona, comme un navire à la dérive. Plusieurs jours s'étaient déjà écoulés et malgré la distance on ne pouvait douter que le moral des troupes adverses diminuait chaque heure supplémentaire à se tourner les pouces. L'armée de Nasuada était faite pour aller de batailles en batailles, et ne tiendrait pas un siège de plusieurs semaines par faute de moyens, notamment de vivres. Voilà la raison pour laquelle la jeune reine avait stationné si longuement au Surda, pour engranger de quoi tenir lorsqu'ils s'élanceraient contre les forces de Galbatorix. La guerre devrait se terminer le plus rapidement possible, ils n'auraient pas de deuxième chance.

Fanfiction Eragon - Les Liens du Destin - TerminéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant