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[Merci pour les commentaires ! ]


 - Maman, je voudrais changer de lycée. 

Elle soupira, baissa les yeux, se tordit les doigts. Non, ça n'allait pas. Elle ne pouvait pas lui dire cash comme ça, tout de même, il fallait l'enrober, la préparer psychologiquement !

Leila regarda à nouveau son reflet. Elle avait des cernes violettes sous les yeux que le maquillage de Chloé, pendant la pause de midi, n'avait pas réussi à cacher. Elle avait séché son dernier cours de maths de la semaine pour aller à l'infirmerie. Personne ne s'en serait remis en salle des profs s'ils l'avaient su. Leila Rose-Becker, sécher un cours de maths ! Elle se rappelait encore de la tête de l'infirmière lorsque cette dernière était venue voir comment elle se sentait au bout d'une demie heure et qu'elle l'avait vue en train de résoudre des équations.

- Maman, réessaya-t-elle, il y a quelque chose dont je dois te parler...

C'était tellement cliché, elle n'en revenait pas !

Elle détourna la tête du miroir, hésitant une dernière fois. Non, c'était la bonne décision. La meilleure des cartes qu'elle avait encore en main. Elle avait passé la semaine à y réfléchir. Une semaine absolument atroce, encore pire qu'en mars, car c'était absolument sa faute, et aucune de ses amies n'avait su trouver les mots pour lui redonner l'espoir. Car elle avait été responsable, raisonnable et mature - avec quatre mois de retard.

Elle s'en voulait de craquer si vite. Une semaine ne s'était pas encore écoulée, et pourtant elle avait l'impression que ça faisait des lustres. Sérieusement, comment avait-elle osé croire qu'elle parviendrait à tenir plusieurs mois ? J'ai dit qu'il fallait qu'on ne se voie pas pendant plusieurs mois, j'ai jamais dit que je tiendrais le coup.

Elle prit une grande inspiration et soupira profondément. Elle ouvrit la bouche et recommença.

- Maman...

Un bruit de clés dans la serrure, au rez-de-chaussée, fit mourir les mots dans sa gorge. Vite, il fallait qu'elle trouve une idée, si sa mère la voyait dans cet état elle lui demanderait immédiatement ce qui n'allait pas, et elle n'arriverait jamais à lui parler. Elle ferma la porte de la salle de bains, la verrouilla et fit couler l'eau de la douche. Elle hésita, regardant avec culpabilité l'eau s'évacuer inutilement, puis se déshabilla et entra à l'intérieur. Autant faire d'une pierre deux coups.

En sortant de la douche quelques instants plus tard, elle entendit sa mère ouvrir son armoire. Elle chantonnait, elle avait l'air de bonne humeur. C'était le bon moment. Elle s'habilla, se coiffa en prenant horriblement son temps puis, rassemblant tout son courage, elle sortit dans le couloir et frappa à la porte de la chambre de ses parents.

- Oui ? répondit sa mère.

Leila hésita. Elle pouvait encore reculer, si elle le voulait. Mais avait-elle le choix ? Ouais. Mais les autres options sont pourries. Elle ouvrit la porte, et sa mère leva les yeux vers elle. Immédiatement, elle sentit une boule d'angoisse l'envahir. Il lui sembla que les muscles de ses yeux et de son cou luttaient et l'empêchaient de redresser son regard.

- Tout va bien Leila ?

Son ton était anxieux. Tu m'étonnes, j'ai vu ma tronche dans le miroir.

- Maman... Je voulais te demander...

Leila avala douloureusement sa salive, qui lui semblait avoir pris dans sa gorge comme du ciment. Une voix dans sa tête cria : Demande lui l'autorisation de sortir en boîte, retourne dans ta chambre, va-t'en !

Sa façon d'aimer les mathsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant