Leila courut à toute vitesse dans les couloirs, son lacet presque défait manquant de la faire chuter à chaque pas dans l'escalier qui menait au hangar. Elle avait déjà sa clé à la main ; elle se rua jusqu'à son scooter, enfila son casque sans même prendre la peine de l'attacher et partit en trombe sur le boulevard en laissant derrière elle un nuage de poussière. Elle n'était pas repassée par son casier prendre ses affaires, elle ne portait qu'un petit pull et n'avait pas d'écharpe sous sa veste, mais elle avait bien autre chose à faire que de penser au froid.
Une entité supérieure devait sûrement suivre son aventure avec intérêt, car tous les feux passèrent au vert à son approche, et elle ne ralentit pas un instant. Si elle avait eu le permis, elle aurait sans doute perdu des points ce jour-là.
Elle souhaita presque avoir un accident, s'écraser sur le sol, perdre la mémoire et oublier l'énormité qu'elle venait de dire. Elle avait la bouche sèche, le cœur qui battait à cent à l'heure, et la petite voix dans sa tête qui ne cessait de hurler qu'elle était la pire crétine que le monde n'ait jamais porté. Elle se sentait si mal ! Elle se sentait si coupable ! C'était pire, presque, que de l'avoir insultée ou frappée ! Merde, mais qu'est-ce qui m'a pris ?
Leila arriva enfin dans sa rue, tourna à l'angle de sa maison et freina brusquement dans l'allée, manquant presque de laisser tomber son scooter en s'arrêtant sur le gravier. Elle expira profondément et se rendit compte qu'elle avait retenu son souffle pendant presque tout le trajet. Elle s'assit sur la terre gelée et s'adossa à sa roue avant, tentant de reprendre le contrôle de sa respiration. Elle avait l'impression d'avoir sprinté tant ses poumons, ses muscles, ses bras lui faisaient mal. Ses yeux étaient couverts de larmes, elle ne parvenait pas à s'arrêter de pleurer, elle n'arrivait pas à comprendre comment elle avait pu dire une chose pareille. En pleine classe. À Pellarin.
Il lui fallut quelques minutes pour retrouver le contrôle de son corps et se remettre à bouger. Le froid la mordit vivement lorsqu'elle ôta son casque, et elle réalisa que ses mains nues étaient glacées et douloureuses. Elle fouilla dans son sac avec des gestes rendus saccadés par ses doigts engourdis. Elle n'arrivait pas à mettre la main sur ses maudites clés.
Un cri résonna dans le silence de la petite rue. Leila sentit son cœur se figer. On l'appelait. Une voix horriblement familière l'appelait.
Elle se releva en vacillant et vit Julie Pellarin, dans sa petite voiture bleue, penchée vers la fenêtre côté passager. Sa prof connaissait son adresse ! Quelle idiote elle avait été !
- Leila, Leila ! Monte. S'il te plaît.
L'ordre était direct et n'appelait pas à la négociation. Elle hésita un instant et recula d'un pas. Son coeur battait à toute allure. Devait-elle entrer et se barricader chez elle, ou bien affronter la colère de Pellarin ? Qu'allait-elle lui dire ? Nom d'un chien, quelles allaient être les conséquences d'une telle connerie ?
Non sans une trouille bleue, les lèvres martyrisées par ses dents qui claquaient, Leila se dirigea lentement vers la voiture, ouvrit la portière et s'assit sur le siège passager en essayant de cacher le tremblement de ses mains. Pellarin redémarra sans un mot puis s'arrêta sur une place de parking trois rues plus loin. Cette fois, elle coupa carrément le contact, puis se tourna vers Leila.
- Leila, commença Pellarin avec un ton de prof moralisateur.
Les mots explosèrent de la bouche de Leila sans laisser le temps à l'enseignante de finir sa phrase.
- Je suis désolée, je suis vraiment désolée, je n'aurais pas dû. C'était complètement inapproprié. Je n'ai pas réfléchi. Je n'avais... je n'avais pas du tout l'intention de dire ça. On fait comme s'il ne s'était rien passé ? dit-elle d'une traite sans reprendre son souffle.
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Sa façon d'aimer les maths
General Fiction[COMPLÈTE] Romance lesbienne. Craquer sur une prof, ça nous est tous déjà arrivé. C'est en tout cas ce qu'affirment les amis de Leila. Quand on est matheuse et que la nouvelle prof de maths des Terminale est passionnante, jeune et si jolie, l'équat...