chapitre 23

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Tewis

Quand le dos de Lou disparaît de ma vue, je m'affaisse sur mon lit.
J'ai encore abusé. Il faut toujours que je gâche tout avec cette fille. Et puis, elle a raison, elle n'est pas un objet. Mais...la toucher comme ça, ça me donne envie de...enfin, que personne d'autre que moi ne la touche de cette manière. Ou d'une quelconque autre façon d'ailleurs. Parce qu'elle m'...
Et voilà que je recommence. Il faut vraiment que je calme mes pulsions possessives. Parce que si ça lui plaisait avant, c'est clairement plus le cas. Elle a besoin de sa liberté. Ce qui semble logique, d'ailleurs.
Je me retourne et grogne dans mon oreiller. Je ne sais pas comment m'en sortir avec elle. C'est si compliqué maintenant.
Sérieux ! Son cœur est une vraie forteresse. Et pourtant, j'y ais déjà une place particulière. Qu'est-ce que ce serait si je n'étais qu'un mec quelconque ?
La porte d'entrée claque d'un coup et je sursaute.
Merde. Il faut que je me rhabille avant que ma mère arrive.
Je saute donc de mon lit et enfile mes affaires au plus vite. Je suis encore en train de sautiller dans mon jean quand elle toque discrètement à la porte.
– Ouais, entre.
Elle pousse la porte et entre à petits pas, les yeux fixé au sol. Ça me brise le cœur de la voir comme ça. Comme si j'allais la briser à tout moment. C'est tellement triste.
Je lui souris donc sans joie et lui fais signe de s'asseoir à côté de moi sur le lit. Elle s'y installe sans dire un mot et j'attends quelques instants qu'elle soit prête à parler, mais comme elle ne dit rien, j'engage la conversation :
– Tu voulais me dire quelque chose ?
Elle hoche la tête mais n'ajoute rien. C'est hyper perturbant. J'ai l'impression de faire face un mur.
– Maman ?
– Tu sais, entre ce qu'il s'est passé avec ta sœur, et l'histoire avec la mère de Lou, je sais que je devrais haïr ton père. Mais j'en suis incapable. Et je suis désolée si tu en souffres. Mais on ne déménage pas.
Rien de surprenant pour l'instant, rien non plus qui explique son attitude. Je la laisse donc continuer, mais elle n'en a pas le temps, puisque quelqu'un entre dans ma piaule en se grattant la gorge. Devinez qui !
À la seconde où mes yeux se posent sur ce déchet, je saute sur mes jambes, prêt à me jeter sur lui. Mais ma mère est aussi réactive et elle se place entre nous, les mains à plat sur mon torse et les yeux suppliants.
C'est donc ça qu'elle avait. Son petit corps reste devant moi, donc, à la place de le cogner, je hurle.
– Dégage !
Mon salaud de père ne répond rien et ne fait pas un geste, ce qui m'énerve encore plus. Je serre les poings et expire le plus longtemps possible. Il faut que je me calme avant que ma mère assiste à l'étendue de ma colère.
– Au contraire, continue cette dernière comme si de rien n'était, ton père revient à la maison.
Elle sourit doucement et continue à me parler, mais je n'entends plus rien. J'entre dans une sorte de phase qui me laisse pétrifié sur place, jusqu'à ce que Katie pose sa main sur mon visage. Je plante mes yeux pleins de rage dans les siens et la repousse violemment.
– Tu me dégoûtes.
Je sors en donnant un coup de poings dans le mur. Ça aura probablement laissé un trou, mais je m'en contre-fiche. J'ai besoin d'exprimer ma rage. Et de ne plus jamais remettre un pied dans cette maison maudite.
J'entends mes parents m'appeler, mais je continue mon chemin et file droit vers ma voiture. Je dois partir le plus loin possible d'ici. Bordel, j'aurai dû rester à Bordeaux depuis le début. Rien ne va comme je le voudrais, ici.
Je monte dans ma voiture, toujours pleins de rage, et démarre. Je roule pendant des heures, sans savoir où je vais. Et puis, en fin de journée, je m'arrête sur un parking pour faire une pause. J'ai besoin de dormir.
À peine garé, je ferme les yeux et tombe dans un sommeil profond. Et si j'avais su, je ne me serais jamais endormi, pour ne pas avoir à revivre mon pire cauchemar.

Quand j'entre dans la chambre de ma sœur, elle est allongée sur son lit, ses cheveux étalés autour d'elle. Elle semble si petite, si fragile. Même si je n'ai pas encore des muscles comme mon papa, je pourrais me battre pour elle. Lili semble agitée et elle gémit, alors je m'approche d'elle et lui caresse les cheveux pour qu'elle sache que je suis là. Mais son corps est bouillant, et sa respiration saccadée. Je sens que quelque chose ne va pas, mais je ne sais pas quoi. Alors, je cours chercher mon père.
– Papa ! Papa !
Quand je le trouve, il est dans la cuisine en train de préparer le repas du soir. Il se retourne vers moi, les yeux tirés. J'ai remarqué que ces derniers temps, il était toujours fatigué. Ses yeux sont tout le temps rouge et soulignés de cernes. Je crois que lui aussi, il ne va pas bien.
– Lili s'est pire, j'annonce.
Il ne comprend pas ce que je dis, et je me rends compte que j'ai encore parlé comme s'il pouvait lire dans mes pensées.
– Euh, c'est Lili. Elle ne se sent pas bien.
Il laisse ses légumes et me suis dans le couloir, l'air inquiet. Quand il touche son front brûlant, je vois l'inquiétude se peindre sur son visage. Lui aussi ne sait pas ce qu'elle a. Pourtant, il devrait. Je sautille sur place.
– Il faut que tu la soignes.
Il ne se retourne même pas vers moi et prend Lili dans ses bras.
– On va aux urgences. Ce n'est pas normal qu'elle ne se réveille pas.
Je le suis en trottinant et il m'ordonne de rester à la maison en attendant le retour de maman.
– Mais je veux...
– Il n'y a pas de mais qui tienne. File !
Son ton et son regard sont durs. Mon père ne m'avait jamais fait peur, mais là, j'ai trop peur pour répliquer.
Ensuite, tout est flou.
Je me souviens seulement m'être beaucoup inquiété les jours suivants, avoir beaucoup pleuré et dormi chez ma grand-mère. Et puis, un soir, ma mère est revenue me chercher et m'a fait asseoir dans la cuisine.

Lili ne reviendra pas, a-t-elle annoncé, les larmes aux yeux.
– Pourquoi ?
Ma voix était dure et pleine de colère. Il devait la sauver...
– C'est des soucis d'adultes, mon chéri.
– Elle est morte ?
Ma mère a fondu en larmes et ne ma jamais répondu. Mais j'ai compris tout seul pourquoi elle ne reviendrait pas quand j'ai entendu une dispute entre mes parents. Je n'ai pas tout saisis au début, mais tonton m'a expliqué. Mon père avait tué ma sœur. Il consommait des drogues. Notamment de la coke, qu'il lui avait transmit mois après mois à travers sa nourriture. C'était souvent lui qui préparait à manger. Et, quand maman n'était pas là, il lui donnait son goûter. Elle n'y a pas survécu, elle était trop jeune et trop faible. Donc, à 3 ans, elle est morte d'une overdose.
Après ça, mon père ne s'est plus jamais caché pour boire ou fumer. Et moi, je n'ai jamais su pourquoi je n'avais rien eu et pourquoi elle, elle était morte. Tout ce que je s
avais, c'était que mon père était un monstre et que je le détestais du plus profond de mon cœur.

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