Chapitre 31

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J'étais rentrée chez moi avec un sérieux poids sur la conscience. J'avais enfin obtenu ce que je voulais, les membres de l'opposition attendaient de moi que je communique le maximum d'infos à propos des projets d'Endemol. 

Mais plus les jours passaient, plus j'observais Camozzi. Et une voix intérieure me criait qu'il ne méritait pas ça. Ce qui était totalement faux d'ailleurs. Il avait sûrement son lot de responsabilité dans ce qui nous arrivait aujourd'hui. Mais c'était terrible à dire mais une partie de moi n'arrivait pas à le détester. 

Il ne s'était rien passé depuis notre dernier échange. Celui où nous nous étions presque embrassés. Et d'ailleurs, personne ne parlait d'un raid à venir. Ce qui était étonnant puisqu'il était habituel à ce que toute la caserne se prépare qu'importe que le raid en question soit secret défense. 

J'avais peut-être mal entendu et fait des fausses promesses aux membres de l'opposition. Quoiqu'il en soit, n'avoir rien à divulguer à propos de Camozzi m'arrangeait particulièrement dans ces temps où mon esprit, et mes sentiments, me jouaient des tours. 

- Nina, HK416, me glissa à la va-vite une fille hautaine de mon équipe tout en me désignant un tas d'armes.

Camozzi nous avait donné quelques ordres brefs ce matin. Nous devions nous préparer à un déplacement mais j'ignorais s'il s'agissait du présumé raid. Il avait refusé de nous donner plus d'informations alors je restais dans l'attente ne sachant pas si ma mission d'espionne allait réellement se mettre en route.

- Unité d'élite, veuillez-vous rassembler, clama Camozzi en montant sur une des marches d'un des camions d'Endemol.

Tous mes collègues étaient rassemblés. J'étais loin de m'être réellement intégrée contrairement à certains fruits fraîchement pondus par Endemol, à savoir les soldats du type Connor. J'avais vaguement sympathisé avec d'autres. Le reste m'ignorait royalement. Ce qui restait commun à peu près toute l'unité, c'était cette méprise à mon égard. 

La plupart devaient être jaloux. J'étais la meilleure en tir, une des meilleure en combat rapproché. Et le commandant était attentif à tous mes gestes et même si la plupart du temps il s'agissait de réprimandes, je savais que cette attention particulière provoquait de vives tensions. Ce n'était pas seulement des filles qui me jugeaient sans pitié. Non. Même les hommes de mon équipe avaient une certaine rancœur envers moi.

Je pense que c'était lié à deux choses. D'abord sur mon rapport à Endemol, j'étais une des rares de la caserne à ne jamais me rendre aux événements à la gloire de la dictature ni même à participer aux activités ayant pour but de faire accepter cette nouvelle idéologie dans notre société. La plupart des soldats étaient des partisans d'Endemol de la première heure alors il était clair que je faisais un peu tâche au milieu de ces illuminés politiques. D'autre part, j'étais assez froide et distante avec mes collègues la plupart du temps. Excepté avec quelques soldats, les rares qui étaient venus vers moi. Et c'est cette distance qui a eu du fortement contribuer à cette rancœur générale.

Quoiqu'il en soit, être le paria de la caserne ne m'avait jamais causé problème jusque là. 

C'est alors seule que je montais dans un des nombreux camions mis à disposition pour la mission du jour. Plus nous avancions, plus je sentais que ce dont vers quoi nous nous dirigions n'était pas une simple mission. L'état de Camozzi, le stress général répondaient de façon affirmative à mon hypothèse. 

Nous étions en route pour le fameux raid.

- Une dernière chose soldats, Dit Camozzi d'une voix forte. 

Tous les individus présents dans le camion tendirent l'oreille vers le commandant. 

- Ne laissez aucune victime, affirma-t-il avec conviction.

Mes yeux s'écartèrent face à la lueur inhabituellement sans pitié qui brillait dans les yeux de Camozzi. 

- Tu sais où on va exactement? Demandai-je discrètement à mon voisin qui s'avérait être malheureusement une fille de mon équipe qui ne m'appréciait pas particulièrement. 

 Elle me jaugea avec dédain mais me répondit tout de même. 

- Aucune idée. Mais j'ai entendu dire que nous étions en route vers un foyer de résistants. 

Je hochais de la tête sans penser à la remercier. J'étais plongée dans mes pensées. Ce foyer était sans hésitation la mission dont parlait Camozzi au téléphone. 

- Nous sommes arrivés, descendez rapidement! Arme en main! Cria Camozzi avec une force qui m'avait été rare de voir dans ma vie.

Tous les soldats descendirent avec discipline. Comme s'ils avaient presque hâte de voir ce qui les attendait. Comme s'ils étaient heureux d'exercer ce métier. Pour la plupart, ça devait être le cas. 

Je suivais avec une impatience moindre comparé aux autres et restait derrière les autres membres de l'élite.

- Nous disposons de quelques minutes avant de lancer l'assaut. La mission est simple. Les hommes et femmes présents dans le bâtiment à vôtre gauche collaborent contre Endemol. Nous bénéficions d'un sérieux effet de surprise alors tâchez d'en faire bon usage.

Toute la l'élite hocha la tête et les soldats se préparèrent attendant le cri d'assaut du commandant.

- Une dernière chose, je sais que vous êtes habitué à être confrontés avec des ennemis d'Endemol mais ceux-là sont particulièrement plus dangereux. Ne prenez pas de risques et soyez à la hauteur de notre gouvernement! 

Les soldats crièrent leur accord. Je haussais les yeux au ciel dans mon coin. Je n'avais aucune idée de qui se trouvaient à l'intérieur et cela me terrorisait. Cette mission semblait plus dangereuse que les autres que j'avais pu faire aux ordres de Camozzi.

- Allons-y soldats!! Cria le commandant. 

Tous déboulèrent à toute vitesse vers l'immense bâtiment gris. Je les suivais plutôt mollement et très vite je me retrouvais parmi les derniers. Je voulais retarder au plus loin le moment où j'entrerai dans le hangar. 

Par l'intensité de l'action, j'avais l'impression de toute vivre au ralentir. Lorsque j'entrais enfin dans le bâtiment les échanges de coup de feu m'aveuglèrent un moment avant que je me décide de me mettre à terre. Des hommes gisaient à mes côtés, des soldats et d'autres qui ne semblaient pas appartenir à Endemol. 

C'était une véritable hécatombe...

Camozzi avait été beaucoup trop confiant. Les résistants étaient au courant de l'arrivée de l'armée. 

Et cela grâce à moi. 

La mission semblait être un échec cuisant. Je ne comprenais pas pourquoi Camozzi ne nous demandait pas de nous retrancher. Par fierté sans doute. 

J'avais l'impression d'être la seule à comprendre que cela n'avait aucun sens. Les autres soldats se délectaient de cette violence et je les voyais tirer sur chaque silhouette qui osait se manifester dans l'immense bâtiment.

- Tu fous quoi Tibert!? Me cria une fille de mon escadron. 

Je restais silencieuse, les bras ballants tenant mollement mon arme. 

- On doit trouver un meilleur endroit pour tirer! Dit-elle. 

Elle semblait assez ennuyée de devoir faire équipe avec moi. Mais nous étions seules dans notre coin, les autres étaient trop loin. Je restais silencieuse et surtout passive. Je refusais de me battre contre ces gens. Je refusais d'ôter des vies.

- Je croyais que tu savais tirer?! Me dit-elle avec mépris. 

J'ouvrais la bouche m'apportant à répondre mais quelqu'un d'autre s'en chargea. 

- Non elle est beaucoup trop lâche pour ça, dit Camozzi avec derrière lui plusieurs hommes de mon escadron qui souriaient tous maladivement. 


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