ISAAC

19 1 0
                                    

Je remarquais tout de suite en arrivant dans l'appartement de Matthieu que ses parents ne devaient pas être très riches. C'était tout petit mais étrangement, je n'y sentais beaucoup mieux que dans ma grande maison. C'était humain ici, au moins.

-On sera tranquille, m'a annoncé Matt. Mon père travaille et ma petite-sœur est chez une amie.

-Je peux te poser une question ?

-Fais toi plaisir.

-Tu parles souvent de ton père et de ta sœur mais tu n'as jamais dit un mot sur ta mère. Y a une raison ?

-Une plutôt grosse, ouais. Elle est partie quand j'étais gosse. Pour moi, elle existe plus.

-Je suis désolé. Ça a dû être dur.

-Mon père s'est très bien débrouillé avec nous mais c'est vrai que j'ai toujours ressenti un manque. Et c'est encore pire du côté de Charlie.

-Ouais, c'est normal... On a des familles assez tordues, hein.

-Parle pour toi. A part ma mère, tout va très bien.

-Ouais, ouais, et c'est pour ça que tu pleurais l'autre fois, hein ?

-Tu marques un point.

J'ai éclaté de rire. Je ne m'attendais pas à ce qu'il poursuive mais il avait visiblement envie de se confier.

-En fait, c'était mon père. Il m'a toujours un peu reproché le départ de ma mère, même s'il le montre rarement. Des fois, ça sort tout seul. Et ça me fait me sentir vraiment mal.

-Et pourquoi ce serait ta faute ?

-Elle ne voulait pas d'enfant. Elle m'a toujours détesté.

-Mais pourtant tu as une petite sœur. Tu ne devrais pas te sentir responsable, tu sais.

-Deux enfants, c'était sûrement trop pour elle. Je commençais à devenir grand, elle a pas supporté. Enfin, on est probablement mieux sans elle.

-Je suis sûr qu'elle pense à toi. C'est une mère, elle t'aime forcément. Mais peut-être qu'elle n'était pas prête à assumer une aussi grande responsabilité. Pas à ce moment-là.

-Et peut-être que moi, j'étais pas prêt à perdre une aussi grande part de ma vie comme ça.

J'ai baissé les yeux.

-Merci, Isaac.

Je l'ai regardé, surpris.

-Pour quoi ?

-D'être là, tout simplement. Ça fait du bien d'avoir quelqu'un à qui se confier, tu peux pas savoir.

-Je sais. Pour moi, ça éclate de manière plus brusque mais ça m'a fait du bien de te dire tout ça, en cours, tout à l'heure.

Il m'a souri.

-J'ai eu peur que tu me fasses la gueule pendant trois mois.

-Abuse pas, ai-je fait en rigolant.

-Arrête, t'en aurais été capable.

-Bon, ok, j'avoue.

Soudain, j'entendis la porte d'entrée s'ouvrir. Une adolescente que je devinais être la sœur de Matthieu, entra.

-Salut, a-t-elle fait. Je ne savais pas que Matt avait invité un ami. Ni même qu'il en avait un.

-T'as pas tort, je sais vraiment pas ce que je fais là, ai-je rétorqué. Il est vraiment chiant, hein ?

-Ouais, à mort.

Matthieu m'a regardé d'un faux regard noir.

-Ah, tu t'allies avec l'ennemi ? Espèce de traître, s'est-il exclamé.

-Y a que la vérité qui blesse, est intervenue Charlie.

-Je ne peux que lui donner raison, ai-je affirmé.

-Ah, ils sont tous contre moi ! Au secours !

Nous avons tous éclatés de rire.

-Bon, sur ce, je vais vous laisser en tête à tête, moi, a dit Charlie en se dirigeant vers, je supposais, sa chambre.

-A toute, la chieuse, a crié Matthieu.

-Faut aussi que je te laisse, ai-je annoncé. Même si rien qu'à la pensée de revenir chez moi pour voir mon hypocrite de frère et mes faux-culs de parents, j'ai envie de vomir.

-Il faut bien rentrer à un moment et affronter la bataille, pas vrai ?

-T'as tout compris. C'était cool en tout cas. A demain, Matthieu Boisseau.

-A demain, Isaac Ferrer.

Lost BoysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant