Chapitre 37

12 3 0
                                    

Je suis seul. Marchant au bord d'une chaussée en plein milieu de la nuit. Frôlé par les voitures. Les mains dans les poches. La tête baissée. La pluie coule sur mon visage. J'ignore ce que je fais là. Et c'est alors que d'aveuglants phares surgissent. Une voiture freine violemment et bruyamment à mes côtés, manquant de me renverser. Mais je ne fais rien. Je suis complètement indifférent. Ébloui par la lumière de la voiture, je ne vois pas bien qui en sort. Je n'aperçois que la silhouette confuse de quelque chose. Qui s'approche. Lentement. Il me semble que c'est un homme encapuchonné et dont le corps est couvert d'une grande cape noire. Je ne distingue pas son visage. Mais plus il s'approche, plus je suis étranglé par l'angoisse.

Une sordide angoisse.

Paralysante.

On dirait la mort...

Qui vient m'évincer.

Et puis, j'aperçois ses yeux.

De grands yeux pers.

Tout pleins de peine.

Je remarque son visage sillonné par des cicatrices.

Cet homme a la peau mate.

Et une légère barbe lui mange le visage.

Alors qu'il s'avance plus proche encore, je vois son sourire.

Un sourire qui regrette.

Un sourire qui ne traduit aucune forme de joie.

Un sourire affligeant.

Cet homme enfin se décapuchonne.

Et je suis ébranlé par le choc.

Par l'affolement.

Ses cheveux bruns sont touffus.

Il a la lèvre entaillée.

Cet homme est moi.

Je me tiens alors devant Sasha Simons.

Qui a surgi de nulle part.

Et cette allégorie de ma mort m'étouffe.

Je comprends enfin que je suis celui qui mettra fin à mes jours.

Et qu'il en a toujours été ainsi.

Cet autre moi m'enlace alors.

Si fort.

Trop fort.

Que dans un unique souffle, je m'évapore.

Comme si je n'avais jamais rien été d'autre qu'un soupir.

Qui dans le temps, s'évanouit.

Je me redresse d'un bond, réveillé par ce même cauchemar qui me hante depuis des semaines. Je me tords de douleur dans mon lit, baignant dans ma sueur et haletant. Après m'être passé de l'eau sur le visage, je tombe sur ma chaise de bureau et une fois encore depuis des semaines, je vérifie si j'ai reçu une quelconque réponse d'une maison d'édition.

Mais il n'y rien.

Comme toutes les autres fois où ce moindre espoir a osé naitre en moi.

Mon attention est soudainement portée sur la vibration de mon téléphone.

C'est un message.

D'Enzo.

Je dois l'examiner longtemps avant de réaliser que c'est bien lui.

Il me demande si nous pouvons parler. J'attends un peu avant de lui donner une réponse positive.

Assis à la table d'un restaurant du 4ème arrondissement, je suis impatient de voir arriver Enzo. Ça fait maintenant trop longtemps que je ne lui ai pas parlé. Alors que je joue avec ma fourchette, un homme brun aux yeux bleus s'assoit timidement en face de moi.

Crève-CœurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant