Chapitre 44 : Christine

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- Oui. Dit il en finissant sa bouchée. Elle s'appelle Christine.
- Elle est comment ?
- Brune, grande...
- Pas physiquement, je le coupe, elle est comment avec toi ?
- Elle est très gentille, elle m'aide beaucoup, à m'ouvrir, à me contrôler pour ce qui est de l'alcool. Je l'ai rencontré à l'hôpital.
- A l'hôpital ?
- A l'hôpital psychiatrique, elle est infirmière.

Je ne m'y attendais pas à celle là, mon père est allé en hôpital psychiatrique ? Il est allé se faire soigner pour ses problèmes d'alcoolisme et de saute d'humeur ? Ils lui avaient trouvé quoi ? Bipolarité ? Dépression ? Hystérie ? Tout une tonne de maladies mentales me viennent en tête.

- Donc tu t'es tapé l'infirmière ?

Merde, ces mots un peu trop crus sortent peut être un peu trop vite de ma bouche et je m'en rends bien vite compte.

- Désolé.
- Ne t'excuse pas. Ca ne s'est pas passé comme ça non, on a bien sympathisé pendant que j'étais à l'hôpital et après on s'est revu plusieurs fois quand je suis sorti et maintenant voilà.
- Ca fait combien de temps ?
- 7 ans.

Wow ! Sept ans qu'il est avec sa copine et il n'a pas prit la peine de me demander des nouvelles, en même temps, cela faisait déjà une bonne dizaine d'années que je ne l'avais pas vu, j'ai même peiné à le reconnaitre tout à l'heure.

- Bon bah si tout marche bien alors c'est tant mieux.
- Oui. Et Je dois te dire quelque chose... On a un fils tout les deux, il a 6 ans maintenant.

Bordel de merde, il lui avait fait un gamin, je suis sur le cul, je ne m'y attendais pas à celle là, et lui qui dans sa lettre parlait de rétablir le lien avec sa véritable famille. Il avait bien vite fait de nous oublier et de construire sa vie ailleurs.

- Ah.
- Je sais que j'aurais du te reparler depuis un moment Rose, mais je m'en voulais tellement... Et je savais que tu m'en voulais aussi, j'avais peur aussi que tu refuses de me voir. Alors j'ai essayé de trouver le bonheur avec Christine et Paul, puis au bout d'un moment j'ai décidé qu'il était temps que je fasse face à ce que je vous ai fait.

Christine et Paul, je voyais déjà la petite famille de catho, qui va tous les dimanche à la messe et qui croit aux miracles. Elle devait penser que c'était un miracle, qu'il était soigné, que tout irait mieux, c'était sa bonne action à elle, de le rendre un homme meilleur. Mais plus le temps passait lors de ce repas plus j'avais les paroles de Matt qui tournaient dans ma tête, "Les gens changent rarement." Beaucoup trop de questions dans ma tête.

- Dis quelque chose Rose s'il te plait.
- Je ne sais pas quoi penser
- Tu veux peut être les rencontrer ? Voir des photos, après tout Paul est ton demi frère.
- J'ai l'impression que tu as eu une double vie. Cette Christine rassure moi c'est pas une des femmes avec qui tu as trompé ma mère au moins ?
- Quoi ? Non ! Jamais ! J'en ai fini avec ça Rose, vraiment, je ne gâcherait pas une seconde fois la vie de famille que je viens de former.

Je sais où est le problème, le problème c'est que ça me fait mal. Pourquoi eux, ils auraient le droit au Nicolas droit dans ses basckets, qui ne boit plus, qui ne fais plus de crises de colères, qui n'est plus infidèle ? Pourquoi ils auraient le droit au père de famille parfait alors que je n'y ai jamais eu le droit. Je crois que c'est ça, je lui en veux de ne pas avoir été la figure paternelle dont j'aurais rêvé. J'ai rapidement eu Franck qui est arrivé dans nos vies, mais comment créer des liens père/fille avec une fille de 19 ans ? Pendant les 19 années les plus importantes de ma vie où je me suis construite je n'avais pas eu un père sur lequel compter, un père avec lequel partager tout un tas de choses. Comment rattraper cette relation que je n'ai jamais eu avec mon père aujourd'hui, alors que j'ai 27 ans. C'est impossible, c'est pas maintenant qu'il faut revenir comme une fleur, se rendre compte qu'il a une fille qu'il n'a pas vu grandir, qu'il ne connait ni en noir ni en blanc. Aujourd'hui Franck avait prit une place beaucoup plus importante dans ma vie que ne l'avait fait mon père, je me voyais déjà lui demander de me conduire à l'hôtel si je devais me marier un jour. Et lui il revient, il revient sous seul prétexte qu'il est mon père, mon géniteur. Je me rappelle encore du message qu'il m'avait envoyé pour mes 18 ans, avec son fameux "Ma fille", mais aussi quand il m'a dit qu'il avait tenu sa "progéniture" dans ses bras. Je m'étais sentie comme une chose, sa progéniture, sa propriété, qu'il n'a jamais pris le temps de connaitre préférant à 100 fois se rendre ivre ou sauter à gauche à droite. Jamais je n'avais répondu à ce message, c'était surement sa dernière chance pour éviter que je coupe les ponts et il l'avait ruiné.

- C'est bien. Dis-je alors en me rendant compte que j'avais laissé le blanc s'installer. Je suis contente pour toi si tu as réussi à trouver ton bonheur.

C'est faux, tout aussi faux que quand je répondais des "Moi aussi" à ses "Je t'aime ma fille". Je place toutes mes émotions et réflexion au plus profond de moi et continue de faire bonne figure.

- Montre moi des photos alors.

Il sourit, bon c'est déjà ça il a l'air heureux, si je peux le rendre heureux Je n'ai pas envie de lui cracher milles insultes à la figure, et je n'ai même pas le droit d'envier ces pauvres personnes qui n'ont rien demandé. Il sort son portable et me parle d'eux pendant un trop long moment... En fait je crois qu'il me parle d'eux, de sa nouvelle famille et du bonheur qu'ils ont construit jusqu'à la fin du repas. Bravo, je le félicite, il a réussi à fonder sa nouvelle petite famille parfaite à 50 ans, après avoir foiré une première fois. Merde, je n'ai pas le droit de dire ça. Mais je me sens minable, j'étais quoi moi ? Le premier test, voir si j'arrive à pas me comporter comme un connard pour une première fois et si ça marche pas j'arrête tout et je recommence ailleurs ? Il y avait un truc qui clochait. Jusqu'à la fin du repas je ne cesse de me poser des questions, est-il rentré dans une secte ? Est-il avec elle par profit ? Elle est peut être riche qui sait. Cet enfant est-il vraiment le sien ? Il a presque le même âge que Livio bordel, le fil de ma soeur a presque le même âge que celui de mon père. Quelle idée de faire un enfant à cet âge là ? Quel âge a mon père même aujourd'hui. Si je me rappelle bien je crois qu'il est né en 1955, donc si je fais un petit calcul rapide il a eu ce Paul à 54 ans, quel genre d'homme passé la cinquantaine décide d'avoir de nouveau un enfant. Puis cette femme a l'air tellement jeune Je n'arrive pas à savoir quoi penser de ce qu'il est devenu..

- Bon, tu as fini toi non ?

J'hoche la tête en regardant mon assiette vide.

- On va peut être y aller alors ? J'ai de la route qui m'attends moi.
- Pas de soucis.

Je me lève et prends ma veste et pendant qu'il se dirige vers le comptoir j'en profite pour prendre mon portable et envoyer un texto à Matt : "C'était épuisant, chez moi dans 30min ?" puis plonge de nouveau mon téléphone dans ma veste et rejoins mon père.

- Eh bien je suis très content de t'avoir revu ma fille, j'espère qu'on se verra vite, n'hésite pas à me dire quand tu es sur Nice.
- Pas de soucis.

Il me prends dans ses bras et embrasse mes cheveux comme il a toujours eu l'habitude de le faire tout en caressant un peu mes cheveux de sa main droite, me regarde une dernière fois avec un grand sourire.

- J'espère te revoir vite.
- On verra bien.

Il hoche la tête et part, de dos je remarque qu'il avait changé de style vestimentaire également, il portait des chaussures de villes et un trench puis avait une petite sacoche.

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Que dire de ce repas ? Est ce que Rose va accepter de revoir son père ?
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À fleur de Matt [FINI]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant