Naamen passe sa main sur son front. Jamais il n'aurait imaginé qu'être roi pouvait être aussi épuisant. Il se lève lentement de son trône, habité par de sombres émotions.
La journée a été encore plus éprouvante que d'habitude de par les plaintes de ses sujets ainsi que par les incessantes demandes de ses rivaux. Personne n'imagine à quel point il souffre. Sans plus attendre, courbé sous le poids de la fatigue, il se dirige vers sa chambre.
— Pourquoi moi ? se demande-t-il. Je ne suis pas plus faible qu'un autre...
Le palais est très joliment décoré, ses murs somptueux couverts de rouge et d'or lui rappellent le soleil, majestueux. Mais aujourd'hui, il n'a pas la tête à admirer sa demeure. Toujours perdu dans ses pensées, il gravit les escaliers couverts d'un tapis de velours.
— Ils me rendent faible... Oui, mais je ne peux pas risquer de les faire tuer. Il en est hors de question, murmure-t-il.
L'escalier laisse place à un couloir dans lequel se trouve une jeune fille aussi rousse que les flammes, au regard acéré, qui lui bloque le passage. Elle toise le roi, s'approche et lui saisit le bras.
— Bon. Tu vas m'expliquer ce que tu fais ? demande-t-elle, l'œil farouche, l’une des mains sur les hanches.
Naamen lève la tête, la mine défaite. Si même sa propre fille ne le soutient plus, il ne va pas tarder à sombrer.
— Peut-on au moins aller à l'abri des regards ? s'enquit-il, dépité.
La jeune femme ne répond pas et l'entraîne à travers le labyrinthe de pièces du palais. Quand elle s'arrête enfin, ils se trouvent dans l'une des rares salles sans décorations, dans laquelle des murs de pierres épais bloquent le son.
— Tu peux parler. Mais j'espère que tu as une bonne raison de plonger le pays dans la famine.
— Je...
— Oh non, ce n'est pas une réponse ! tempête la rouquine. Cela fait maintenant presque six mois que j'attends tes explications. Alors, tu vas m'en donner et on va résoudre ce problème ensemble !
Naamen lève la tête, intrigué. Jamais il n'aurait pensé que sa fille pouvait être aussi autoritaire.
— Par où commencer ? Je suis piégé, ma chérie, condamné. C'est eux ou moi.
La jeune fille ne peut s'empêcher de hausser le ton, les mains sur ses hanches :
— Comment ça ? Qui, eux ?
— As-tu entendu parler des Phénix ? lâche difficilement le roi, le visage larmoyant. Ce sont eux la source de mes problèmes. Et quelque chose me dit que ce n'est pas fini.
— Papa ! Qui sont-ils ? Ne te laisse pas faire ! Il faut que tu te ressaisisses ! Le royaume plonge dans la misère, des coups d'État éclatent, le peuple te demande ! Du jour au lendemain, tu es devenu fatigué, renfermé, pourquoi ?
— Si je te le disais, tu n'y croirais pas… souffle-t-il avec désespoir, se remémorant les moments difficiles qu'il a vécu.
— Ah, c'est comme ça ? Très bien. Écoute-moi bien, parce que j'en ai pour un moment, rétorque la jeune femme, refusant d'abandonner. Depuis que j'ai dix ans, je t'aide à diriger ce royaume. Je ne t'ai jamais laissé tomber, même quand tu t'es plongé dans les ennuis jusqu'au cou. Le peuple attend beaucoup de toi. Tu es son héros, le roi parfait, à l'écoute, attentif, généreux. Tu l'as comblé pendant des années.
Elle fait une pause pour reprendre son souffle et continue son monologue, sa voix s'agitant de plus en plus.
— Je vais t'expliquer ce qui se passe. Je suis ton héritière, ta fille, ainsi que ta confidente. Si tu ne me dis rien, à qui le diras-tu ? Il va falloir que tu craches le morceau ! Le monde que nous avons connu s'effondre peu à peu. Sa survie en dépend !
Le roi la regarde, ses yeux cernés de noir trahissant sa fatigue et son souci.
— J'aimerais tant faire cela, ma chère fille. Mais ce n'est pas possible... Notre royaume est destiné à sombrer…
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Nom De Code Tome 1 - Flamme ✓
ActionErnakan, an 1535. Le Roi, qui a toujours été bon et juste, change soudain de face. Désormais avare et égoïste, il multiplie les impôts et son peuple sombre peu à peu dans la misère. Personne ne sait ce qui a déclenché cet étrange comportement. Perso...