chapitre 14

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Lou

Réveille-toi, réveille-toi.

Ces deux mots résonnent dans ma tête, encore et encore, tandis que ma mère devient de plus en plus floue. J'essaie de tendre la main, de la toucher, de la retenir, mais mon corps refuse de m'obéir. Tout est en train de disparaître et mon monde avec. Celui que j'ai toujours connu, celui où ma mère est...en vie.
Oui. C'est ça.
J'expire et pour ce que j'ai l'impression d'être la centième fois, tout deviens noir.
Bip.Bip.Bip.

Je me réveille en sursaut dans une chambre entièrement blanche. Je n'ai aucune idée de ce que je fais là ni d'où je suis.
Lorsque tout deviens plus clair et que je reprends mes esprits, je comprends que je suis à l'hôpital.
Des tuyaux sortent de tout mon corps, ou presque, et une machine à côté du lit fait un bruit monstre. Un bruit incessant et insupportable.
Bip.Bip.Bip.
Le même bruit que j'ai entendu toute la journée. Mais qu'est-ce qui m'est arrivé pour que je finisse ici ?
Oh mon dieu. Ma mère. Elle était là et...
– Maman, j'entends murmurer.
Je regarde autour de moi mais personne n'est là, et il me faut quelques minutes de plus pour me rendre compte que c'est moi qui ai parlé. Ma voix...je touche ma gorge mais tout me semble normal.
Alors qu'est-ce qui m'arrive, bordel ? Et pourquoi ma mère n'est pas là ?
Je commence à paniquer et tente de me redresser, mais mon corps refuse d'obéir.
J'ai mal partout et...ma tête putain, ça fait un mal de chien.
Je la repose doucement sur l'oreiller. Pourquoi j'ai si mal ? Et la chambre qui commence à devenir floue et à dangereusement tourner...
C'est pas vrai, ne me dites pas que je vais encore m'évanouir.
– A l'aide, je murmure, je vais m'évanouir.
J'essaie de crier, mais ma voix reste basse. Trop basse pour que quelqu'un m'entende.
Soudain, la porte s'ouvre et quelqu'un murmure :
– Merci d'avoir été là.
Je n'entends pas de réponse, alors je suppose que cette personne est au téléphone. Elle n'entre pas et reste dans l'encadrure de la porte. J'essaie de voir qui c'est, mais ça m'est impossible.
– Oui et non. Les médecins disent qu'elle va mieux, mais je ne vois aucun changement. Pour moi, elle est toujours dans le coma et c'est tout.
Cette voix...C'est...C'est...
Putain de merde, je l'ai sur le bout de la langue.
T quelque chose.
T entre dans la chambre et s'approche de mon lit, toujours au téléphone.
Lorsque son regard se pose sur moi, sa main retombe lentement près de sa jambe.
Sa bouche s'ouvre en grand et il me fixe avec des yeux de merlan frit comme s'il ne s'attendait pas à me voir. Pourtant, s'il est venu ici, c'était pour me voir. Sinon pourquoi ?
Il cligne plusieurs fois des yeux tout en me fixant avant de porter son téléphone à son oreille.
– Je dois te laisser, murmure-t-il d'une voix blanche.
Et il raccroche.
Tewis, je suis sûre que c'est ça.
Il s'approche de moi, l'air toujours choqué mais heureux, en attente de ma réaction.
Ses yeux brillent de bonheur...ou de tristesse.
Et qu'est-ce que je suis supposé dire, moi ?
– Oh mon dieu, Lou...
Ses yeux se remplissent de larmes et cette fois, je suis sûre que c'est de bonheur.
Il s'approche encore et prends doucement ma main, que je retire comme s'il m'avait brûlé, sans vraiment savoir pourquoi.
Je relève les yeux vers lui, perturbée, et son visage trahi maintenant sa douleur.
– Désolée, hum, Tewis ? C'est ça ?
Ma voix est encore faible, mais c'est de mieux en mieux.
– Q...quoi ? Tu...tu ne te souviens pas de moi ?
Je baisse les yeux, gênée.
– Euh non, pas vraiment.
– Je...
Il secoue la tête et reprend :
– Ok, c'est pas grave.
Il me regarde avec tendresse, mais je vois bien qu'il est blessé. Je ne sais pas quoi faire pour changer ça. Ni si j'en ai envie.
– Tout ce qui compte, c'est que tu sois réveillée, reprend-il.
Il me sourit avec chaleur, et j'essaie de lui rendre son sourire, mais mon visage reste coincé.
Je ne sais vraiment pas pourquoi mon corps se bloque avec lui. Son regard reste sur moi, comme si j'allais disparaître.
À nouveau.
– Je...euh, je ferais mieux de prévenir les médecins que tu es réveillée.
Bonne idée.
Il se retourne et commence à partir mais quelque chose me revient soudainement en tête.
– Attends !
Bon, je n'ai pas crié, mais c'était pas si terrible.
– Oui ?
Il se retourne vers moi, souriant, et, pour la première fois depuis qu'il est entré, je remarque à quel point il est beau.
Tellement sexy.
Ses cheveux noirs légèrement ondulés lui tombent sur le front, ses yeux vert émeraude sont posés sur moi et, sa mâchoire nom de dieu. Carrée, mise en valeur par sa légère barbe, elle ne demande qu'à être embrassée, et je ne parle même pas de ses lèvres.
– Lou ?
Oula, je divague.
– Oui, désolée. Euh, ma mère. Elle est où ?
Et revoilà que son expression change.
Il fronce les sourcils, l'air perdu. Comme s'il ne comprenait pas ce que je disais.
– Ma mère, elle est où ? Je répète.
L'incompréhension empli son visage, et même là il est beau, bordel.
– Lou je...enfin, comment dire, il prend une grande inspiration, ça fait des mois qu'elle est morte, Lou.
À mon tour de ne pas comprendre.
– Quoi ?!
Cette fois, j'ai crié.
Tewis me regarde, ne sachant pas quoi dire et, ce con me lance :
– Écoutes, avec le coma tu ne dois pas te souvenir, mais c'est la vérité. Et moi, je suis ton ex.
C'est là que tout me revient. Tewis qui part. Antoine et Tessa qui brisent notre amitié. Ma mère qui succombe à sa maladie. Paul. Anto. La fête. Ma chute.
C'est ça, ma vraie vie.
Bien sûr. Tout le reste n'étais qu'un rêve, comment aurait-il pu en être autrement, hein ?
– Mon dieu...alors toute cette histoire avec ma mère, mon père, Tessa même, c'est...c'était faux bordel de merde ?
– Je crois bien oui...Ça fait 3 semaines que t'es dans le coma.
3 semaines !
C'est pas possible, putain. Je passe mes mains sur mon visage et regarde vers Tewis. Ce connard.
– Et toi, connard, c'est que maintenant que tu me le dis ? Qu'est-ce que tu fous là, façon ?
– Je...Lou je t'aime tellement et...j'ai eu si peur quand t'es tombée je...
– Ah, parce que tu m'aimes maintenant ? Tu disais pas ça quand t'es parti.
– Oui, je sais mais, écoute-moi, je t'aime plus que tout ok ? Et je voudrais juste qu'on...
Trop c'est trop. J'arrête de l'écouter et essaie de garder mon calme.
– Sors, je murmure.
– Lou, s'il te plaît...
– Sors !
Je relève la tête et c'est en croisant son regard plein de larmes que je prends conscience des miennes qui dévalent sur mon visage.
Avant, je l'aurai laissé me prendre dans ses bras. Me consoler et me dire que tout irait bien. Embrasser et effacer une à une mes larmes. Mais maintenant, ce n'est plus le cas. Je n'ai plus besoin de lui.
– Lou...
Plus comme avant.
– Je t'en prie...
Je le regarde à travers mes larmes, soudain moins en colère. En l'honneur de notre amour. De notre histoire. Pour cela, je ne crie pas.
– S'il te plaît, Tewis, s'il te plaît, pars.
Il me lance un dernier regard plein de peine et tandis que je détourne les yeux, il s'en va, tête baissée. Et mon dieu, ce qu'il est beau.
La porte claque doucement derrière lui, résonnant dans le silence de la pièce.
Mis à part les bip, c'est le silence total dans ma chambre. Et c'est pire.
Je préfère sa compagnie à ce silence oppressant. Putain, j'en reviens pas de dire ça.

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