MATTHIEU

14 1 0
                                    

C'était magique. Ok, ça va sembler un peu niais mais c'était clairement mieux qu'avec n'importe qui avec qui j'avais couché auparavant. Peut-être parce que c'était des filles. Peut-être parce que je ne les aimait pas vraiment.

Je regardais Isaac dormir. Il était tellement mignon. Il pouvait paraître si innocent, il n'avait pas beaucoup d'expérience niveau sentimental et en même temps, il avait vécu tellement de choses qui l'avaient endurcies. J'adorais ce contraste chez lui.

-T'as fini de me mâter, a-t-il chuchoté sans ouvrir les yeux.

-Il fut un temps où c'était moi qui disait ça.

-Il fut un temps où je te trouvais désirable.

-Désirable, hein ? Et je dois en déduire que ce n'est plus le cas ?

-Exactement. On a couché maintenant c'est fini. Tu peux partir, bye.

Il n'était pas croyable.

-Tu sais, il y en a qui t'en voudrait de plaisanter avec ces choses-là.

-Mais pas toi.

-Non, pas moi. T'en as de la chance.

Il a hoché de la tête lentement.

Soudain, il s'est redressé sur ses coudes et m'a regardé d'un air grave.

-Ouh, les choses sérieuses arrivent, ai-je commenté à voix basse.

-Je sais que je l'ai déjà dit mais tu peux partir, tu sais. Quand tu veux. Tu as une famille qui t'aime là-bas. Contrairement à moi.

-Je vais t'expliquer un truc. Chez moi, je me suis jamais senti... chez moi, tu vois ? Non, forcément tu vois pas, toi t'as des raisons de pas te sentir chez toi. Depuis que ma mère est partie, enfin bon, tu connais l'histoire.

-Celle qui t'as fait pleurer sur un banc ?

-C'est ça, ai-je confirmé en repensant à ce moment. C'est rare que je pleure comme ça devant un... quelqu'un que je connaissais pas bien à l'époque. Ouais, ça fait du bien de partir. Mon père me reprochera toujours son départ. Ma soeur me reproche nos déménagements. L'ambiance peut paraître géniale et tout mais... en vrai, il y a beaucoup de non-dits dans notre famille. Quelque chose nous pèse à tous. Donc même si je suis parti pour être avec toi de base, je ne rentrerais pas. Pas encore. J'ai besoin de cet éloignement.

Il a hoché la tête en signe de compréhension.

-On aurait pu grandir normalement, a-t-il dit. Des fois, je ne peux m'empêcher d'être jaloux. Peut-être que Sacha a des parents divorcés, que la mère de Nathan a un cancer, que Evan est entouré de frères et soeurs et qu'Antoine est lui, fils unique. On a tous nos emmerdes. Mais ils ont eu une enfance, une vraie. Quelque chose qu'on n'aura jamais nous. Et c'est pas juste parce qu'on la méritait autant qu'eux.

J'ai acquiescé en silence.

-On devrait sortir, ai-je suggéré. Visiter un peu Paris.

Isaac a enfoncé sa tête dans l'oreiller en ronchonnant.

-Allez bouge ton joli petit cul, ai-je fait en me levant du lit.

Mon copain m'a regardé avec un sourire en coin et s'est extirpé difficilement de la couette.

-Je sens qu'on va pas très bien dormir, a-t-il commenté.

Effectivement, vu la qualité du matelas, ce n'était pas gagné.

Nous sommes donc sortis de l'hôtel. On a marché quelques minutes pour arriver dans un quartier un peu plus animé de la capitale. Nous nous sommes retrouvés, après plusieurs minutes de marche, devant le Pont des Arts.

-Un des ponts les plus connus de Paris, a présenté Isaac. Célèbre pour ses cadenas d'amour.

-Si on était un couple romantique on ferait pareil.

-Alors, déjà, c'est pas très bon pour l'environnement et c'est beaucoup trop lourd, ils les ont tous enlevés.

J'ai levé les yeux au ciel.

-T'es définitivement pas romantique.

Il m'a souri en m'embrassant.

-Pour toi, je suis prêt à l'être. Au moins un petit peu.

Je mis quelques secondes à réaliser que c'était la première fois qu'on s'embrassait en public. Dans une rue, avec du monde autour, comme un couple normal, quoi. Soudain, je ne pus m'empêcher de sourire.

Nous avons encore déambulé dans les rues de cette belle ville jusqu'à la tombée de la nuit. Pour dîner, nous sommes allés dans un petit restaurant pas trop cher et nous sommes finalement rentrés à l'hôtel.

Lost BoysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant