Chapitre 17

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Le jour tant espéré par les athéniens est enfin arrivé. Je sens déjà la présence d'Athéna, alors que le soleil, cette boule de feu que je déteste tant, se lève à peine. Le fait de voir cette sphère rayonnante, me rappelle chaque matin que je ne suis pas en sécurité. Je repense alors au rêve que j'ai fait d'Hélios, que je prends comme un mauvais présage. Je sais bien qu'un jour je serai obligée de l'affronter, mais je ne me sens pas prête.

– Akenna ! m'appela une voix. Le défilé commence, dépêche-toi !

Je me tourne vers Ectellion, que je n'ai pas entendu entrer. Il porte une couronne de feuilles d'olivier, ainsi qu'un chiton court. Son expression faciale traduit de l'impatience et de l'amusement. Je souris, puis cours le rejoindre. Main dans la main, nous nous hâtons de quitter le palais, non sans bousculer certains passants. Je ris, face aux excuses pitoyables qu'Ectellion fait aux athéniens.

– Pardon ! Excusez-moi ! Je suis vraiment désolé, je ne vous avais pas vus. Poussez-vous, il y a une urgence ! On est prioritaire !

Mon ventre est tellement contracté à force de rire, que cela en devient douloureux. Nous arrivons devant les gradins, où sont installés Agamédès et Khione. Puisqu'Ectellion est devenu le garde du corps du roi, il a tout autant que moi le droit de monter.

Je me poste aux côtés de la reine, qui me lance un sourire complice. Emeïdes nous attendait sagement, sur une chaise, juste derrière le roi et Khione. Il ne peut pas voir le spectacle... Ectellion quitte son poste et va rejoindre son fils, dont il a désormais la confiance. Il le porte et se place devant la barrière, tout en le gardant dans ses bras.

– C'est inacceptable ! ragea Hypérion. Ils doivent se placer derrière les souverains, comme nous tous !

– Allons, ne t'énerve pas ainsi. Laisse cet enfant profiter du spectacle.

– Mais...votre majesté...

– Aucune protestation Hypérion !

– Bien, sir.

Le chef de la garde retourne à son poste, non sans me lancer un regard noir, dont je ne prête aucune attention. Agamédès se penche pour mieux me voir, et me fait un signe de tête en direction d'Ectellion et de mon fils.

– Le spectacle serait sans doute mieux pour toi, si toute la famille était réuni n'est-ce pas ?

– Que voulez-vous dire votre majesté ?

– Tu as très bien compris, va les rejoindre.

Je laisse un grand sourire m'échapper, puis me hâte d'exécuter les ordres du roi, qui pour moi, n'en sont pas. Emeïdes est encore plus heureux en me voyant à côté de lui, alors qu'il se trouve toujours dans les bras de son père.

– Maman ! Regarde les danseuses !

Je hoche la tête, tout en admirant la prestation des jeunes femmes. C'est à présent au tour des cavaliers de faire leur entrée, dans leur armure argentée et magnifique.

– Père ! Les cavaliers !

En entendant ces mots, Ectellion se tourne directement vers Emeïdes, avant de braquer son regard sur moi, émerveillé par les paroles de son enfant.

– Oui mon fils, ils sont impressionnants.

Je distingue une larme, dévalant la joue du braconnier. Son fils vient de l'appeler père, et cela me touche tout autant qu'à lui. Oui, à présent nous sommes une famille à part entière.

Après le défilé, des jeux sont organisés. Avec Emeïdes, nous avons une sorte de rituel. Sur la grande place, un jeu, que mon fils adore, est installé. Le foulard posé au sol, les deux lignes d'hommes et de femmes se faisant face, le jeu du béret est prêt à être lancé. Je porte Emeïdes pour qu'il puisse mieux voir. Il a besoin de profiter du moment, puisque c'est la première fois de sa vie qu'il peut y assister d'aussi près. Normalement je rentre au palais pour le rejoindre. Et puis du balcon, nous observons les jeux. Moi, je suis toujours supportrice de l'équipe des femmes, alors qu'Emeïdes est du côté des hommes. Je me demande bien qui gagnera cette année.

– J'adore ce jeu ! J'y jouais lorsque j'étais enfant, s'émerveilla Ectellion.

– Oh père, vas-y ! Tu vas gagner, et maman va perdre !

– J'espère bien.

Dans un petit sourire joueur, Ectellion me regarde, puis s'éloigne pour rejoindre son équipe. Il pense que les femmes vont perdre ? C'est ce que nous allons voir.

– Pardonnez-moi, mais il manque une joueuse, annonça l'organisateur.

– Maman, maman ! Vas-y !

– Quoi ? Moi ? Oh non voyons.

– Allez, s'il te plaît.

Emeïdes adopte une expression faciale, dont je ne peux résister. Ses adorables yeux bleus se plissent, des reniflements se font entendre, alors qu'il commence à faire la moue. Attendrie, je cède immédiatement. Je le pose, et m'agenouille devant lui.

– Tricheur, râlai-je.

Je me dirige alors vers mon équipe, sous l'œil amusé d'Ectellion. L'organisateur du jeu m'attribue mon numéro, qui est le six. Je me mets déjà en position, prête à courir. Je ne perdrai pas ce jeu, et surtout pas contre Ectellion. J'entends les encouragements d'Emeïdes, mais qui ne me sont pas destinés. Ce petit traître ne perd rien pour attendre, tout comme son complice.

C'est alors que mon numéro est appelé. Je cours alors, sous les acclamations de la foule, jusqu'au foulard. Me voilà face à Ectellion, nous disputant le même objet. Je me pince les lèvres, tandis que le braconnier ne me lâche pas des yeux.

Soudain, quelqu'un passe entre nous et prend le foulard. Ectellion part alors vers son camp, tout en riant. Il porte Emeïdes, qui tient toujours le foulard, sous les rires du public. Ils finissent par poser le trophée auprès de leur équipe.

– C'est de la triche ! protestai-je.

– Pas du tout. J'ai pris le foulard et je l'ai amené jusqu'à mon camp. Je suis dans les règles.

– Menteur. Et toi, petit traître.

Emeïdes se met à rire, tout en gardant le foulard dans sa main, de peur que je ne lui reprenne. Je cours alors après mon fils, qui hurle tout en s'esclaffant, jusqu'à ce que je le rattrape et le chatouille. Ectellion vient à son secours, en me bloquant de ses bras et de ses baisers.

– On a gagné, murmura-t-il.

– Par la triche.

– Plutôt par la ruse.

– Je te déteste.

– Non, tu m'aimes.

– Pas du tout.

– Dis-le que tu m'aimes.

– Je t'aime.

Ectellion me tourne alors vers lui, et m'embrasse,sous le regard dégoûté d'Emeïdes. Son père se met alors à le poursuivre, sousmes rires joyeux. J'ai peut-être perdu une bataille aujourd'hui, mais sûrementpas la guerre. Un jour, c'est moi qui ramènerai le foulard à mon équipe.

Akenna-TOME 2- Le retour du serpentOù les histoires vivent. Découvrez maintenant