25. Dédale infernal

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Sanji porta son doigt enveloppé de sauce à sa bouche avant de se figer lorsque la crème toucha sa langue. Il abaissa immédiatement sa main et se dépêcha de la rincer, jetant un coup d'œil au sabreur occupé à disposer les premières brochettes sur la table de la cuisine derrière lui. Zoro ne sembla pas remarquer son manège et le blond reprit lentement la confection de sa sauce.

Après avoir distribué leurs encas à ses amis, Sanji ne se rappelait de rien hormis du fait qu'il avait aperçu la Princesse Serpent sur le Sunny. Lorsqu'il avait repris ses esprits, la majorité de l'équipage paraissait aussi déboussolé que lui et Jinbei et Zoro leur avaient expliqué ce qu'il s'était passé, de l'attaque surprise dont ils avaient été victime jusqu'à l'affrontement entre la pirate Kuja et le chirurgien de la mort qui avait subitement débarqué.

Le cuisinier avait été transporté à l'idée que la plus belle femme du monde possède un tel pouvoir et par réflexe, il s'était penché pour l'apercevoir alors qu'elle discutait toujours avec Luffy au bas de leur bateau. Aussitôt, il avait commencé à se pétrifier à nouveau et Zoro avait dû le tirer brutalement en arrière pour lui éviter le même destin que précédemment. Chopper les avait rejoints à ce moment-là et avait informé l'équipage que le capitaine des Hearts soignait sa blessure à l'infirmerie. Le petit renne s'était ensuite mis à examiner ses amis pour vérifier que l'attaque de la Princesse Serpent ne leur avait laissé aucune séquelle.

Dès qu'il avait été libéré, Sanji était reparti vers la cuisine, embêté à l'idée de ne pas pouvoir admirer davantage leur invitée mais conscient qu'à chaque tentative, son corps se figeait sans qu'il ne puisse rien y faire. Il avait alors retrouvé ses morceaux de viande pour la plupart déjà découpés et une partie des ingrédients qu'il avait commencé à sortir en prévision des sauces qu'il comptait servir. Cette partie était la plus délicate et le blond n'avait pu s'empêcher de noter l'absence de Zoro à cet instant. Il avait alors compris qu'il serait probablement seul pour terminer ses préparations et il ne pouvait pas en vouloir au sabreur qui avait déjà sacrifié une bonne part de son après-midi simplement pour lui tenir littéralement la main afin qu'il parvienne à se saisir d'un couteau pour faire son travail.

Malgré lui, Sanji n'avait pu s'empêcher de scruter cette pièce qu'il avait toujours considérée comme son domaine, mal à l'aise. Le bretteur avait été d'une aide aussi précieuse qu'inattendue et le blond aurait aimé qu'il soit encore là. Certes, il s'était agi de découper de simples morceaux de viande mais même cet acte anodin l'avait effrayé et Sanji ne se rappelait pas avoir jamais été terrifié par la cuisine, même lorsqu'on s'était moqué de lui à cause de sa passion ou lorsqu'il avait pris des coups lors de son apprentissage.

Après de longues minutes de débat intérieur, il s'était finalement attelé à sortir le reste de ses ingrédients et à insérer la viande déjà prête sur des pics pour les brochettes qui seraient grillées sans marinade. Ses mains avaient un peu tremblé mais il y était parvenu et lorsqu'il n'avait plus pu reculer, il avait pris une grande inspiration pour s'efforcer de calmer les battements trop rapides de son cœur à l'idée de confectionner une sauce barbecue des plus ordinaires.

Alors qu'il ne l'attendait plus, Zoro était soudain entré dans la cuisine et l'escrimeur s'était tout naturellement placé à ses côtés en lui demandant la suite du programme. Sanji lui avait alors montré ses recettes et le sabreur en avait goûté chaque étape au fur et à mesure de leur préparation, participant ainsi à calmer les angoisses de leur créateur.

Au bout de quelques temps, le blond s'était un peu détendu et il avait envoyé le bretteur rassemblé les premières brochettes sur la table pendant que lui terminait la confection de sa sauce béarnaise. Il avait en effet voulu augmenter encore un peu les quantités au cas où l'équipage des guerrières Kuja les rejoindrait et dans la foulée, son habitude de goûter pour vérifier avait réapparu. Mais il n'avait rien senti. Aucune saveur, aucun arôme, pas même le goût relevé du vinaigre ou celui particulier de l'estragon sur sa langue.

A l'ombre de nos cœursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant