Dans un sursaut, je sors du sommeil, complètement nu. En sueur et haletant, je serre les dents et plisse les yeux. J'ai l'impression qu'un groupe de rock se déchaine dans ma tête. Je cours à la salle de bain. Penché sur les toilettes, je vomis tout l'alcool d'hier. Le contenu pâteux et gris qui flotte au fond des toilettes me répugne, je vomis encore. Un gout âcre persiste dans ma bouche. Je tire la chasse d'eau avant de vomir une nouvelle fois. Face à mon reflet, l'aversion et la haine m'habitent. J'ai la peau huileuse, les cheveux emmêlés et gras, les yeux gonflés et injectés de sang, des cicatrices sillonnant mon visage et un teint blafard.
Je n'ai pas le moindre souvenir de ce qu'il s'est passé hier. J'ai juste envie de quitter mon corps qui cède sous l'alcool. Je ne parviens pas à éclaircir mes pensées ni à voir clairement. Tout est vaseux, confus et irréel.
Je rentre dans la douche. L'eau froide agresse ma peau et l'eau chaude la brûle. Je reste une vingtaine de minutes sous cette eau tiède ruisselant sur mon corps meurtri. La sensation de l'eau frappant mon corps devient de plus en plus violente et douloureuse. Et je commence à claquer des dents. Je me sèche puis m'habille. Ma tête tourne encore mais l'odeur du mélange d'alcool et de vomis ne m'imprègne plus. Je retombe sur mon lit. Malgré cette profonde envie de dormir, je ne trouve plus le sommeil. Je prends alors deux cachets contre le mal de tête et me sers un verre d'eau.
Rien pour calmer cette gueule de bois.
Je ne préviens pas mon supérieur de mon absence. Qu'importe si je me fais renvoyer.
La luminosité de mon ordinateur agresse mes yeux et ma bouche est toujours pâteuse. J'ouvre mon document Word. La tête posée sur mon poing, je relis mes pages. Rien ne va. Plus rien ne va. Je me secoue et me remets à l'écriture. Tous ces sentiments en moi se déchainent et véhiculent une forte fièvre. J'écris longtemps. J'ai l'impression d'enfin revoir la lumière d'espoir qui s'est éteinte.
Je reprends deux cachets et poursuis l'écriture passionnée de mon roman. Passé 14h, la faim se fait ressentir. Dans mon réfrigérateur, il n'y a seulement qu'un pack de bière et de vieux fruits à l'étrange apparence. Je le referme, contrarié.
Ce mois d'avril est très froid, alors dans les rues mouvementées de Paris je tremble dans mon manteau de cuir noir. Mon pas est rapide et pressé. Dans cet arrondissement, on y trouve pas grand-chose. Au carrefour d'une rue, j'entre dans une supérette très étriquée. Les aliments sont presque les uns sur les autres et le propriétaire s'endort à la caisse. Personne parmi ces trois pauvres rayons. Il n'y a rien ici. Je ressors alors en saluant l'homme endormi.
Je ne trouve rien alors je décide de prendre le métro. Après plusieurs arrêts et des frôlements inappropriés entre maintes personnes aux nauséabondes odeurs, je sors de ce lacis souterrain et retrouve l'air lourd du 8ème arrondissement de Paris. Nombre de personnes s'agitent à cette heure-là. Je m'arrête au premier restaurant que je croise. Assis à une table ronde, je prends commande à une jeune femme aux cheveux remontés en queue de cheval. Elle prend quelque note puis me souris. Je n'attends pas longtemps avant d'être servi. Ma pizza est chaude et semble délicieuse. J'avale une gorgée d'eau puis dévore mon plat. Malgré l'énorme pizza que je viens de manger, je ne suis toujours pas rassasié. J'en commande une autre. Autour de moi, je ne remarque personne d'autre assis seul à une table. Je ne remarque personne d'autre manger deux très grandes pizzas à la suite. Peu à peu, mon mal de tête s'atténue . Certaines personnes me dévisagent, mais je ne peux pas les blâmer. Je dois vraiment avoir une drôle d'image : jeune homme seul, aux étranges cicatrices, ingurgitant deux pizzas beaucoup trop grandes.
Une fois repu, je paie et sors. Je remplis mes poumons de l'air frais de dehors. J'ère dans les rues de la capitale française ; sans but. Les mains dans les poches, je me perds dans mes pensées.
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Crève-Cœur
Romance6 mois. Seulement 6 mois avant d'être oublié par l'existence. 6 mois pendant lesquels il ne faut laisser personne s'attacher et ne s'attacher à personne. 6 mois avant de mourir. Mais c'est alors que, fortuitement, Sasha retrouve sa meilleure amie d...