Chapitre 25

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Nous passons la journée de vendredi à la plage. Le reste du temps, je suis face à mon ordinateur martelant les touches de mon clavier, plissant les yeux face à l'écran lumineux, réfléchissant activement à la suite de mon roman.

Le samedi, Charlie m'emmène à un grand marché aux puces et de rue. Nous n'avons pas cessé de piétiner et de nous arrêter aux différents stands pour observer ce que les marchands proposaient. Charlie a acheté un sac de plage en toile de voile, de petites espadrilles noires à talons et un grand paréo coloré. Quant à moi, il m'a suffi de me nourrir de la beauté de ce pays. Toutes ses possessions matérielles me sont complètement vaines.

J'ai longtemps suivi Charlie à travers le marché jusqu'à ce que mes pieds me fassent beaucoup trop mal pour continuer. J'ai alors pris place sur un petit banc au milieu d'un parc et observé Charlie se mêler à la foule, pervertie par les achats compulsifs d'objets superfétatoires.

De retour à la maison, je me laisse nonchalamment choir sur le canapé sous les yeux illuminés de Charlie face à ses nouveaux achats.

« Autant de marche me donne des courbatures. Tu veux pas plutôt qu'on fasse une cabane avec les draps et les matelas et qu'on y regarde une vieille émission tout en mangeant des pop-corn ? »

Elle laisse tomber ses bras le long de son corps, soupirant.

« Sérieusement ? J'avais prévu quelque chose ! se plaint Charlie. »

Je fronce longuement les sourcils.

« T'avais prévu quoi ?

— Un diner...

— Un diner aux chandelles avec des gars bizarres qui jouent de l'accordéon derrière ? »

Elle rougit un instant, un léger sourire apparait sur son visage.

« Non, juste un dîner. »

Elle replace une mèche de cheveux noire derrière son oreille.

« Et plus personne ne fait faire jouer des musiciens pendant un rendez-vous ! »

Je souris, les mains sur les yeux.

« Mais personne n'a parlé de rendez-vous ! je la taquine. »

Elle a une moue perplexe, les bras croisés.

« Donc tout ça pour dire que je pensais t'emmener manger dans le restaurant préféré de mes grands-parents... Mais tu n'as pas vraiment l'air enthousiaste à l'idée.

— Mais si ! J'aimerai beaucoup y aller ! »

Je lui fais un petit clin d'œil et l'imite en croisant mes bras. Elle lève les yeux au ciel et quitte le salon en grognant.

« À ce soir Sasha ! crie-t-elle en gravissant les escaliers. »

Je me laisse tomber sur le canapé. Allongé sur le ventre, je ferme les yeux un instant. J'ai tellement envie de pouvoir accéder cet autre monde. Celui dans lequel je ne meurs pas.

Pas du tout.

Celui où la vie est belle.

Très belle.

Mais lorsque je rouvre les yeux, il n'y a que les murs blancs ornés de peintures du salon. En fait, j'y suis déjà dans ce monde. C'est juste que...

Je vais bel et bien mourir.

Et que la vie est belle.

Non. Possible.

J'expire et me redresse. De nouveau face à mon document Word de 386 pages, je reprends l'écriture intense et perpétuelle de ce livre.

Crève-CœurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant