61 | Coup fatal

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CECILIA

J- inconnu

Heure inconnue

Quelque part à Denver, Colorado, Etats-Unis

      

Certains prétendre qu''il vaut mieux vivre dans un beau mensonge que dans une vérité trop laide mais je ne suis pas tout à fait d'accord. Certes, le mensonge, au premier abord, semble plus simple. Il vous plonge dans une douce léthargie où le monde est parfait, où le monde est beau mais le monde est pourri. Pourri jusqu'à la moelle.

C'est pour ça que la vérité est nécessaire. Vous ne pouvez pas fermer les yeux indéfiniment : il y a toujours un moment où tout finit par se savoir. Si le mensonge a duré très longtemps, l'heure de vérité devient alors trop douloureuse à supporter pour vous qui avait vécu si longtemps dans la douceur du déni. Il devient trop tard pour vous réparer.

Quand j'avais débarqué dans cette ville qui m'avait vu naître mais que j'avais depuis longtemps oubliée, j'étais le chasseur. Je traquai ma proie, persuadée que je finirai par la débusquer au fils des chemins qu'elle empruntait. Je ne me doutai pas que c'est elle qui me débusquerait la première.

La seule pensée qui me frappa quand elle prononça mon vrai nom avec un sourire railleur c'était qu'elle ne ressemblait plus à la photo qu'avait le commandant. Elle n'était pas chétive, ne semblait pas frêle et ses cheveux n'étaient plus aussi sales qu'avant. L'arme fermement pointée sur moi, elle apparaissait diablement puissante. Ses yeux gris, magnétiques, vous retenaient prisonniers de son sourire en coin et son costume sombre épousait parfaitement sa haute silhouette élancée.

C'était indéniable que je n'étais pas à la hauteur de la tâche. Alors, avant même de me battre, je rendais les armes. Il y avait quelque chose en elle qui m'empêchait de réfléchir correctement. J'aurais sûrement dû persévérer, me faire passer pour docile et lui planter dans le dos la lame cachée dans mon épingle à cheveux. Pourtant, savoir qu'elle connaissait mon nom, mon nom véritable nom, avait suffi à me faire abdiquer.

J'avais oublié à quel point j'aimais être appelé par mon prénom.

— Votre commandant aurait dû vous prévenir. Je ne suis pas une cible facile.

Sa voix était suave, profonde et ne laissait pas la place à une quelconque réponse de ma part. Elle agita son arme sous mon nez pour m'indiquer de sortir de la voiture en vitesse. J'obéis sans discuter puisque même la prise qu'elle avait sur son arme était parfaite. Je n'aurais jamais pu la retourner contre elle avant qu'elle n'appuie sur la détente.

Nous étions perchés dans les hauteurs de la ville, au bord d'une route vraisemblablement peu fréquentée et abritée des regards par une forêt dense qui s'élevait tout autour de nous. Il n'y avait aucune échappatoire et aucun témoin à des kilomètres à la ronde, j'en étais certaine.

L'endroit parfait pour tuer sans devoir en payer le prix.

— Cecilia, c'est bien ça ?

Je détournai le regard, ne voulant pas m'hasarder à la laisser lire en moi. Elle savait qui j'étais alors hors de question que je lui en donne plus. Je mourrai avec honneur, c'était au moins la seule chose que je voulais me promettre.

Mon silence ne la découragea pas pour autant. Elle se mit à me tourner autour de moi, le canon de son SIG-Sauer orienté droit vers mon crâne. Ses pas étaient souples, sa démarche nonchalante, ses pupilles si acérées que je n'avais aucune chance de m'en sortir vivante. Il était facile de deviner à son visage enjoué qu'elle s'amusait comme une folle à me tourmenter ainsi.

NÉMÉSIS | LES ROSES DE ROME T.1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant