Akenna-TOME 2- Le retour du serpent

Chapitre 4

Une fois le soleil assez haut, je quitte ma chambre, en laissant Emeïdes dormir encore, comme tous les matins. Lorsqu'il se réveille, il se dirige vers la salle du trône, pour retrouver Khione.

Une fois mon voile bien positionné et attaché, je quitte le palais, pour rejoindre le temple d'Athéna. J'ai besoin de ce moment d'évasion. Il me permet de voir l'extérieur et d'entendre d'autres conversations. Ce confinement, je suis bien obligée de le respecter. Mais il m'est parfois permis de sortir de ce protocole, que j'ai moi-même instauré.

Une fois dans le temple, je m'agenouille devant l'autel, et porte mon regard vers la statue imposante de la déesse protectrice. Lorsque je viens ici, j'ai l'impression de retrouver ma vie d'avant, lorsque j'étais sur l'Olympe. Je me revois aller à la chasse avec Artémis, faire la course contre Hermès, et écouter les sages paroles d'Athéna. J'y ai passé une année entière, auprès de mes amis et de ma famille. Mon père me manque terriblement... J'ai réussi à lui pardonner son départ à ma naissance, pour finalement partir moi aussi. Nous ne sommes pas si différents lui et moi, finalement.

Mes pensées se concentrent désormais sur Artémis. Comme j'aimerais la revoir, m'excuser de l'avoir quittée, la serrer dans mes bras, elle que je considère comme une sœur. Une larme dévale ma joue, et vient s'écraser contre le sol. Il y a tellement de choses que je regrette, et d'autres que je dois accepter. Je ne les reverrai jamais, quoi que je puisse faire. Prier ne changera rien à ma situation.

Soudain, un vent puissant fait voler mes cheveux, qui viennent m'aveugler. Cette force, provient de derrière moi. Je me retourne hâtivement, et dégage mes cheveux. Lorsque je vois qui se trouve, à seulement quelques mètres de moi, je me mets à pleurer. Je me lève d'un bon, et vais me jeter dans les bras de mon amie.

– Artémis...pleurai-je.

– Je m'attendais à un accueil plus chaleureux de ta part. Mais voilà que je te trouve en larmes.

– Je suis tellement désolée... J'aurais dû tout te dire, t'avouer la vérité, mes soupçons sur Hélios.

– Ce n'est rien. Tu as fait ce qui te semblait juste Akenna. Je ne suis pas venue ici pour te blâmer, tu sais.

– Pourquoi ne m'as-tu pas rendu visite plus tôt ?

– Je n'ai pas pu... C'était trop dangereux. Hélios nous surveille tous depuis son char. Il te traque sans relâche depuis trois ans maintenant. Mais malgré cela, nous continuons de te protéger, toi et Emeïdes.

– Je savais bien que vous étiez là. Je sentais votre présence...

– Et ton intuition disait vrai. Nous sommes toujours à tes côtés, même si tu ne nous vois pas.

Nous restons silencieuses, durant de longues minutes. Je ne veux plus lâcher Artémis, de peur qu'elle ne parte de nouveau. Plus jamais, je ne souhaite être seule à porter mon lourd fardeau. La déesse de la chasse me comprend, et je m'en veux terriblement d'avoir douté d'elle, lorsque je traquais l'homme noir.

– Mon père, parle-moi de lui, implorai-je.

– Il ne parle plus à personne. La colère le ronge, et il passe ses journées sur terre. Je l'ai suivie, et j'ai découvert un temple, plongé dans les abysses, à l'abri des regards.

– La fontaine... Il regardait dans l'eau.

– Il veille sur toi depuis cet endroit.

– Mais, ce n'est pas bon pour lui de rester seul.

– C'est ce que nous pensons tous. Son état nous inquiète Akenna. Tu es la seule à pouvoir le faire revenir à la raison.

– Comment procéder ?

– Tu es proche de la mer. Parle-lui. Il en a besoin, et toi aussi.

Je prends un instant de réflexion. Mon père a besoin de moi...mais je ne peux pas sortir. C'est bien trop dangereux. Hélios risquerait de me retrouver, et de me suivre du regard, jusqu'à ce que je lui dévoile l'endroit où je vis. Emeïdes serait en danger...

– Je ne peux pas faire ça Artémis. C'est bien trop risqué pour la vie de mon fils.

– Akenna. Tu penses franchement que la meilleure solution pour le bonheur de ton fils, c'est que vous restiez cachés jusqu'à ce que la mort vous emporte ?

– Je veux le protéger d'Hélios. Il est partout, et je sais que si je sors, ne serait-ce qu'une fois à découvert, il nous retrouvera.

– C'est justement en t'enfermant dans ce palais que tu cours un grave danger. Et ton fils, il va grandir, se poser de plus en plus de questions. Un jour, il commettra un acte, qui vous trahira tous les deux. Hélios ne le connait pas, il ne fera pas attention à un enfant. C'est d'abord toi qu'il cherche en priorité.

– Alors, pour toi je dois laisser mon fils sortir à sa guise ?! Le mettre en danger ?!

– Ce n'est pas le mettre en danger Akenna, mais le protéger justement. Ainsi il n'essaiera pas de s'échapper, car c'est là, la faute que vous pourriez commettre. Sous la panique, tu sortiras à découvert, et Hélios te suivra du regard, jusqu'à ce qu'il retrouve le petit.

Je commence à croire qu'elle a raison. Khione aussi, m'a prévenue de cela. Emeïdes est extrêmement têtu, et un jour, il sortira seul pour me provoquer. Rongée par l'inquiétude, je serais capable de quitter mon refuge sans mettre mon voile, totalement à découvert du dieu du soleil. C'est là que la vie de mon fils sera réellement en danger. Ce n'est qu'en le laissant avoir une vie normale, que j'aurais une chance de le sauver.

– Tu sais que j'ai raison Akenna, poursuivit Artémis. Si tu veux vraiment l'épargner de ton passé, laisse-le avoir une enfance, sa liberté dont il a tant soif.

– Vous veillerez sur lui dans ces moments-là ?

– Comme toujours Akenna.

– Bien, alors c'est d'accord. J'irai voir mon père, et laisserai Emeïdes sortir à sa guise.

– Tu ne le regretteras pas, je te le garantis. À présent, je dois m'en aller, mais sache une chose...

Artémis lève mon visage vers elle, et nos prunelles se rencontrent. Je n'oublierai jamais l'expression de la déesse de la chasse à ce moment-là. Douce, compatissante, rassurante et amicale.

– Tu n'es jamais seule.

Sur ce, Artémis se métamorphose en oiseau, et s'envole directement vers les cieux. Tout ce que vient de me dire la déesse, m'a donné la sensation de revivre. Elle vient de me rappeler ce pourquoi je me bats, mais aussi la chance que j'ai d'être encore en vie, avec mon enfant. Mon père a besoin de moi, et j'irai le voir cet après-midi. C'est un des premiers objectifs, que je me dois accomplir, et de réussir.