Chapitre 5

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Je décide de suivre les conseils d'Artémis. J'ai la chance de vivre près du port d'Athènes, alors il sera plus facile de retrouver mon père. Il doit bien y avoir une plage non loin de là. Je m'arrête dans la cité, et demande aux passants, s'ils ne connaitraient pas un endroit, où je pourrais retrouver mon père. Je sais bien que Poséidon n'est pas la bienvenue à Athènes, étant donné que la déesse protectrice ne le porte pas vraiment pas dans son cœur. Mais cela peut se comprendre. Ils se sont disputés de nombreuses fois à propos de la cité. Les habitants ont choisi Athéna comme déesse protectrice, et ont donné son nom à la ville. Néanmoins, je suis certaine que mon amie saura faire une petite exception pour moi.

Un passant m'a indiqué un endroit, qui me paraît suffisamment accueillant pour mon père. Je longe le port, où les marchants et les commerçants ne se font pas rares, mon voile dissimulant mon visage. J'ai tellement hâte d'arriver sur la plage, et de pouvoir retrouver mon père. Mais...comment va-t-il savoir où je suis ?

Me voilà les pieds dans le sable, face à la mer, me demandant comment manifester ma présence à mon père. Je défais les lacets de mes sandales, et les retire. Une fois pieds nus, j'ai la sensation de retrouver mon bonheur d'enfance, les instants où j'allais me baigner dans la mer. Un grand sourire vient se dessiner sur mes lèvres, tandis que je m'avance vers la mer, qui m'appelle. Le déferlement des vagues, provoque un son que je n'avais pas entendu depuis des années. Mes dieux, que cela fait du bien.

Après avoir apprécié ce moment unique, je me reconcentre sur mon objectif, trouver mon père. Je ne sais pas pourquoi, mon regard se dirige sur une barque, attachée à un poteau, non loin de là. Je fronce les sourcils, réfléchissant au choix que je vais faire. Mes pas me conduisent finalement jusqu'à la petite embarcation. Après avoir détaché la barque, j'enjambe le rebord, et monte directement dedans. Mes mains serrent les rames, comme si j'avais peur qu'elles ne plongent dans l'eau, tels des poissons.

Le courant n'est pas assez fort, pour me faire dériver. Je rame, sans même savoir où aller. Mais qu'est-ce que je suis en train de faire ? J'ai l'impression qu'un tourbillon peut se former à tout moment, et m'entraîner dans son piège. Je secoue la tête, comme si je voulais chasser des mauvais insectes. Plus je m'éloigne du rivage, et plus mon cœur se serre. J'ai l'impression de me mettre en danger...inutilement. Si ça se trouve, Poséidon ne sait même pas que je veux essayer de le retrouver. Dans un profond soupir, je me raisonne à faire demi-tour.

Alors que je m'apprêtais à rebrousser chemin, je sens ma barque s'immobiliser. J'essaie tant bien que mal de la faire avancer, mais rien à faire. C'est comme si elle était échouée sur des rochers. Je me penche alors pour regarder vers le fond. Tout est normal, aucun obstacle. Que se passe-t-il ?

Soudain, je sens la barque glisser sur l'eau, mais pas vers l'endroit où je veux aller. Le rivage s'éloigne encore plus, alors que je tente tant bien que mal, de ramer. Voyant que je me fatigue inutilement, je pose les rames, et réfléchis à une autre solution. Je me tourne vers le sens où va la barque. Elle m'entraîne vers la falaise, où les rochers pourraient perforer mon embarcation. Je ne comprends toujours pas ce qu'il se passe. Pourtant, il n'y a presque pas de courant...

Un peu plus loin, dissimulée par de hauts rochers, je distingue une grotte, et c'est d'ailleurs là que se dirige la barque. Serait-ce un signe de mon père ? Ne tentant plus aucune riposte, je laisse le courant imaginaire m'entraîner là où bon lui semble. Je finis par dépasser la frontière lumière/obscurité, et entre dans la grotte.

Il n'y a pas énormément d'espace, mais c'est largement suffisant pour que deux personnes se retrouvent. La barque vient cogner le rebord, ce qui provoque une petite secousse. Je descends de l'embarcation, mais non sans méfiance. J'ai appris ces trois dernières années à avoir peur de tout...

– Tu as bien changé, dit une voix cachée dans l'ombre.

Je me mets à rire, en la reconnaissant, et les larmes finissent par me monter aux yeux. Je cours rejoindre mon père, qui me prend instantanément dans ses bras. Mon bonheur est tellement intense, que j'en tremble.

– Père...

– Que tu es courageuse mon enfant.

– Tu m'as tellement manquée, pleurai-je.

– Ton absence m'est insupportable Akenna. Je voudrais tant que tu reviennes avec moi...même si je sais que c'est impossible.

Après plusieurs minutes d'embrassades, nous nous asseyons tous les deux au bord d'un rocher, les pieds plongés dans l'eau froide et turquoise.

– Hélios n'abandonne toujours pas ses recherches, me prévint mon père. Il est plus que déterminé à vous retrouver, toi et le petit.

– J'en ai conscience. Mais je sais qu'à Athènes, je suis en sécurité.

– Je m'inquiète jour et nuit pour toi...

– Il ne faut pas père. Cela fait trois ans maintenant, tu sais. Et puis, je suis rassurée en me disant que vous continuez de veiller sur nous.

– Moi, Artémis, Athéna et Hermès, nous sommes tous là pour vous.

Je souris, alors que Poséidon ne lâche pas ma main. Sans doute parce qu'il a peur que je m'en aille de nouveau.

– Père, tu ne dois pas gâcher ton temps et ton bonheur, en t'isolant des autres. Tu finiras par te détruire en restant seul, sans aucune aide. C'est en agissant que tu vas réussir à protéger ceux que tu aimes...

– Je pense que c'est plutôt à moi de te dire cela, répondit Poséidon en souriant.

L'expression joyeuse, que j'avais sur mon visage, s'efface instantanément. J'ai donné des conseils à mon père, que moi-même je ne respecte pas. Mes amis et ma famille, m'ont tous donnée les mêmes conseils, affronter la réalité, au lieu de me terrer à l'intérieur du palais.

– On ne te demande pas de te mettre en danger, Akenna. Tu dois continuer à prendre tes précautions, tout en profitant de la vie, et de ton fils.

– Tu as raison...

– Voilà pourquoi, je te demande un service.

– Lequel ?

– Sors, et viens me retrouver ici plus souvent. En échange, je te promets de me reprendre.

– Très bien, répondis-je en souriant.

Mon père passe son bras autour de mes épaules, et je laisse tomber ma tête contre lui. Cela fait tellement du bien de le revoir, de le sentir près de moi, de l'entendre parler. Je me rends compte alors, que m'isoler et avoir peur de la réalité, c'est cela qui me détruisait et me mettait réellement en danger. 

Akenna-TOME 2- Le retour du serpentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant