chapitre 16

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Tewis

J'adore ce moment juste avant de se réveiller. Quand on est encore un peu dans le brouillard mais qu'on prend peu à peu conscience de la réalité. Qu'on est encore à moitié dans nos rêves. Mais ce matin, c'est différent.
Déjà, j'ai super mal au crâne.
Mais en plus, mon corps est plus chaud et un parfum boisé me rempli les narines. Et quelque chose me chatouille le menton. Des cheveux ?
Oui, il y a bien une tête nichée dans le creux de mon cou, avec ses cheveux étalés sur moi. Et un bras fin autour de ma taille. Une jambe sur ma cuisse, et un sein contre mon pec. J'ouvre lentement les yeux et découvre que Lou est blottie contre moi. J'avais oublié un instant qu'on avait passé la nuit ensemble.
Elle s'est endormie à l'autre bout du lit et maintenant, je la tiens dans mes bras. Pire, je la serre contre moi, tellement que mon bras est engourdi.
Est-ce qu'on dort comme ça depuis longtemps ? Je croyais retrouver Lou par terre, ce matin, tellement elle voulait se tenir loin de moi hier soir. Mais, finalement, elle est carrément sur moi. Et c'est...agréable.
J'émerge un peu plus et...c'est agréable ? Mais à quoi je pense, putain ? Les câlins, c'est pour les petites amies, et cette fille n'est absolument pas la mienne.
Je suis maintenant parfaitement réveillé, mais je ne peux pas m'empêcher de tenir Lou contre moi. J'attrape mon téléphone toujours dans mon jean et regarde l'heure. 9h.
On a pas beaucoup dormi, et, malgré mon mal de tête, je me sens étonnamment en forme, et en paix. Je n'ai pas envie de retourner dans la réalité, alors je reste là, allongé avec Lou dans mes bras, écoutant son souffle lent. Je ferme les yeux et savoure la chaleur de sa respiration dans mon cou.
– Tu bandes ?
La voix horrifiée de Lou rompt soudainement ma tranquillité.
Elle se redresse brusquement et dégage sa jambe des miennes.
Et oui, j'ai bien une érection.
– Eh, détend toi, je réponds d'un voix rauque et endormie. C'est juste une gaule matinale.
– Mon dieu, tu es...
– Quoi ? Masculin ? Oui, merci je sais. Et je te rappelle que c'est ce qui arrive à tous les hommes le matin. C'est biologique, ma chérie. Mais si ça peut te rassurer, je ne suis pas excité.
– Ok...et tu peux aussi me dire pourquoi tu as décidé de me faire un câlin pendant la nuit ?
– Je te signale que je dormais et à ce que je vois, c'est toi qui étais collée à moi.
– Je ne ferais jamais ça. Même en dormant.
Elle sort brusquement du lit et dès ce moment, je me sens vide. Je ne suis plus au chaud.
C'est quoi cette connerie encore ?
Je m'assois, m'étire, et ses yeux se posent sur mon torse. Et, croyez-le ou non, elle grimace.
– Fais pas cette tête. Les femmes semblent beaucoup aimer mon torse, je te ferais remarquer.
– Et bien, je ne suis pas les autres femmes.
C'est vrai. Personne ne me fait sentir comme elle le fait. Je ne me prend pas la tête comme ça pour les autres.
– Bon. Il faut que j'y aille.
Elle ramasse son sac par terre et me lance un dernier regard.
– Ce qui s'est passé reste ici.
Elle part sans attendre ma réponse mais je lui dis quand même avant qu'elle ne passe la porte :
– Tu sais, ça pourrait booster ta popularité si tu disais que tu as dormi avec moi.
Elle s'arrête et, sans se retourner, lâche :
– Jamais de la vie.
J'explose de rire tandis qu'elle s'en va, semblant fuir quelque chose. Enfin, quelqu'un, apparemment.
Je souffle et me rallonge dans le lit. Je ne fais pas ce genre de chose d'habitude. Dormir avec des filles.
Juste dormir.
Surtout avec une fille que...j'apprécie ?
Ouais, je crois que je l'apprécie putain. Peut-être même plus que....non.
N'exagérons rien. Je l'aime bien, voilà. Je sais pas pourquoi, mais c'est comme ça, et c'est pas seulement parce qu'elle est bonne.
Mais, n'empêche, j'aurais pas dû faire tout ça hier soir. J'ai perdu le contrôle et dormir à ses côtés a été très agréable mais...putain, non, plus jamais. Je ne peux pas la laisser avoir un quelconque pouvoir sur moi.

Lou

Le sur-lendemain, je vais en cours, comme d'habitude.
Sauf que, cette fois, j'ai en tête la nuit passée avec Tewis. Et que, quand j'arrive devant le portail du lycée, Tessa me saute littéralement dessus.
Depuis que je lui ai envoyé un message samedi soir pour lui dire que je dormais sur place, elle s'est mis en tête que j'avais passée la nuit avec un mec et que je n'étais plus vierge. Et, même si je lui ai promis de tout lui raconter aujourd'hui de vive voix, elle m'a harcelée toute la soirée hier pour savoir ce qui c'était passé, et avec qui.
Il faut déjà que je la mette au courant du "rendez-vous" qu'on a eu samedi...
– Alors ? Ma petite Lou est enfin devenue une femme ! S'écrit-elle dès que je me suis approché.
Je regarde autour de moi, gênée.
– Pas si fort, Tessa !
– Oups...désolée, elle se met à chuchoter, alors, t'as trouvé ça comment ?
– Tessa calme-toi, ok ? Je suis toujours vierge.
Elle se recule, déçue.
– Oh.
– Oui. Et j'ai quelque chose à te dire avant qu'on parle de la soirée.
– Oui, vas-y.
Elle trépigne presque d'impatience, mais moi, je redoute sa réaction.
– Et bien, enfaite, samedi j'ai eu...un rendez-vous en quelque sorte, avec...
– Attend ! Me dis pas que TOI, tu as rencontré quelqu'un et dormi avec lui à une soirée ?
C'était presque ça, finalement. Et vu sous cet angle, ça me parait un peu précipité et...enfin j'ai fait une connerie, ça je le sais depuis la seconde où j'ai posé mes fesses sur le même lit que Tewis.
– Hum...pas exactement. C'est plutôt que...
– Alors quoi ? Accouche !
– Je le pourrais si tu arrêtais de me couper ! Je cris.
Elle baisse les yeux et ma lance un sourire gênée.
– Oui, désolée, Lou.
Je reprends mon calme pour lui expliquer la situation correctement. Mais avant ça, je nous dirige vers le muret, pour qu'on puisse s'asseoir.
– Bon...tu te souviens, vendredi, je suis allée boire un café en ville avec Antoine ?
– Oui, d'ailleurs, fallait qu'on reparle de son meilleur ami qui t'avais soûlée.
– Ouais, et bah, y'a un truc que je t'ai pas dit à propos de cette sortie. J'ai passé un deal avec Tewis, le meilleur ami. Un rendez-vous avec lui, et il me laissait tranquille. J'ai accepté, et on s'est vu le lendemain.
– Attend, le Tewis d'Antoine ? Celui que tu ne peux pas supporter ?
– Oui, celui-là même, je réponds en levant les yeux au ciel. Je sais, moi aussi je trouve ça complètement dingue.
– Mais...oh non, mon Dieu, je crois comprendre où tu veux en venir. Continue.
Je lui raconte donc mon après midi avec Tewis dans les moindres détails. Je lui parle même du baiser, et de ce que j'ai ressentis.
Des choses que je ne devrais pas ressentir pour ce mec.
Et même si j'avais peur de sa réaction au début, elle est là à m'écouter, comme toujours.
Je ne m'étais pas rendu compte que j'en avais besoin, mais ça me fait tellement de bien de lui parler. Ma boule au ventre se desserre, apaisée par la présence de ma meilleure amie.
Je lui parle ensuite de notre rencontre à la soirée, et de comment on a finit dans le même lit.
– ...alors voilà, je sais que ça peut paraître fou mais, mon dieu, ce mec déclenche des choses en moi que je n'avais jamais ressentis. Et ça fait tellement peu de temps qu'on se connaît !
– Wouah Lou c'est...enfin, tu le détestais y'a encore deux jours.
– Je sais, je sais. Mais tu sais, il est différent quand on est ensemble.
J'échange un regard avec Tessa et on explose de rire.
– Bordel, je lance entre deux éclats de rire, depuis quand je sors des trucs aussi clichés, moi ?
Je relève les yeux et tente de me calmer, quand je l'aperçois.
– Depuis que...
Mon rire s'arrête net, mes yeux fixés sur l'objet de mes tourments. Tessa s'arrête de parler elle aussi, et regarde dans la même direction que moi, pour voir ce qui me préoccupe.
Quand elle le voit, elle lâche :
– Oh mon dieu, ma chérie, tu es perdue.
Je ne réponds pas, trop concentrée dans ma contemplation. C'est impossible d'être beau à ce point, franchement.
Aujourd'hui, comme à chaque fois que je l'ai vu, il porte un t-shirt simple et un jean. Noir cette fois. Tout simplement basique.
Et pourtant, dans cet accoutrement, il est incroyablement sexy. Il porte des lunettes de soleils dans ses cheveux humides et, les mains dans les poches, il avance nonchalamment vers l'entrée du lycée. Ce mec est un cliché à lui tout seul. C'est limite si toutes les filles ne se retourne pas sur son passage. Enfin, c'est peut-être le cas finalement...
En plus, c'est tellement pas mon type de mec. Au contraire, d'habitude c'est ceux que je déteste parce qu'il sont imbu de leur personne. C'était son cas, d'ailleurs, avant qu'Antoine ne me le présente.
Normalement, je n'aurais pas remarqué son arrivée. Et je ne me serais pas laissé impressionner par son...je sais pas, lui quoi. Bordel, ce mec ne cessera pas de m'étonner. Et de me faire frissonner.
– Fais gaffe, t'as de la bave qui coule.
Je sursaute en sortant de mes pensées et m'essuie machinalement le menton.
Ma meilleure amie explose de rire devant mon geste inutile.
– Très drôle. Bon, aller, viens, on y va, avant qu'il arrive.
Je me dirige vers la salle de chinois pendant que Tessa va à la salle de spectacle. Ça fait des années qu'elle fait du théâtre et elle a choisi de le prendre en option cette année. Moi, j'ai toujours détesté ça, mais j'adore aller la voir quand elle joue. Elle est impressionnante et le pire, c'est qu'elle ne le sait même pas.
– À toute, Lou !
Elle s'éloigne encore et je me dis que j'ai énormément de chance de l'avoir dans ma vie. On s'est rencontré en 5ème et depuis, on ne s'est pas lâché. C'est une fille extraordinaire.
– Tu vas être en retard, si tu restes plantée là, chuchote une voix dans mon oreille.
Je sursaute pour la deuxième fois de la matinée et me retourne vers cette voix si familière et pourtant inconnue. Et lorsque je suis complètement tournée, mes yeux plongent dans les siens et mes lèvres se retrouvent à quelques centimètres seulement des siennes.
Je retiens mon souffle et mon cœur bat à la chamade dans ma poitrine. C'est impossible. Comment est-ce qu'il fait pour avoir autant d'emprise sur moi ?
Je trouve quand même la force, je ne sais pas où, de m'éloigner.
– Oh, Tewis...salut.
– Salut.
Sa voix grave résonne dans mes oreilles et son odeur me ferait presque perdre l'esprit.
J'ai l'impression de perdre mes moyens pendant qu'il est là, tellement calme et souriant.
Bon sang, Lou, reprends toi !
– Euh...faut que j'y aille ou je vais vraiment être en retard. Bye.
Je pars en courant en le plantant là.
Mais, bien évidement, cet acharné me rattrape, quelques mètres plus loin.
– Attends !
Je me tourne vers lui, essoufflée.
– Quoi ?
– Quitte à ce qu'on soit en retard, tu voudrais pas...hum,il se passe la main dans les cheveux, tout à coup moins sûr de lui, suis moi.
Il m'attrape le poignet et je grogne que je dois aller en cours mais, sans essayer de me détacher de lui. Encore ce foutu pouvoir qu'il semble exercer sur moi.
Il nous conduit jusqu'aux toilettes mixtes et referme derrière nous.
Maintenant, je me demande sérieusement quelles sont ses intentions.
Et si...
Oh.Mon.Dieu.
Est-ce réellement ses lèvres sur les miennes ?
Je baisse les yeux, et, mon esprit ne me joue pas des tours, ce type est bien en train de m'embrasser. Enfin, un type sacrément beau et qui embrasse sacrément bien.
Sa langue glisse doucement entre mes lèvres et caresse la mienne avec douceur et je me surprends à apprécier ce baiser...et même à y répondre.
Nous voilà donc à nous embrasser comme si nos vies en dépendaient, adossés à la porte des toilettes, nos souffles se mêlant de plus en plus vite.
À ce moment, je ne contrôle plus rien. Et quand il me murmure combien il a envie de moi et que sa main se glisse dans ma culotte, non plus.
J'agrippe ses cheveux tandis que sa bouche descend le long de ma gorge et qu'il glisse un doigt en moi.
Mon dieu...
J'ai l'impression d'être possédée par quelque chose d'inconnu. Son toucher m'enivre à un point inimaginable. Alors quand il me touche, je ne pense à rien d'autre.
Je me plaque contre la porte et les sensations explosent en moi à son contact. Plus rien n'existe autour de nous.
Il n'y a plus que lui et les sensations qu'il me donne. C'est comme si nous étions dans une bulle et que rien ni personne ne pouvait nous atteindre. Je n'avais jamais ressenti ça.
Sa deuxième main se retrouve soudainement sur mon sein et tandis que l'autre la rejoint pour dégrafer mon chemisier, je pousse un grognement plaintif, presque désespéré.
J'en profite cependant pour faire ce que je n'aurais jamais fais normalement, déboutonner son pantalon.
Mais, plus rien ne m'arrête et je n'essaie plus de lutter contre ce qui me paraît maintenant comme une évidence. Nous, réunis.
Sauf qu'au moment où ma main descend lentement sa braguette, laissant apercevoir son érection proéminente, quelqu'un essaie d'ouvrir la porte derrière nous.
Au début, je n'y fais pas trop attention, mais quand cette même personne toque à la porte et cris :
– Je sais pas qui s'amuse à bloquer la porte mais laissez-moi entrer, putain !
Là, je reviens à la réalité. À ses mains sur moi. À nos vêtements défaits, et à tout ce qui vient de se passer.
– Mon dieu...je murmure.
Je me recoiffe en vitesse, reboutonne mon haut et m'écarte au plus vite de la porte, entraînant Tewis avec moi.
Quand elle s'ouvre, je passe devant le mec qui entre et part en courant, laissant Tewis derrière moi.
Je ne me retourne pas, même si j'en ai furieusement envie, et cours jusqu'à ma salle, dans laquelle j'entre, à bout de souffle.
– Mademoiselle Lou, on ne vous attendait plus.
– Excusez-moi monsieur Morly.
– Allez vous asseoir.
Je vais tranquillement m'asseoir, toutes sortes d'émotions me chamboulant. Je n'en reviens pas d'avoir fait ça, moi qui n'avais jamais roulé une pelle à quelqu'un. Et dans les toilettes du lycée, bordel. Avec lui, en plus.
Bordel de merde, je n'en reviens pas.
Il ne peut plus faire ça.
Les souvenirs mettent ma concentration à rude épreuve, mais je finis par prendre la décision de les bannir de mon esprit. Ainsi que de bannir Tewis, je ne vois d'ailleurs déjà plus qui c'est, de ma vie.
À partir de maintenant, ce sera comme si je ne l'avais jamais rencontré, comme s'il n'avait jamais existé. Et c'est bien mieux comme ça. Enfin, c'est ce dont j'essaie de me convaincre.

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