Chapitre 36

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Je reste longtemps étendu sur le sol, complètement désarmé, éploré.

Je crois que plus rien au monde ne peut me blesser plus que je ne me suis déjà blessé moi-même.

Les larmes ne cessent de perler sur mes joues rouges.

Ma vie n'est qu'un crève-cœur. La boucherie cruelle de mon être estropié par la poursuite infernale de l'existence et de ses déboires. Et de cette souffrance, je vis l'expiation.

Dans ce petit enfer personnel où plus rien ne vit.

Pas même mon cœur n'ose battre.

Je ne suis que ce corps sans vie qui s'acharne à vivre.

Ainsi recroquevillé, je reste sur ce sol, avec l'acrimonie de la tristesse s'obstinant à tracer sur mon corps de petits sillons de sang avec les morceaux tranchants de mon cœur.

Dès maintenant, il ne se passera plus rien.

C'est fini. Tout est fini.

Je vais enfin mourir.

Je vais mourir en ayant façonné cette déplorable image de moi-même dans l'esprit de ceux que j'aime.

L'image exécrable d'un menteur.

D'un briseur de cœur.

D'un égoïste.

D'un infidèle.

D'un crétin qui a tout bousillé.

Et peu à peu, la profonde tristesse qui me condamnait à l'inertie se substitue en colère.

Une rage croissante et immaitrisable. Alors, je me lève mollement et hurle tout en pleurant. Mon corps entier se crispe.

J'en ai plus à rien à foutre.

J'ai perdu ce qui comptait le plus pour moi.

J'essuie les larmes sur mes joues avec le revers de ma manche et, assujetti à cette rage acerbe, je balance ma chaise de bureau à travers le studio. Je retourne mon bureau qui s'écrase contre le sol dans un fracas. Je frappe les murs, défais mes placards, mon lit...

Je sème le chaos partout dans mon appartement. Cette colère se déchaine. Je deviens cette fureur incoercible. Je ne représente qu'ignominie et accablement. Après le déchainement de ma colère dans mon appartement, je tente de retrouver mon calme dans mon lit.

Que fais-je faire maintenant ?

Il n'y a plus rien à faire...

Excepté mon bouquin.

Mon cœur palpite toujours aussi vite.

Mon sang bout toujours.

J'ai tellement peur de...

Mourir tout seul.

Mais en soit, n'est-ce pas l'unique chose que je souhaite depuis le début de cette histoire ?

Je me lève, tentant de calmer ma respiration. Je ramasse mon ordinateur parmi le chaos : l'écran est complètement fissuré.

Je me rassois sur mon lit et passe le reste de la journée à faire des recherches sur les différentes maisons d'édition : les mieux adaptées à mon récit, les plus accessibles...

Après avoir fait une liste de plusieurs maisons d'édition, je passe deux jours entiers à relire et à faire différentes annotations.

Je n'ai plus que ça à faire de toute manière.

Il n'y a plus que ça qui me maintient en vie.

Et finalement, après ces nombreuses heures de travail, j'envoie mon manuscrit à quatre maisons d'édition espérant recevoir une réponse positive de l'une d'entre elles.

Crève-CœurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant