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Florian avait été parfait. Comme toujours.

Le regard de Leila à la vue de la table du petit-déjeuner montrait qu'il avait une fois de plus pris la bonne décision. C'était lui le séducteur, lui qui charmait les filles à sa place. Il avait de la confiance en soi pour deux, et il semblait toujours savoir ce qui allait plaire à une fille. Combien de rendez-vous avait-il sauvé par sa présence, ses conseils, ses compliments alors qu'elle osait à peine faire le premier pas ? Si Julie avait été intéressée par les garçons, ou lui par les filles, elle aurait eu à redouter une concurrence sévère.

- Alors ? murmura-t-il à son oreille quand elle passa près de lui, en bas de l'escalier.

Julie n'eut pas besoin de demander de quoi il parlait. Elle le savait très bien. Elle s'assit à la table du petit-déjeuner, en face de lui et Leila à côté d'elle. Il avait son sourire de Florian, et sans émettre un son, elle répondit en remuant les lèvres, les sourcils plus froncés que jamais : «N'essaie même pas ».

Il était beaucoup moins parfait, tout d'un coup. Il avait continué de l'asticoter silencieusement, mais Leila s'était réapproprié son attention et elle avait cessé de lui répondre. Sa petite lycéenne était en jean et haut de pyjama, et elle se demanda sombrement si c'était de la perversité ou de la maladie que de trouver ça mignon. Mais le regard, dans ses yeux turquoise qui la fixaient, n'était définitivement pas celui d'une enfant.

Julie ne parla pas beaucoup pendant le petit déjeuner. Bientôt, elle allait devoir partir travailler, partir au lycée, et laisser derrière elle Leila et cette soirée et nuit surréalistes. Quand est-ce qu'elle pourrait profiter à nouveau d'une nuit comme celle-là ?

Jamais. Pas avant juillet. C'était vraiment irresponsable de notre part, et si jamais Leila refait le coup, je la renvoie chez elle immédiatement.

Elle soupira. Elle ne savait pas ce qui allait être le pire : rompre cette promesse ou la tenir.

Peu de temps après, alors qu'elle vérifiait dans son sac posé sur son bureau qu'il ne lui manquait rien pour la journée et que Leila achevait de se préparer dans la salle de bain à l'étage, Florian l'attrapa par le bras et la tira dans la cuisine. Il ferma la porte puis se tint les poings sur les hanches.

- Qu'est-ce que tu fais ? s'écria-t-il à voix basse. C'est ma présence qui t'a gêné ce matin ou quoi ?

- J'allais très bien ce matin, merci, répondit-elle assez sèchement.

- Tu plaisantes ? Tu n'as presque pas dit un mot, tu ne l'as presque pas regardée ! Ça s'est mal passé ou quoi ? Non, ça ne s'est pas mal passé, poursuivit-il en secouant la tête. Elle est folle de toi, c'est évident.

- On n'a pas couché ensemble, si c'est ce que tu veux savoir.

Le garçon leva les yeux au ciel, comme exaspéré par la réponse crue de sa colocataire.

- Tu sais que si on te choppe, ça ne changera pas grand chose que vous ayez couché ensemble ou pas. Franchement, tu crois vraiment qu'ils te croiront ?

C'était une question rhétorique, Julie ne répondit pas.

- En tout cas, change d'attitude. Détends-toi. Relax un peu. Sinon Leila va finir par croire que c'est elle qui a un problème.

- Ça m'étonnerait. Elle est beaucoup trop intelligente pour ça.

- Ouais enfin même avec la plus grande maturité du monde, si tu lui parles pas elle...

 - J'ai pas dit mature, j'ai dit intelligente, coupa Julie. La maturité c'est un jugement de valeur.

Leur conversation s'interrompit brusquement, car les bruits de pas indiquaient que Leila descendait les escaliers. Julie soupira. Evidemment que Florian avait raison. Mais comment se comporter normalement, alors que leur relation était interdite et devait demeurer secrète encore pendant des mois ? Arriverait-il à se relaxer, lui ? Tu parles, à l'heure qu'il est il serait déjà en train de draguer le flic qui lui passerait les menottes.

Sa façon d'aimer les mathsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant