Chapitre 35

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Le lendemain, revenir à la caserne avait un goût différent. Ce que j'avais fait la veille avait fait connaître mon nom à tous les soldats. D'abord par mon esclandre dans le gymnase puis dans un comité plus restreint par mon baiser avec Camozzi. 

J'avais réussi d'ailleurs à éviter ce dernier depuis la veille. La sensation frémissante que je ressentais à chaque évocation de son nom dans mon bas-ventre m'inquiétais. Elle me poussait à venir le voir et à reposer une nouvelle fois ses lèvres contre les miennes. 

J'ouvrais la grande porte du gymnase et tous ceux présents se retournèrent pour croiser mon regard. J'avançais alors les yeux rivés devant moi, ignorant ceux qui me jugeaient ou qui me regardaient avec admiration. 

Je croisai le regard de Camozzi. Je le détournais, trop gênée face à son regard trop souriant. Son allure avenante pouvait me pousser à faire n'importe quoi. Et dans n'importe quoi, je comprenais également le rejoindre dans son bureau à l'abri des regards. 

Malheureusement, ma conscience trop raisonnable parfois n'avait aucun poids face à mes décisions irréfléchies. Et quelques heures plus tard, je me retrouvais devant la porte du commandant, ne sachant pas trop quoi réellement faire face à mes pas qui m'avaient menés jusqu'ici. 

Un. Deux. Trois. 

Je respirais un grand coup et toqua à la porte. J'entendis un léger "Entrez", prononcé par cette voix grave si particulière. 

Je pénétrais alors dans le bureau du commandant et ce dernier parut surpris de me voir débarquer. Il leva les yeux vers moi, la bouche à peine entre-ouverte. 

- Nina? Euh...

Il toussota, se reprit et répéta d'une voix plus grave.

 - Tibert?

- Je... 

Constatant que je n'avais rien à dire, je réalisais que j'étais venue ici sans idée précise derrière la tête. 

- Je voulais vous voir, affirmai-je tout en m'asseyant sur la chaise face à son bureau. 

Camozzi m'observa alors plus profondément. Je tentai alors d'ignorer ce regard puissant afin d'éviter de répéter le même schéma que la veille. Je levai les yeux et fit mine d'observer les décorations murales du bureau. 

- Ah oui? Pourquoi ça? Me demanda-t-il l'air serein. 

- Pour... Pour mon comportement d'hier. Je ne veux pas que le fait que je vous ai embrassé témoigne d'un manque de respect à votre égard, dis-je avec difficulté en tentant de me légitimer sur ma venue ici.

- Il ne l'est pas, me répondit-il avec un sourire amusé. 

- Me voilà rassurée alors, dis-je en souriant à mon tour;

- Peut-être que nous pourrions commencer par arrêter de se vouvoyer? Proposa Camozzi tout en me testant du regard. 

Je hochais la tête pour faire mine de mon accord. 

- Nous sommes suffisamment proches maintenant...

Je levai les yeux vers lui. Son regard ne changeait pas d'intensité. Je hochais la tête alors une nouvelle fois. 

C'était dingue. Hier, peu de choses m'avaient fait hésiter à l'embrasser. Aujourd'hui, nous étions tous les deux étouffés par la timidité. Sans doute que nous étions tous les deux apeurés par les émotions ressenties hier. 

Il eut un silence de quelques secondes dans lequel aucun de nous détourna le regard de l'autre. Et lorsque Camozzi se leva avec fracas, je l'imitais car nous avions tous les deux compris ce qui m'avait poussé à venir le voir dans ce bureau. Je me rapprochais de lui jusqu'à ce que nos lèvres soient en contact et nous échangeâmes un baiser brûlant. 

Aucune hésitation n'était témoin de notre baiser que nous continuions d'échanger. Camozzi tenait mes joues en main et tentait de se rapprochait malgré le bureau qui nous séparait. 

- Grimpe sur le bureau, m'intima-t-il à bout de souffle. 

Je m'exécutais et escaladais le meuble en bois. Je posais d'abord mes genoux, sans que Camozzi ne cesse de dévorer mes lèvres. Avant de glisser mes jambes entre les siennes et être finalement assise de l'autre côté du bureau, nos lèvres se détachèrent quelques secondes.  Celles-ci se rejoignirent instinctivement une fois bien installée. 

Au bout de quelques instants, nos visages s'écartèrent afin que nous reprenions nos souffles. J'observais Camozzi en souriant et riant à moitié de gêne. 

- Je viens de me rendre compte que je ne connais même pas ton nom. 

- C'est vrai, dit-il amusé.

Je l'observais l'air candide, attendant impatiemment sa réponse.

- Je m'appelle Anton.

- Anton, répétai-je rêveusement. 

Camozzi, enfin plutôt Anton, caressa le haut de mes pommettes. 

- J'aime te l'entendre dire, dit-il avec un air tendre.

Je lui souris en retour et voyant que l'heure tournait, je décidais qu'il était temps pour moi de partir. 

- Il faudrait peut-être que je retourne dans le gymnase, dis-je. Il ne faudrait pas que l'on remarque trop mon absence. 

Anton hocha la tête. 

- Je suis sûr que ton commandant sera clément s'il découvre que tu t'es absentée. 

Je riais tandis que Anton glissa son visage dans mon cou. Il huma un moment puis déposa un léger baiser. Je l'observais en souriant malicieusement. Nos corps étaient encore en contact, nous étions complètement enlacés sur ce bureau en bazar. 

- Viens dîner avec moi ce soir, demanda-t-il les yeux encore rivés sur mes lèvres. 

J'étais surprise par sa proposition et si elle fut certainement visible sur mon visage, Anton ne sembla pas s'en soucier.

 - Pourquoi pas, dis-je en souriant et en me rapprochant plus que je ne l'étais déjà. 

Mon nez frôla le sien mais avant que nos lèvres se fondent dans un nouveau baiser, je reculais et me détacha doucement de l'emprise de ses bras. 

- A ce soir alors, dis-je malicieusement. 

Je lâchai sa main dans une dernière caresse et je me dirigeais vers la porte. Avant de l'ouvrir, je jetais un dernier regard à Anton Camozzi. Ce dernier me regardait avec une chaleur indescriptible. 

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