MATTHIEU

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J'emmenais Isaac chez moi pour chercher quelques affaires. Je montais silencieusement dans ma chambre et je remplis un sac d'indispensables. Isaac n'arrêtait pas de marcher de long en large.

-Arrête de faire ça, tu me stresses.

Il s'arrêtait immédiatement pour recommencer cinq minutes après. Je lui jetais un regard noir.

-J'y peux rien, je suis stressé.

-Finis mon sac, ça t'occupera. Je vais écrire une lettre pour mon père.

Je m'assis à mon bureau et commençais à écrire :

Papa,

Désolé que tu l'apprennes comme ça mais je suis parti. Appelle ça une fugue, si tu veux. Isaac a eu une grave embrouille avec ses parents, c'est très sérieux et il a besoin de s'éloigner d'ici. C'est mon meilleur ami, je ne pouvais pas le laisser seul. Je ferais attention, je te le promets. Je reviendrais vite. Dis à Charlie qu'elle me fait chier mais qu'elle va me manquer. Toi aussi, tu vas me manquer. Ne t'inquiète pas, je suis grand, je sais me débrouiller. Matthieu

Je montrais la lettre à Isaac.

-Ton meilleur ami, hein ?

-J'allais pas lui annoncer ça comme ça, t'es fou.

-Je peux ajouter un truc ?

Je lui tendis la lettre et un stylo.

Monsieur Boisseau,

Vous avez de la chance d'avoir un fils comme Matthieu. Je vous promets de vous le ramener sans une égratignure. Désolé. Isaac.

-On peut y aller maintenant. T'es sûr de vouloir faire ça ?

-Si tu y vas, je te suis, ai-je répondu.

Tout à coup, Isaac posa ses lèvres sur les miennes.

-C'était pour quoi, ça ?

-Parce que t'es vachement courageux comme gars.

Je lui souris en retour et nous sortîmes de l'appartement sans faire de bruit.

-J'ai un peu d'argent mais on n'ira pas loin avec ça, ai-je annoncé à mon ami.

-T'inquiète, j'en ai piqué pas mal.

-T'as fait quoi ?

-Oh, ça va. J'ai bien mérité un peu d'argent de poche.

Je le fixais, incrédule.

-Quoi ? Tu vas pas me faire une crise de moralité. Je dois te rappeler ce qu'ils m'ont fait ?

-Ça risque pas d'arranger les choses...

-Ah non mais ça, j'y pense même pas. Il n'y a plus rien à faire pour régler les choses avec eux.

Je me tus.

-C'est la vérité, Matthieu. Je sais que t'aimerais que tout s'arrange mais on n'est pas dans un conte de fées, là. Tu as peut-être un père génial et une petite sœur super cool, c'est pas le cas pour moi. J'ai plutôt hérité d'une mère qui s'en fout de tout, d'un père violent et d'un frère qui a pris exemple sur eux.

-Arrête de faire comme si tout allait bien pour moi. D'accord, on ne m'a jamais frappé mais ma mère ne m'a jamais aimé, elle est partie sans jamais prendre de nouvelles de moi.

-Désolé. Je sais que tu souffres aussi.

-Non, c'est moi. Je suis égoïste, c'est toi qui es obligé de fuguer. Tu as beaucoup plus souffert que moi, je le sais.

-Et si on arrêtait de se lamenter sur nos vies pathétiques ? proposa Isaac.

-Excellente idée. On va où comme ça ?

-Je sais pas. J'avoue que je n'ai pas trop réfléchi en partant.

Je lui lançais un regard en coin.

-Eh, s'est-il justifié, pour ma défense, j'avais pas prévu que tu serais de la partie.

-Tu pensais sérieusement que j'allais te laisser partir tout seul ?

-On est ensemble depuis, quoi ? Un jour. Désolé d'avoir douté de ta passion pour moi.

-Mais je t'emmerde. Pour tout t'avouer, je ne me voyais vraiment pas continuer tranquillement ma vie en te sachant dehors. T'aurais pu mourir, je l'aurais jamais su.

-Ouah, c'est super joyeux dis donc. Mais j'ai compris l'idée. Merci.

Je lui souris en retour.

-On a assez d'argent pour prendre le bus ? ai-je demandé. Ce serait mieux d'aller dans la ville la plus proche.

-Ne t'inquiète pas pour ça, j'ai pris pas mal d'argent. On a trois cent euros environ.

-J'en avais que trente, tu m'excuseras, petit gosse de riche.

-Faut bien profiter des points positifs.

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