ZOÉ n'a jamais particulièrement aimé les cours. Mais ce qu'elle déteste par dessus tout, c'est la directrice. Cette dictatrice sans cœur qui affectionne particulièrement le respect du règlement. Ramenant derrière son oreille une mèche d'un rouge sombre, elle attend le signal pour s'élancer à la suite de son amie. Elle parcourt les quelques mètres à la vitesse de l'éclair, passant devant le bureau du gardien, probablement endormi. La précédant de quelques pas, Cloé lui adresse un regard à la dérobée, qui fait bondir son cœur un peu plus fort et vite. Elle la rejoint d'une foulée rapide et c'est main dans la main qu'elles parviennent devant la salle de repos des surveillants.
Elle sort de la poche de son sweat une bombe rouge, pendant que son amie commence à tracer de grands traits noirs sur la porte. Elle rapproche une chaise, grimpe dessus, et graphe consciencieusement les mots. La semaine dernière, leur amie commune, la troisième membre du trio, s'est finalement fait renvoyée. Après être restée trois ans sur la pente raide, la harpie leur tenant lieu de directrice a décidé de la mettre à la porte. Parce qu'elle n'a pas assez eu de bonnes notes, parce qu'elle a tenté de tricher au dernier examen. Et Zoé sait très bien que dorénavant, l'avenir de son ancienne camarade est tout tracé. Un avenir qu'elle n'a jamais désiré.
Après un point final, la bombe de peinture retrouve sa poche. Elle s'appuie sur les épaules de Cloé pour redescendre de son piédestal et la scène lui paraît aussi excitante que surréaliste. Leurs deux corps à quelques millimètre, elle se demande si elles vont s'embrasser. Ce n'est pas la première fois qu'elle se pose la question, ce serait par contre la première qu'elles le ferait effectivement. Cloé se rapproche avec la douceur et la lenteur d'une plume. Leurs souffles se mêlent, leurs cœurs tambourinent à ce rythme effréné qui leur est propre. Le temps se suspend, pendant qu'elles se perdent dans les yeux de l'autre. Le soleil commence à se lever, inondant le couloir et leur méfait. Cloé sourit et Zoé sait que ce sera maintenant. Le moment est venu, celui qu'elle attend depuis si longtemps.
Pourtant, une sonnerie, brève et ténue brise l'accalmie. Cloé sursaute, s'écarte brusquement.
– Faut qu'on se tire.
La phrase, brève, sèche, réveille la tension dans les muscles de Zoé. La directrice ne va plus tarder ; elles n'ont que quelques minutes pour déguerpir. Elle jette un dernier coup d'œil à leur œuvre, un fin sourire aux lèvres. Cloé est déjà probablement loin quand elle se détourne enfin, foulant de ses pas légers le sol du couloir. Elle se fige quand son regard accroche d'insondables prunelles chocolat. Les pensées se déchaînent dans sa tête en un flot incompréhensible dont elle ne parvient pas à mettre de l'ordre. Elle n'essaie pas non plus de s'en dépêtrer, elle n'en a pas le temps : une seule chose à faire, fuir. C'est dans un sursaut qu'elle attrape la main de la nouvelle venue, l'entraînant à sa suite pour qu'elle ne se retrouve pas à récolter les lauriers de son méfait. Elle n'y est pour rien, après tout, autant essayer de la sauver. Pourtant, Zoé sait déjà au fond d'elle-même que c'est trop tard. Elle est perdue. Elles sont perdues.
Alors quand la voix glacée retentit, elle n'est pas surprise.
– Mesdemoiselles Tran et Maybon ? Venez dans mon bureau. Immédiatement

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Collées
Teen FictionZoé a tagué, Mia était là, Irina s'est battue, et Amélie a volé. Quatre histoires différentes, qui se mêlent et se recoupent jusqu'à n'en former plus qu'une en cette fraîche soirée aux relents de magie.