chapitre 35

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Lou

Aujourd'hui...

Quand cette révélation me frappe, celle qui me dit que, merde, je suis toujours indubitablement amoureuse de Tewis, des larmes roulent sur mes joues. Je les laisse couler, même si je ne sais pas vraiment pourquoi je pleure. Un trop plein d'émotions, sûrement.
Et la peur. Putain, ouais, je suis terrifiée. Comme je vais gérer ça ? Comment on va gérer ça ?
Je soupire et essuie mes larmes d'une main rageuse quand des coups à la portent me sortent de mes réflexions.
– Lou ? T'es là ?
Cette putain de voix, celle qui m'attire comme dans un gouffre sans fond.
Mais là, tout de suite, je ne peux pas lui faire face.
– Écoute, je sais que t'es à l'intérieur. Laisse-moi entrer.
Je ferme les yeux, refusant de le laisser prendre encore plus de place dans ma tête qu'il n'en a déjà.
– Cette nuit était différente, on le sait tout les deux. On doit en parler.
Je me relève d'un bond, ouvre la porte brusquement, et il sursaute. Il ouvre la bouche pour parler, mais je le coupe :
– J'ai besoin d'être seule, je dis d'une voix froide, dénuée d'émotions.
Voyant certainement la panique sur mon visage, il laisse son bras retomber entre nous et, heureusement, parce que je ne sais pas si j'aurais pu supporter qu'il me touche. Je me détourne et pars sans un regard pour lui. Parce que je sais que si je vois l'incompréhension, l'amour et la douleur que je lui inflige dans son regard toujours si intense, je ne pourrais pas partir. Et ce n'est pas une bonne idée, parce qu'à partir de là, je ferais n'importe quoi. Je ne peux pas foirer, cette fois encore.
L'air froid dehors est comme une grande goulée d'air frais, et c'est exactement ce dont j'avais besoin. J'allume le joint qu'il me restait dans ma poche et mon ventre se dénoue instantanément. J'ai l'impression de respirer pour la première fois depuis une éternité.
Un groupe en face de moi me dévisage et je réalise l'allure que j'ai très certainement. Un peu comme ce soir-là, à l'aéroport.
Je secoue la tête.
Il ne faut pas que je pense à ça. Pas maintenant.
Je continue mon chemin, en évitant tout ceux que je pourrais connaître. Je n'ai pas tellement envie de parler, là. Plutôt de m'affaler dans mon canapé pendant des heures pour réfléchir. Mais, le problème, c'est que c'est aussi, en quelque sorte, son canapé à lui.
Merde, je peux pas rentrer à l'appart.

Tewis

Je la regarde s'éloigner à travers la fenêtre de la cuisine, le ventre serré. Putain, c'est insupportable de ne pas savoir ce qu'elle pense.
Qu'est-ce que je donnerais pour pouvoir à nouveaux lire en elle comme dans un livre ouvert. Ne pas savoir ce qu'il se passe dans sa tête me tue.
Mais elle est tellement fermée, c'est frustrant. Et puis, le regard qu'elle m'a lancé, rempli de peur et d'incertitude, c'est à briser le cœur. Je sais que, pour elle aussi, la soirée d'hier a une signification particulière, mais je ne peux pourtant pas m'empêcher d'avoir l'impression que si je la laisse partir, elle ne reviendra jamais. Mais je ne bouge pas. Je reste simplement là, à la fixer jusqu'à ce qu'elle disparaisse.
Quelqu'un me touche soudainement et je sursaute avant de la plaquer contre le mur derrière.
– Eh ! Tout doux.
Je fixe Maggie qui lève des mains innocentes. Je recule en marmonnant une excuse. Ses yeux passent de la fenêtre à mon visage et elle déclare :
– Elle a besoin de temps, c'est tout.
Je hausse les épaules et soupire.
– Peut-être que je l'ai juste trop blessée.
Elle sourit tendrement, attrape un verre derrière moi, et répond :
– Crois-moi, elle reviendra.
Elle disparaît comme elle est apparu, en coup de vent, et je n'ai pas le temps de lui demander pourquoi elle est si sûre de ce qu'elle annonce.
Dans un soupir, je pars à la recherche de Lilou, que j'ai abandonné hier. Après plusieurs tours dans la maison, je la trouve dans une chambre ouverte, en culotte et dans un t-shirt qui ne lui appartient pas.
– Lilou ?
J'entre en donnant un coup sur la porte et quand elle se retourne, je ne sais pas quelle émotion domine sur son visage : la gêne, la douleur ou le défi que je vois dans ses yeux.
– Salut.
Elle tire sur "son" t-shirt et se balance d'un pied sur l'autre.
– Désolé de t'avoir laissé hier.
Elle a un rire sarcastique.
– T'en fais pas. T'étais en bonne compagnie, non ?
Je vois bien que le fait que j'ai passé la nuit avec Lou la blesse.
– De ce que je peux deviner, toi aussi.
Elle lève les yeux au ciel et je regrette immédiatement cette dernière remarque. Je ne sais pas pourquoi, mais je sens que j'ai une part de responsabilité dans tout ça.
– Tu peux sortir ? J'aimerais me rhabiller.
J'ai du mal à comprendre son ton cassant, mais je hoche la tête et recule en la détaillant. Merde, ce n'est pas son genre de coucher avec quelqu'un qu'elle ne connaît pas comme ça. Et j'ai peur d'y être pour quelque chose.
Elle referme la porte dans mon dos et je m'adosse au mur d'en face en attendant qu'elle ressorte. Ce qu'elle fait très vite, en me demandant :
– Où est Lou ?
– Elle ne rentre pas avec nous, je marmonne.
Je me décolle du mur et commence à partir mais Lilou me retient.
– Désolée. J'ai conscience de me comporter comme une connasse, là.
Les yeux plongés dans ses prunelles brunes, j'essaie de deviner ce qu'elle ne veut pas me dire.
– Je croyais avoir dépassé, elle fait un grand geste de la main, tout ça.
– C'est-à-dire ? Je demande.
– Euh, promets-moi que ce ne sera pas bizarre.
Je hausse les épaules, et enfonce mes mains dans mes poches, espérant qu'elle n'essaie pas de me dire ce que je crois.
– Ça m'enrage, de te voir avec Lou. Je ne crois pas que je suis, genre...amoureuse, de toi. Mais, depuis que je t'ai embrassé...
Elle secoue la tête et me fais signe de laissé tomber.
– Mais j'ai compris. On est simplement amis. Et puis, faudrait être aveugle et sourd pour ne pas remarquer ce qu'il se passe entre Lou et toi.
Elle sourit, l'air de s'être débarrassé d'un poids. J'en suis ravi, parce que je ne sais pas comment j'aurais géré la situation si elle m'avait dit qu'elle voulait être avec moi, comme...dans un couple.
Elle m'enlace et je lui rends son étreinte, content qu'on soit tout les deux au clair sur nos sentiments.
Lilou m'attrape le bras, et on rentre à l'appart. Je sais qu'elle a besoin d'être seule, mais j'espère malgré tout que Lou y sera aussi.
Alors, lorsque j'ouvre la porte, mon cœur manque de briser ma cage thoracique. J'ai envie que Lou soit là, mais en même temps, je ne sais pas quoi lui dire, ou dans quel état d'esprit elle va être.
Mais, seul le silence me répond quand je crie son nom.
Lilou s'avance à mes côtés et demande :
– Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
Je secoue la tête.
– Je ne saurais pas l'expliquer. Et de toute façon, je ne sais jamais ce qu'il se passe dans sa tête. Mais j'ai le sentiment qu'on ne va pas la revoir tout de suite.
Mon amie grimace.
– C'est un peu bizarre, de squatter chez elle, alors qu'elle n'est pas là, non ?
Je hausse les épaules.
– Si ça la dérangeait, elle nous l'aurait dit.
Lilou rit.
– T'as raison.
On s'installe sur le canapé, pour nous remettre de notre presque gueule de bois, et Lilou s'endort très vite. Les heures passent, mais Lou ne rentre pas. Je reste éveillé jusqu'à tard dans la nuit, jusqu'à ce que le sommeil m'emporte, moi aussi. Jusqu'à ce que l'espoir de la voir passer la porte meurt.
Le lendemain, je laisse Lilou faire la grasse matinée, et rejoins Antoine près de chez lui. On marche doucement et très vite, je lui parle de ce qu'il s'est passé à la soirée. Nous vient alors un plan digne d'une meuf désespérée, mais je m'en fous. Tant que je peux la revoir.
– Bon, c'est bon j'ai envoyé les messages. On dit quelle heure ?
Je réfléchis quelques secondes.
– Hum, après 14h. Je dois amener Lilou à la gare à 12h.
– Parfait.
Soudain, une idée me vient. Ça fait beaucoup trop longtemps que je n'ai pas vu Steeve.
– Et si on passait chez Steeve ? Il n'habite pas loin.
Antoine fait la grimace et je joins mes mains dans une sorte de supplice.
– Steu plaiiit ?
Il soupire et accepte en marmonnant qu'il ne veut pas être mêlé à tout ce qui concerne la drogue. Je lui réponds que j'ai assez donné, et on prend la direction de l'appart de Steeve.

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