Chapitre 23

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J'ai passé l'après-midi à me remémorer le plan qu'on a préparé avec Apollon. Tout est clair dans mon esprit, même si l'inquiétude me ronge. Peut-être bien que le corbeau se paie ma tête depuis le début, mais je dois malgré tout essayer. Je n'ai pas le choix après tout.

Soudain, j'entends la serrure se déverrouiller, et la lumière du jour m'aveugle. Les escaliers grincent à chaque fois qu'Hélios pose un pied sur les vieilles planches. J'arrive alors à me redresser, et à me montrer la plus hostile possible. Le dieu du soleil se poste devant moi, un verre à la main, avec ce fameux liquide que je vais devoir ingurgiter.

– Bonjour Akenna, dit Hélios d'une voix mélodieuse.

Son ton me donne envie de vomir. Il a l'air content de l'idée, qu'il pense être la sienne. À ce moment-là, il savoure déjà sa victoire, tandis que moi j'attends patiemment la mienne. Hélios me tend alors le verre, pour que je le boive.

– Tiens, tu dois avoir soif.

Je regarde le verre avec envie. Il est vrai que je suis totalement déshydratée. Mais je dois garder mon côté méfiant.

– Tu es tellement obstinée par l'idée que je puisse te faire du mal, que tu es effrayée par un verre d'eau, dit le serpent en riant.

– Tu aurais pu mettre quelque chose dedans.

– Pour quoi faire ? Te tuer ? Tu sais bien que n'en ai aucune envie. Et puis, même si c'était le cas, je t'aurais amené autre chose qu'un liquide incolore, tu ne crois pas ?

Je fixe le verre, et tends la main précipitamment pour le saisir. Je bois le tout d'une traite, et mime une grimace. Malgré la couleur limpide de l'eau, je dois ressentir un goût très amer.

– On se voit dans une minute mon cœur, déclara Hélios dans un sourire vainqueur.

Je fais mine d'avoir des maux de tête, et tombe au sol, tout en criant atrocement, jusqu'à ce que je ne fasse plus rien. Je fais semblant de m'évanouir, trompant ainsi l'attention d'Hélios. Au bout de quelques secondes, je me souviens encore de tout, signe qu'Apollon a bien été sincère avec moi. Le faux élixir d'amnésie réussira à duper le serpent. C'est à présent le moment de jouer la comédie. Je me redresse péniblement, et regarde tout autour de moi, comme si je n'avais pas la moindre idée de l'endroit où je me trouve.

La porte de la cave s'ouvre alors avec fracas, et Hélios apparaît, portant son masque, lui donnant un aspect bienveillant.

– Akenna, enfin je te retrouve, dit-il d'un ton soulagé.

– Hélios...

Mon ton paraissait amoureux, vulnérable et innocent. Le dieu du soleil mord à l'hameçon, puisqu'il se précipite sur moi et me prend dans ses bras.

– Je suis là mon amour, c'est fini.

– Hélios, mais où suis-je ?

– Ne t'inquiète plus pour cela. Tu es en sécurité maintenant.

– Explique-moi pourquoi tu m'as mise là, pleurai-je.

– Ce n'est pas moi mon cœur, je te le jure. Un homme t'a enfermée ici pour obtenir une rançon.

– Qui est-ce ?

– Je l'ignore mon amour. Mais ne t'en fais pas, il ne viendra plus. De quoi te rappelles-tu ?

– Heu...et bien, je me souviens de notre mariage, et après plus rien, le trou noir.

– Très bien, conclut Hélios dans un grand sourire. C'est mieux que tu ne te souviennes pas de cette expérience.

– Ramène-moi à la maison, je t'en prie.

– On va aller dans...mon ancienne résidence quelques jours. Comme ça, nous ne serons que tous les deux. Tu es d'accord ?

Je hoche la tête, faisant mine d'être étourdie. Je ne m'attendais pas à ce qu'il me ramène sur l'Olympe, alors tout se passe comme je l'ai prévu. Le serpent me conduit en dehors de la cave, où la lumière du jour m'aveugle atrocement. Hélios me protège du soleil en m'attirant contre lui, pour que je puisse enfouir mon visage contre son chiton court. Nous montons alors sur son char, et partons dans les airs.

La proximité que j'ai avec le dieu du soleil me dégoûte. Mais c'est un mal pour un bien, puisque je pourrai m'échapper plus facilement. Mon plan a fonctionné, et Apollon a bien fait son travail. En retrouvant les faveurs du serpent, il a réussi à le berner. Il lui a alors proposé de préparer un élixir d'amnésie pour que je ne me souvienne plus de rien après le jour de mon mariage avec Hélios. Bien entendu, cette idée a enchanté le dieu du soleil, qui s'est empressé de commander ce poison au corbeau. Apollon a seulement mis de l'eau dans le verre que m'a tendu le serpent. Il m'a suffi de jouer la comédie par la suite.

Hélios plonge son visage dans mon cou, et je me retiens de grimacer. Je dois redevenir la femme aimante et douce que j'étais lorsque j'étais encore éprise de lui. Je mime un sourire face aux caresses d'Hélios, et laisse tomber ma tête contre son torse, comme je le faisais autrefois. Le dieu du soleil a l'air plus heureux que jamais d'avoir retrouvé sa femme adorée. Mais moi, je n'ai qu'une idée en tête, m'évader de ses bras au plus vite.

Nous arrivons finalement devant une grande maison dorée, avec un jardin des plus verdoyants, me rappelant celui de l'Olympe. Les colonnes de la bâtisse sont en or, et le sol en marbre. Hélios me fait descendre du char, et me prend la main pour me conduire à l'intérieur le plus rapidement possible. Sans doute, ressent-il la peur d'être vu par un de mes alliés divins. Mais je sais pertinemment qu'Apollon est là, quelque part, dissimulé dans l'ombre, à nous observer.

Hélios m'emmène jusqu'à une grande chambre, où il me lâche enfin. Je fais semblant de bailler, et me frotte les yeux. Le serpent sourit, attendri par mon geste enfantin, et déclare d'une voix douce :

– Oh mon amour, tu es épuisée. Viens dormir, le soleil se couche.

Hélios s'allonge, et m'invite à le rejoindre. Je serreles poings pour ne pas m'enfuir tout de suite. Il me rattraperait en moins dedeux. Je me laisse alors enlacer, sur ce lit qui me rappelle celui que jepartageais avec Hélios, lorsque je l'aimais encore. Le dieu du soleil mecaresse les cheveux, tandis que je ferme les yeux, pour tenter de trouver lesommeil. Malgré l'endroit où je suis, et la personne avec qui je me trouve, jedois me reposer pour être le plus en forme possible.

Akenna-TOME 2- Le retour du serpentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant