Chapitre 37 : L'impact tardif d'une balle de plomb

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DÉCEMBRE 1975

Une semaine plus tard, c'est le front appuyé contre la vitre du Poudlard Express qui filait à travers la campagne que je passais le retour à Londres pour les vacances de Noël. Perdue dans mes pensées, j'étais incapable de détacher mon regard de la frise d'arbres enneigés, aux branches pendant tristement vers les rails glissants, qui défilait derrière la fenêtre. Le paysage avait beau être dénué de couleurs, il m'inspirait une étrange sérénité, le contraste entre la fraîcheur extérieure et la chaleur, réelle et métaphorique, régnant dans le compartiment que je partageais avec Angel, Becca, Charlie et Theo me mettant du baume au cœur, de sorte que ce ne fut que lorsqu'il se mit à faire trop sombre pour que je puisse encore y voir quelque chose que je me détournai pour m'intéresser à la partie d'échecs que se disputaient Angel et Charlie. Un instant, je tentai de comprendre à quel stade du jeu ils en étaient rendus, mais un bâillement que je dus étouffer dans ma manche me découragea et je me renfonçai dans la banquette sans plus chercher à réfléchir.

— Tu n'aurais pas dû te coucher aussi tard cette semaine, déclara Angel qui me regardait du coin de l'œil en attendant que Charlie joue son coup.

— Excuse-moi d'être polie et d'être allée à la soirée de Slug hier !

— Je crois qu'elle parlait plutôt de tes retenues de cette semaine, railla Becca. On peut savoir ce que tu as fait pour les mériter, d'ailleurs ?

Je m'efforçai de prendre un air naturel et convaincant avant d'annoncer :

— Je vous l'ai déjà dit : j'avais envie de prendre l'air et Rusard m'a surprise.

— Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai quelques difficultés à te croire, commenta Charlie en avançant un cavalier qui écrasa un pion d'Angel.

— Pourquoi ?! m'offusquai-je.

— Parce qu'à chaque fois qu'il t'arrive quelque chose de bizarre, les Maraudeurs sont toujours dans les parages... Tu es sûre que ta promenade nocturne n'était pas plutôt de la même veine que leurs blagues douteuses ?

— Je ne vois pas ce qui te fait dire ça.

— C'est ça. Fais semblant de ne pas comprendre de quoi je parle. En tout cas, je suis ravi que tu aies décidé de passer le voyage avec nous ! On ne te voyait plus beaucoup ces derniers temps, entre cette journée à Pré-au-Lard où tu as purement et simplement disparue et tes longues conversations avec Potter, Black et Pettigrow...

Je levai les yeux au ciel. Même après deux années complètes passées à ses côtés, la nature très observatrice de Charlie continuait à me surprendre. J'avais l'impression qu'il analysait chacun de mes faits et gestes. Notamment le peu de temps que j'avais passé en leur compagnie avant qu'on ne quitte Poudlard. Négligence dont, à dire vrai, je ne me sentais pas coupable. Entre cette histoire avec Theo et les discussions avec James, Sirius et Peter pour convenir de la meilleure manière d'annoncer à Remus ce qu'ils avaient fait pour lui, j'avais eu plus de raisons de leur fausser compagnie que de les côtoyer.

— On ne va pas tarder à arriver, commenta soudain Theo, resté silencieux jusque là.

Je jetai un regard par la fenêtre et ne pus que constater qu'il avait raison. Déjà, les lumières de la ville diffusaient de drôles d'ombres sur nos visages alors que le train filait toujours à pleine vitesse, invisible aux yeux des Moldus. Une dizaine de minutes plus tard, il s'immobilisa finalement au côté du quai de la voie 9 ¾. Après avoir serré Angel et Becca dans mes bras, salué joyeusement Charlie et, de manière un peu plus fuyante, Theo, je quittai le compartiment en traînant ma grosse malle derrière moi.

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