Seul, j'pourrai pas m'en sortir, si j'y arrive, c'est par ton aide
Si toi aussi, t'as ressenti qu'le corps et l'âme séparent ton êtreKen,
Il y a quelques temps, Mona m'a conseillé d'écrire pour te parler. Elle me disait que ça serait peut-être plus simple si je te racontais toute la vérité par écrit. Maintenant que je suis devant cette feuille, je m'en rends compte que c'est encore plus compliqué. Je dois trouver les mots exacts pour te faire le moins de mal possible. C'est difficile.
Je ne sais pas par où commencer tellement il y a de choses que tu dois savoir. Je pense que je commencerai par dire que tu es la personne que j'aime le plus dans ce monde. Tu es la personne la plus importante à mes yeux. Quand tu pars, une partie de moi part aussi. Je t'aime Ken. Je ne te l'ai pas assez dit, alors je te le répète : je t'aime.
Quand je suis venue au monde, tu avais déjà six ans. Tu ne le savais pas encore mais tu allais devenir un merveilleux grand frère et probablement le meilleur qui est jamais existé. Tu m'as comblé de bonheur. Pour moi, ma famille, c'est toi. Et personne d'autre. Tu as été tout pour moi. Tu m'as donné confiance en moi. Tu m'as appris le goût de la lecture et de l'écrire. J'ai découvert ce que ça voulait dire être passionné par quelque chose. Nous avions une passion commune : les mots. Toi, tu as décidé de les chanter. Moi, j'ai décidé de les lire et de les lier ensemble pour former un récit. Un récit qui me ressemble. Si j'avais été ta grande-sœur, je ne suis pas certaine que j'aurai accompli ce rôle aussi bien que toi. Oui, tu as fait des erreurs. On en fait tous. Ces erreurs t'ont fait grandir et tu t'es relevé.
Malheureusement, la plus grosse erreur que tu es faite, ça été de partir de la maison a 17 ans et de me laisser seule. Seule avec ce tyran, nommé Nicolas. Dans cette lettre, tu ne trouveras pas le mot p-a-p-a pour désigner cet homme si horrible. Tu es parti et tu m'as laissé. Avec lui. Et avec cette femme qui observait mais ne disait rien. Les deux premières années, tout s'est « bien passé ». Je veux dire par là qu'il n'y a pas eu un mot plus haut que l'autre qui m'était destinée, ni une main qui a volé au niveau de mon visage. Rien de tout ça. Mais tout a changé quand je suis entrée en cinquième. Pourquoi ? Je ne sais pas. Il a commencé à boire et un jour, je suis rentrée dix minutes plus tard que les autres jours. Il m'a giflé en me criant que je n'étais qu'une bonne à rien, que je ne ferai rien de ma vie et que je finirai comme mon crétin de frère : à trainer avec des voyous. Je t'ai toujours défendu et lui ne faisait que de te dénigrer. Il disait qu'il irait te défoncer, te frapper comme il le faisait avec moi, qu'il aurait dû le faire bien avant. Moi, je voulais pas. Je ne voulais pas qu'il te fasse de mal. Je lui ai interdit de s'approcher de toi. Par « chance », il m'a écouté. J'en ai payé la contrepartie. Je me réconfortais en me disant que je prenais pour toi et que ces coups-là, tu ne les aurais pas. Je n'ai jamais regretté.
La première fois, j'ai laissé couler. Je me suis dit que c'était un excès de colère comme ça arrive à tout le monde. Le problème ? ça a recommencé le jour suivant et le jour d'après puis tous les soirs. J'avais l'impression que ça montait crescendo, que chaque soir était pire que le précédent. Plusieurs fois, je me suis retrouvée avec des bleus et des cicatrices. C'était dans ces périodes que je ne venais pas te voir.
Après, j'ai commencé à venir dormir chez toi prétextant qu'ils étaient partis diner chez des gens ou que je voulais être au calme. Tout un tas d'excuses toutes fausses. Chez toi, avec toi, j'étais bien. Je me sentais en sécurité. Comme je ne l'avais jamais été. Le premier à avoir été au courant, ça a été Idriss. Je t'en supplie, ne lui en veut pas de n'avoir rien dit. Je lui ai fait promettre. Alors, il a commencé à m'aider, à soigner mes blessures. On passait de plus en plus de temps ensemble. Je sentais que notre relation n'était pas la même que celle que j'avais avec Hakim. On était plus proches, plus complices. Je me sentais bien avec lui. Je me sentais en sécurité. Chaque fois que ce tyran me frappait, je l'appelais et on se voyait.
La première fois qu'on s'est embrassé, j'ai regretté. J'ai aussitôt pensé à toi et je savais déjà que je faisais une grosse connerie. Mais le problème c'est que le baiser m'a hanté toute la journée et les jours suivants. Je savais déjà que le pire était en train d'arriver : je tombais amoureuse d'Idriss, ton meilleur ami de six ans mon aîné. Pourtant, j'étais attirée par lui comme par une force invisible. J'étais incapable de lutter. Nous avons donc commencé une relation secrète. Il y a eu des hauts et des bas. Notamment un bas au nouvel an de l'année 2013, je l'ai quitté. Je ne pouvais plus faire semblant devant toi et les autres. C'était trop dur.
On a été séparé pendant une semaine puis on s'est remis ensemble lorsqu'il m'a retrouvé en pleurs et défigurée après un énième défoulement de Mr Samaras. Cette fois-là, il m'a emmené à l'hôpital. J'ai dû mentir sur les circonstances, évidemment.
Puis il y a eu cette tragique journée du 09 juin 2013, le jour de mon accident. Je t'ai raconté que j'avais traversé sans regarder et c'est tout. La vérité, c'est que c'est loin d'être tout. Revenons dix minutes plus tôt. Je rentrais du lycée. Il avait bu, bien trop bu. Il avait le visage rouge, colérique avant même que je ne franchisse le seuil. Il s'est aussitôt avancer vers moi et m'a saisi le bras. Il n'a pas dit un mot et m'a balancé contre le mur du salon. J'étais étourdie mais encore consciente. Il aurait peut-être mieux fallut que non car pour la première fois depuis que ça avait commencé j'avais décidé de lui tenir tête et de répliquer. Quand je me suis redressée, je me suis jetée sur lui, je lui ai craché au visage et lui ai mis un coup de pied dans son précieux paquet. Malheureusement, sa rage a redoublé et quand j'ai compris que ce qui allait suivre était pire que tout ce que j'avais vécu, je me suis mise à courir et j'ai quitté l'appartement. J'ai dévalé les escaliers, lui sur mes talons. Une fois dans la rue, je pensais que j'étais en sécurité, qu'il n'allait plus suivre mais apparemment il s'en fichait. Il me poursuivait. A un moment, j'ai voulu le semer pour de bon alors j'ai traversé. Une voiture arrivait, je ne l'ai pas vu. J'ai fini sur le capot puis sur la route. Lui ? Il s'est enfuit. C'est un passant qui a appelé les secours.
Désolée de t'avoir menti. C'était trop dur. Je n'avais pas le courage. Je n'ai jamais eu le courage de tout te dire.
Enfin, quelques semaines après mon réveil, un médecin est venu me voir pour me dire que je devrais aller dans un centre de rééducation pour mes jambes. Je lui ai demandé si il y en avait un en Grèce et il m'a dit que oui, qu'il était très bien. Alors je suis partie. Sans rien dire. En tout cas, pas la vraie raison. J'avais honte. Tu te demanderas sûrement, pourquoi la Grèce ? Tout d'abord parce qu'il y a Giagia et que je savais que pour remonter la pente, il n'y aurait pas meilleure alliée qu'elle. Mais surtout parce que je ne voulais pas que vous me voyiez ainsi. Faible. Je ne voulais pas que vous soyez aux petits soins avec moi, que vous vous inquiétiez pour moi.
Je suis vraiment désolée pour tout ce que je t'ai fait subir et je n'ose pas imaginer comment tu te sens après avoir lu cette lettre. Sache que je t'aime et que je t'aimerai toute ma vie, même si tu décides de ne plus me voir après tout ça.
Iris.
PS : Tu peux aller dans ma chambre à la coloc', sous mon lit il y a un sac en papier avec un carnet à l'intérieur. Dans ce carnet, j'y ai écrit tout ce que j'ai subi. Il y aussi des photos. Je n'ai jamais eu le courage de l'apporter à la police. Désolée.
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La sœur de mon frère, c'est ma sœur // FRAMAL [TOME 1]
FanfictionIris Samaras est la sœur du célèbre rappeur Nekfeu. En 2013, à la suite d'un drame, elle décide de partir se ressourcer et se retrouver en Grèce, son pays natal, le pays de son cœur. Mais lorsqu'elle revient sur Paris, deux ans plus tard, elle ne s'...