53 | Le Prestige

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ALEXANDER

J+ 6

10h23

Hôtel particulier de la Famille Wolff, Florence, Italie

   

Je n'ai pas fermé l'œil de la nuit. Ou peut-être que si. Auquel cas je suis un abruti de poisson parce que je suis certain d'avoir passé chaque putain de secondes de cette maudite nuit les yeux ouverts.

Je m'inquiète bien trop du sort de Julia pour dormir.

J'ai obligé Cece à prendre un calmant dans la nuit car j'ai refusé qu'on soit deux à se morfondre comme des cons. Elle a d'abord bataillé mais a fini par céder en voyant que c'était soit le cachet soit trembler toute la nuit pour quelque chose que, de toute façon, nous ne maîtrisions pas.

Il aurait pu lui arriver mille malheurs que nous n'en aurions pas été au courant pour autant. C'est pour ça que j'ai fini par me résoudre à occuper mon esprit à autre chose. Je sais aussi que Cal et Emi la défendront au péril de leur vie s'il le fallait. J'ai vu leur regard et j'ai compris que nous étions tous prêt au même sacrifice.

On finira tout ça ensemble. Quoi qu'il puisse nous en coûter.

J'enfile mon pull qui traîne au pied du lit et tape mes joues pour me donner un semblant de bonne mine. Je m'étire les bras, me tourne vers ma femme qui dort encore dans notre lit et remonte lentement le drap sur ses épaules nues. Elle ne remue pas dans son sommeil et je souris en passant la main sur sa joue balafrée aussi douce que de la soie.

— Je t'aime, chuchoté-je en m'enfuyant de cette chambre aux moulures trop somptueuses pour ma tenue débraillée.

Je n'arrive pas à assimiler l'idée que cette femme sublime que je laisse derrière moi va devenir mon épouse alors que le foutoir de la situation du moment ne laisserait pas imaginer qu'un mariage se prépare. Je vais l'épouser, Rose se sera vengée et Julia sourira peut-être à nouveau. Je me raccroche à cet espoir coûte que coûte pour ne pas paniquer, prendre une voiture et aller tirer cette putain de blonde exaspérante du trou à rat où ils l'ont indéniablement jeté.

Ruminant mes sombres pensées, j'attends la porte de la chambre d'Haydy s'en m'en être rendu compte. Je crois que j'ai besoin qu'il me rassure de la même manière que j'ai apaisé les tourments de Cece cette nuit. Je veux qu'il me mente et qu'il m'assure que tout va bien. Je veux qu'il déforme la vérité et qu'il me dise, de son calme glaçant, que tout ça ne finira pas en bain de sang.

Parce que je la connais, elle, assez pour me douter que tout ne restera pas aussi enfantin longtemps. Rose est, certes, une voleuse mais Rose est avant tout une tueuse.

Je frappe à sa porte à grands coup de poing, histoire de le mettre en rogne dès le matin. Le sourire trop étiré pour être réel, j'attends comme un con derrière le battant le temps qu'il vienne m'ouvrir, les cheveux en pétard. Sauf qu'il ne vient pas.

Un frisson de panique court dans mon dos alors que je tourne la tête de droite à gauche, priant pour le voir apparaître au détour du couloir mais rien. Pas de silhouette polaire se découpant des murs tapissés pour me rejoindre, aucune trace de lui dans le coin. Je n'ai plus de nouvelles d'eux deux depuis que je les ai vus quitter la réception, le sénateur sur les talons.

J'en viens à craindre le pire.

Je détale dans le couloir, plus rapide qu'un lapin et cours à en perdre haleine dans les dédales du palace, à la recherche du numéro de la chambre de Rosalia. Si les deux ont foiré leur mission, Julia meurt, c'est aussi simple que ça. De toute façon, la cruauté du monde n'est jamais bien complexe. Tout n'est toujours qu'une histoire de simplicités.

NÉMÉSIS | LES ROSES DE ROME T.1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant