⚜ Chapitre 84 : Je t'aime, Maman ⚜

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A toutes celles qui m'ont servies de mères et de modèles.

Masigny, mois d'août

Liberté

Aujourd'hui, le temps était mauvais. Apparemment, demain il fera beau. Nous avions prévu, mes amis et moi, de descendre au lac dès le retour du soleil. Pour l'instant, assise dans ma chambre, je lisais. J'avais décliné l'invitation d'Agathe à me joindre à elle pour un thé en compagnie de Marguerite-Yolande. Je profitais un peu de ma solitude. Et du livre que j'avais entre les mains. Il était merveilleux, cela se voyait jusqu'à son titre : Le Livre des Merveilles, de Marco Polo. Je l'avais déjà lu des centaines de fois, bien sûr. J'en avais même un exemplaire à Ligueux, tellement vieux que les pages se détachaient d'elles-mêmes !

Je voyageais sans quitter mon lit. Quand je laissais de beaux passages, je laissais mon regard vagabonder vers la fenêtre, et j'imaginais autour de moi ce qu'avait vécu Marco Polo. Que de beautés étaient décrites dans ce livre !

On toqua doucement à ma chambre, me ramenant par la même occasion en Savoie.

- Entrez, fis-je doucement.

La personne qui ouvrit, entra et referma la porte me fit sourire. Elle était toujours aussi belle, brillante d'amour et étincelante de tendresse, bien qu'un peu fatiguée.

- Maman, la saluai-je en me redressant.

- Coucou, chérie. Tu vas bien ?

J'hochai la tête. Elle vint s'asseoir sur le coin de mon lit. Je savais parfaitement pourquoi elle était là. Je posai délicatement Le Livre des Merveilles sur ma table de chevet, et vint m'asseoir à côté de Maman.

- Est-ce que nous pouvons parler ? Me demanda-t-elle tendrement en me caressant les cheveux.

J'acquiesçai de nouveau en me blottissant contre elle. Elle avait fait preuve d'une patience rare ; cela faisait un peu plus de trois semaines que les évènements s'étaient passés. Elle commença à me masser le crâne, et je fermai les yeux. Ce ne fut qu'après quelques minutes que je me décidai à parler. A tout dire.

- J'ai rencontré Julien de la Fère lors de notre escapade à Croisilles, soufflai-je. Nous sommes devenus amis très vite. Le jour de mon anniversaire... Nous nous sommes embrassés. Et j'étais persuadée de l'aimer.

Peut-être était-il temps de ne rien lui cacher. Ma mère avait toujours été là pour moi, avec moi. Elle a été et continue d'être mon pilier, mon repère, ma confidente, mon amie. C'était elle pour moi, moi pour elle. Nous deux, mère et fille, à la tête de Ligueux, face à Renata, face à la cour de France. Ce fut pourquoi les confidences arrivèrent d'elles-mêmes, sans que je ne m'interroge. Je m'étonnais même de ne pas lui avoir tout dit plus tôt.

- Nous avons partagés notre couche, soufflai-je. Une fois. Au Louvre.

Maman ne dit rien. Mais amplifia ses massages.

- J'ai été heureuse, quelques temps, avec lui, continuai-je. Enfin, je crois. Puis, un soir, quand j'étais à la garnison... Nous sommes sortis faire une promenade nocturne dans Paris.

Cette fois, ma mère se figea.

- Paris est dangereux, la nuit, fit-elle remarquer d'une voix un peu dure.

- Nous l'avons découvert, acquiesçai-je piteusement. Surtout... Surtout que nous sommes passés par la Cour des Miracles.

Maman sursauta, et je me redressai pour affronter ses yeux sidérés et furieux.

- Je te demande pardon ? Gronda-t-elle. La Cour des Miracles ? Libby !

- Je sais, soufflai-je. Nous avons étés attaqués. Mais...

L'héritage de l'Espionne - Livre IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant