Sa façon d'aimer les maths

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« It's a beautiful day ! The sun is shining, I feeeeel good, and noooo one's gonna stop me noooow ! »

Leila émit un son à mi-chemin entre le gémissement et le grognement, se retourna dans son lit et enfouit la tête sous son oreiller, étouffant la voix de Freddie Mercury. J'y crois pas, au beautiful day. Ça ressemble à une arnaque, marmonna mentalement Leila alors que le réveil retentissait pour la troisième fois,  remplissant l'air de sa chambre du son du synthétiseur.

Vingt minutes plus tard, elle essayait de redonner une apparence humaine à ses cheveux tout en enfilant un jean en sautillant. Elle pesta devant le miroir puis décida que de toute façons, entre ses boucles qui ne savaient pas tenir en place et le casque qui allait les écraser, il était inutile d'essayer de les coiffer avant d'arriver au lycée.

Une fois prête, elle retourna dans sa chambre et plongea sous sa couette pour récupérer son portable. Elle avait reçu trois sms, entre-temps.

« Bonne rentrée ma chérie ! Bon courage pour cette dernière année au lycée ! ».

C'était sa grand-mère. Elle ouvrit le second.

« T'es réveillée Ginger ? Tu sais qu'on a cours aujourd'hui ! »

Elle répondit au message de Raphaëlle par un smiley représentant un visage endormi. Elle lut enfin le dernier, qui venait de Cédric.

« Je passe chez toi pour qu'on arrive ensemble ? »

Un grand sourire étira ses lèvres et elle répondit immédiatement par l'affirmative.

Elle descendit dans la cuisine en essayant de ne pas faire trop de bruit. Ses parents dormaient encore tous les deux, ce que Leila trouvait sacrément injuste. Les parents ne devraient jamais avoir le droit de rester au lit quand leurs enfants sont debout, ça devrait faire partie de ces règles universelles à ne briser sous aucun prétexte. Ils auraient dû être là pour lui servir son petit-déjeuner et lui souhaiter bon courage. Après tout, ce n'était pas n'importe quel jour, c'était la rentrée ! Ils auraient même dû se tenir prêts à l'emmener à l'école (ce qu'elle aurait vigoureusement refusé). C'est vrai quoi, ils faisaient ça avant !

Mais elle avait grandi, et elle avait quand même l'impression de s'être fait avoir.

Elle ouvrit le placard et prit son mug préféré, un cadeau de Cédric pour fêter les résultats du bac de Français. La tasse était noire et décorée de lignes blanches représentant la molécule de la théobromine, le composé actif du chocolat. Elle versa dedans trois cuillerées de chocolat en poudre tout en se demandant rêveusement si les molécules avaient vraiment cette tête-là et comment elles arrivaient à donner un aussi bon goût au cacao. Cédric prétendait que le goût ne venait que du sucre, il n'y connaissait décidément rien au chocolat.

Il faisait beau dehors (Freddie ne s'était pas trompé), c'était un temps à prendre un petit déjeuner à midi dans le jardin, pas à passer la journée enfermée dans une des salles grises de son lycée. À travers la porte-fenêtre qui donnait sur leur petit jardin, Leila voyait le cerisier du voisin montrer des signes avant-coureurs de l'automne.

Ouaip, c'était bien la rentrée.

En entendant le bruit d'un moteur de scooter s'arrêter devant chez elle, elle attrapa vivement un bout d'essuie-tout pour enlever le chocolat qu'elle avait sur les lèvres, juste avant que Cédric n'apparaisse derrière la porte vitrée. Elle sourit et rougit en même temps, puis se leva pour lui ouvrir.

Le garçon entra, les lèvres étirées en un grand sourire ravi.

- Salut ma jolie rousse !

Leila se hissa sur la pointe des pieds et embrassa le visage que Cédric penchait vers elle. En temps normal, elle lui arrivait tout juste au menton, mais comme elle était pieds nus dans la cuisine et lui en baskets dans l'encadrement surélevé de la porte, la différence était encore plus flagrante. Elle passa sa main dans ses cheveux bruns fraîchement coupés et ressentit un petit frisson lorsqu'il posa ses mains sur ses hanches et la serra contre lui.