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— Vos parents sont en chemin, un médecin ne va pas tarder à venir vous parler.

— Merci, articulé-je difficilement.

Une fois seule, j'essaie encore de comprendre comment je me suis retrouvée dans la morgue d'un hôpital, empaquetée pour mon supposé dernier voyage. Je suis allongée sur le lit de ma chambre, avec une blouse ; c'est mieux que d'errer nue comme tout à l'heure, il y a déjà du progrès.

Maintenant que je suis isolée et que je sais où je suis, je jette un œil sur mon corps. Mes bras et mes jambes sont jonchés d'hématomes qui dénotent avec ma peau d'ordinaire très pâle. Elle semble désormais translucide, au point que mes veines ressemblent à des routes qui relient mes bleus entre eux. Quand le médecin passera, j'aurai le droit de me doucher, et d'enlever cet amas collant répandu sur mes cheveux, bien que je ne sache pas ce que c'est. Cela ressemble à du sang, néanmoins, lorsque je touche mon crane je ne sens aucune plaie, il doit y avoir une explication logique.

Trop de temps a passé pour que je pense encore que la théorie du rêve est la bonne. Cependant, je ne vais pas encore abandonner cette idée, tant la situation semble étrange.

Je profite aussi de cette solitude pour faire le point. Quelque chose me dit que ça ne durera pas. A l'heure actuelle je me suis réveillée morte dans une morgue... En fait, je ne vais pas faire le point, faire le point c'est nul ! Je me demande quel jour on est, mon dernier souvenir date de mercredi. J'espère que je n'ai pas raté trop de cours... Je regarde à travers la fenêtre de ma chambre, le soleil se couche peu à peu en donnant une teinte orangée au ciel. Ce spectacle est magnifique, pourtant j'observe le ciel sans le voir.

J'ai intégré l'Université il y a peu, après avoir fait absolument tous les types de boulots possibles pour mettre de la distance entre mes parents et moi. Et contre toute attente, j'ai fini par aspirer à l'avenir à la fac que ma mère voulait tant. J'ai commencé il y a un mois, avec une dominante pour la biologie et plus spécialement la génétique. Mais recommencer les études après avoir erré de boulot en boulot est compliqué, c'est pourquoi je dois m'accrocher. Je n'ai que dix-neuf ans mais j'aimerais ne pas perdre une année de plus.

— Bonjour Mademoiselle Sanders, je suis le Docteur Johns.

Un homme en blouse blanche pénètre dans la chambre. Il est grand, blond et chaleureux.

— Eden, dis-je avec une voix étranglée, visiblement pas encore remise des émotions récentes ; appelez-moi Eden.

— Eden, vous devez avoir beaucoup de questions... tout d'abord je vous présente mes excuses concernant le traumatisme que vous avez subis...

— Docteur, s'il vous plaît, expliquez-moi, pas de détour ou de semi-vérité, je pense que j'ai suffisamment encaissé pour une bonne dizaine de vie.

Le médecin affiche un sourire gêné. Évidemment, je comprends qu'il soit mal à l'aise et je m'en veux de lui causer cette angoisse, mais aussi altruiste que je peux être, j'ai la sensation d'être prioritaire pour l'instant.

— Très bien. Vous avez été amenée à l'hôpital à la suite d'un terrible accident de voiture. Vous aviez des contusions, des hématomes, une commotion cérébrale et une plaie à la cuisse qui déchirait votre artère fémorale.... et avez perdu beaucoup de sang avant l'arrivée des secours. Lorsque vous êtes arrivée donc, votre pouls était fuyant et votre état très grave.

Il s'interrompit quelques instants avant d'ajouter :

— Votre cœur s'est arrêté et nous avons tenté de le faire repartir à plusieurs reprises, mais sans succès... Votre décès a été déclaré Eden, nous avons refermé vos plaies et vous avons descendu à... (nouvelle interruption) la morgue. Ce n'est que 3h plus tard que vous vous êtes réveillée, en fichant la trouille de sa vie à l'infirmière qui vous a trouvée.

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