Chapitre 28

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Je n'entends plus rien, à par le déferlement des vagues, et le souffle du vent. Nesrín reste silencieuse, tandis que nous longeons le rivage.

– Tu voulais me parler ? demandai-je.

– Oui, en effet.

– Je t'écoute alors.

– Veux-tu rester ici ? Ou comptes-tu repartir ?

– Mon fils et l'homme que j'aime sont en danger. Je ne peux rester loin d'eux trop longtemps.

– C'est bien ce que je pensais. Je ne connais qu'une partie de ton histoire, mais pas le reste. J'aimerais en apprendre plus sur toi, si tu le veux bien.

– Que sais-tu déjà de moi ?

– Tu es la fille de Poséidon et d'une mortelle, dont je ne me souviens plus le nom.

– Galena...elle s'appelait Galena.

– C'est cela. Donc ta mère a été heu...enlevée du monde des vivants.

– Tu peux dire assassinée.

– Oui...par un mystérieux homme noir. Après cela, tu es montée sur l'Olympe, pour rejoindre ton père. Tu as fini par tomber amoureuse d'Hélios. Vous vous êtes mariés, mais tu es partie ensuite. Pourquoi ?

– Parce que j'ai fini par apprendre que l'homme noir n'était autre que mon mari.

– C'est lui qui a tué ta mère ?

– Oui... Lorsqu'elle était encore en vie, je lui ai promis de rester avec elle jusqu'à ma mort. Hélios n'a pas supporté cela, parce qu'un oracle lui avait prédit qu'il n'aimerait personne à part moi. Il avait peur de se retrouver seul. Cela l'a conduit dans une folie meurtrière.

– Alors, nous ne sommes pas si différentes, toi et moi. Nous avons toutes les deux perdues un être cher à notre cœur. Moi ma sœur, et toi, ta mère.

– Et il menace encore les deux personnes que j'aime le plus au monde. Je ne veux pas revivre les même malheurs que dans mon passé.

– Je comprends. Dans ce cas, que veux-tu faire ?

– Tuer Hélios. Il le faut.

– Tu sais pourtant qu'il est impossible de donner la mort à un dieu.

– Il existe forcément un moyen.

– J'ai bien peur que non Akenna.

– Alors quoi ?! Je vais devoir rester cachée, loin de ma famille parce qu'elle serait encore plus en danger en ma présence ?

– C'est peut-être la meilleure solution...

– Non, je ne peux le croire.

Je m'assieds sur le sable, plie les genoux, et regarde vers l'horizon. L'épais brouillard me gâche toute la vue, même s'il n'y a rien à voir au loin, à part de l'eau.

– C'est la mer Égée, que je vois devant moi ? demandai-je en me relevant.

– Non. Il s'agit de la mer Noire.

– Pourquoi mon père m'aurait-il amené aussi loin ?

– Je n'en sais rien. Sans doute pour t'éloigner du danger.

– Je ne pense pas. Mon père ne m'aurait jamais entraînée aussi loin de l'Olympe. Et ce brouillard l'empêche de me voir.

– Pourquoi t'aurait-il isolée de lui ainsi ?

– À mon avis, il voulait que je vous rencontre. Peut-être parce que vous savez quelque chose, que moi j'ignore.

– Je ne vois pas ce que ça pourrait être.

– Mon père sait que je veux tuer Hélios. S'il m'a envoyée vers les Amazones, c'est que vous avez la solution à mon problème.

– Akenna. Je hais Hélios tout autant que toi. Je me suis battue maintes fois contre lui, sans résister bien longtemps. Il est beaucoup trop puissant. Crois-moi, si j'étais en mesure de le tuer, je l'aurais fait depuis des années.

– Cherche bien. N'existe-t-il pas une arme, ou alors un poison, qui pourrait tuer Hélios ?

– Pas à ma connaissance. Le seul moyen d'hotter la vie d'un dieu, ça serait de le rendre mortel, mais une telle chose ne peut se faire.

– Le rendre mortel.

Je m'assieds de nouveau, plongée dans une grande réflexion. Ma mère m'a raconté toutes les légendes des dieux, et des héros de la Grèce. Je les connais toutes de par cœur. Il existe forcément un moyen d'enlever l'immortalité d'un dieu tel qu'Hélios.

– Akenna. Cela ne sert à rien de réfléchir. Aucun moyen n'est connu du royaume des vivants pour vaincre des immortels. Héraclès lui-même ne réussirait pas cette tâche.

– Héraclès ?

– Heu...oui, c'est ce que j'ai dit. Tu ne vas tout de même pas aller le chercher dans les Enfers pour le faire combattre à ta place non plus ?!

– Loin de moi d'avoir une idée pareille.

– Alors à quoi penses-tu ?

– J'imagine que tu connais les Douze Travaux d'Héraclès.

– Évidemment. Je te rappelle qu'il a affronté mon peuple à un moment !

– Et parmi ses épreuves, il s'est battu contre l'Hydre de Lerne.

– Oui, et alors ?

– Tu te souviens comment il a réussi à la vaincre ?

– Vaguement oui.

– L'Hydre de Lerne a la propriété de faire repousser et de doubler le nombre de ses têtes. Cette créature est donc immortelle. Pour réussir à la tuer, Héraclès a tranché les têtes impérissables de la bête, et les a enterrées. Après cela, il a trempé ses flèches dans le sang de l'Hydre. Lorsqu'il tirait, les blessures de la créature devenaient mortelles !

– Viens avec moi, dit Nesrín en courant vers le palais.

Je la suis, jusqu'à une salle, où des centaines de livres sont rangés sur une grande étagère. Elle cherche précipitamment, sur chaque dos des œuvres, jusqu'à ce qu'elle trouve celui qu'elle veut, et le pose sur une table, tout en feuilletant.

– Que cherches-tu ?

– Les réponses à mes questions, que seul ce livre sait. Il est unique. Là, regarde, dit Nesrín en me montrant une ligne du doigt. Il est dit que le sang de l'Hydre de Lerne est un venin puissant, capable de retirer les pouvoir des immortels durant un court instant. Chaque blessure est alors fatale pour la personne qui reçoit les coups.

– Donc Hélios deviendrait vulnérable.

– Et tu aurais plus de chances de gagner contre lui.

– Où peut-on trouver le sang de l'Hydre ?

– Selon le livre, il en resterait une fiole...

Nesrín s'arrête, et fixe la page avec un regard effrayé, comme si le livre venait de la menacer.

– Qu'y a-t-il ? demandai-je en posant ma main sur son épaule.

– Tu trouveras le sang de l'Hydre de Lerne, au royaume des Enfers...

Akenna-TOME 2- Le retour du serpentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant