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Lorsque je me réveille, je me surprends à vouloir mourir plutôt qu'à me lever pour affronter la réalité. Cette réalité, c'est que j'ai un mal de tête horrible et que je me sens super barbouillée. Et encore, c'est un euphémisme. Même si je reste allongée, ma tête continue de me vriller et le monde me parait toujours sens dessus-dessous. Je ne sais pas ce que j'ai fait, mais une chose est certaine : ce n'était pas raisonnable. Je presse les paupières et essaie de prendre une grande goulée d'air pour m'en remettre un peu. J'ai un goût affreux dans la bouche, et l'odeur qui parvient jusqu'à mes narines n'est pas des plus agréables non plus. Je grimace et me résous à fermer la bouche, le nez enfoncé dans l'oreiller. Là, une douce fragrance vient embaumer mes sens, tout en me ramenant subitement sur terre. J'ouvre de grands yeux et, le cœur battant la chamade, je viens tâter le matelas près de moi, priant pour qu'aucun corps ne s'y trouve. Je garde bien quelques vagues souvenirs d'une soirée, d'un regard bleu incroyable et... d'un baiser — bordel de merde — mais pas d'une nuit entre les draps de... Jace. Je me masse les tempes en repensant à ce baiser. Même avec dix-huit litres d'alcool dans le sang, je m'en serais rappelé. Et la façon dont j'ai soldé cette soirée étrange en vomissant de tout mon saoul aussi. Pourtant, aucun souvenir de la suite et c'est tout bonnement effrayant. Lorsque j'ai à peu près la vision d'un monde normal, je tente de me mettre en position assise, avant de m'écrouler lamentablement sur le matelas.

- Bordel Iliana, t'as déconné ma vieille.

Ma voix est méconnaissable, traînante et pâteuse. Mais ça, ce n'est qu'un détail insignifiant dans la situation très déstabilisante où je me trouve plongée. En effet, lorsque je baisse les yeux sur ma tenue, je me rends compte avec horreur que je porte un teeshirt qui ne m'appartient pas. Le fait que je sois en sous-vêtements en dessous pourrait en soulager plus d'une : pas moi. Je pique un fard en serrant mes bras autour de mon ventre.

C'est un putain de cauchemar.

Pour tenter de garder mon calme, je me concentre sur la pièce que j'occupe, réussissant à observer attentivement les murs nus malgré ma gueule de bois, le bureau en verre installé sous la fenêtre et les grands placards tapissant le mur à gauche de la porte. Lorsque ma tête me le permet enfin, je me redresse avec précautions, attends une bonne dizaine de minutes et me dirige vers le fameux bureau, me laissant tomber dans la chaise, histoire de ne pas trop forcer. Là, je suis confrontée à plusieurs photos exposées dans des cadres miroirs. Je m'attarde un moment sur mon reflet et, dégoûtée par ce que je vois, je préfère me concentrer sur les clichés. Je reconnais immédiatement Jace, ce qui met un terme à mes tergiversions : je suis bel et bien chez lui. Je ne suis même pas étonnée, j'ai reconnu son odeur en un clin d'œil, ce qui, en soi, est un peu flippant. A sa gauche, Lola, sa sœur qui sourit à gorge déployée. Étonnant sachant que je ne l'ai jamais vue sourire depuis qu'elle et son frère sont arrivés au lycée. Enfin, à droite de Jace, il y a sa copie conforme en un peu plus vieux, avec pour seule différence un regard azuré. Sinon, tous deux possèdent une stature impressionnante, des traits harmonieux et volontaires et une chevelure comme les blés. Il s'agit sans doute du fameux frère aîné : Mickael. Dans les autres cadres posent les mêmes personnes, mais dans d'autres lieux et d'autres positions. Aucune trace de leurs parents ni d'une quelconque famille, comme si on cherchait à ne laisser aucune trace, à éviter les questions. Je me carre dans la chaise de bureau et laisse peser ma tête en arrière. Je suis dans de beaux-draps et je ne sais pas comment je vais me sortir de ce pétrin.

Je jure solennellement de ne plus jamais sortir le jeudi soir, ni aucuns autres soirs d'ailleurs.

J'ouvre de grands yeux ahuris.

Hier : jeudi. Une nuit passée, égal : je suis dans une merde internationale !

Je jette un coup d'œil au réveil sur la table de nuit et constate avec horreur qu'il est déjà plus de 13h.

Promesse d'un Jour (Réécriture 2020)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant