Chapitre 17 : Coincée

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« En 1217, des traqueurs de sorcières emprisonnèrent une sorcière Vikraut. Cependant, le lendemain matin, la cellule fut retrouvée vide. D’où le dicton suivant : "Mieux vaut tuer une sorcière par trois fois que de l’enfermer une seule, car nul ne peut soumettre une sorcière." »

Sorcières, sorciers et mages, Altus Polydarmus, 1618

 

Octobre. J’ai rangé mon ancien journal intime. Aujourd’hui, j’écris pour la première fois dans mon Livre des Ombres. Je ne sais pas si je m’y prends comme il faut. Je n’en ai jamais vu d’autres. Mais je tenais à laisser une trace de ce qui m’arrive cet automne, cette année. Ma renaissance. Ma renaissance en tant que sorcière. Je ne me suis jamais sentie aussi heureuse, ni aussi effrayée.

 

— C’était vraiment incroyable, me suis-je enthousiasmée en ouvrant mon yaourt. Le jardin suivait un tracé en huit rayons, comme la roue des sabbats de la Wicca. Que des plantes médicinales et des herbes aromatiques. Tout ça planté par des bonnes sœurs ! Des bonnes sœurs catholiques !

Tout en prenant une cuillerée de yaourt, j’ai dévisagé tour à tour mes camarades de table.

Nous étions assis dans le self du lycée, et Liam avait commis l’erreur de me demander comment s’était passée la sortie, organisée par la paroisse – sa famille fréquente la même que nous. Et maintenant, j’étais intarissable.

— On ne se méfiera jamais assez des bonnes sœurs, a lancé Liam avant d’avaler une gorgée de milk-shake.

— C’est fou comme la Wicca imprègne notre monde, a ajouté Joyce, les yeux écarquillés.

Elle a tamponné ses lèvres avec sa serviette en papier, puis elle a repoussé ses cheveux par-dessus son épaule en poursuivant :

— Maintenant que j’en sais un peu plus, je repère des signes absolument partout. Ce week-end, ma mère parlait d’aller à Red Kill acheter une citrouille pour Halloween, et j’ai soudain compris d’où venait cette tradition.

— Salut, a lâché Louis d’une voix ensommeillée. Quoi de neuf ?

Il s’est affalé sur une chaise près de Salomé. Ses yeux étaient rouges et ses longues boucles toujours aussi emmêlées.

Salomé lui a jeté un regard dégoûté avant de se décaler comme par peur qu’il ne salisse sa jupe écossaise et son chemisier blanc immaculés.

— Ça ne t’arrive jamais de ne pas te défoncer ? lui a-t-elle demandé.

— Hé, j’ai rien fumé, a-t-il rétorqué. Je suis juste enrhumé.

À voir sa tête, j’ai deviné qu’il disait vrai : s’il n’avait pas les idées claires, seuls ses sinus bouchés en étaient responsables.

— Louis a renoncé à la fumette, a annoncé Harry d’un ton posé. Pas vrai, Louis ?

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