⚜ Chapitre 64 : Sans un mot ⚜

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Versailles, mois de juillet

Liberté

Une fois revenus à Versailles, Philippe me conduisit aussitôt dans une pièce de l'aile Nord, non loin des cuisines. De grandes fenêtres laissaient entrer la lumière, et plusieurs herbes étaient disposée sur une table. Mon ami me fit asseoir, et je me laissai aller contre le dossier de la chaise.

Rivoire entra presque aussitôt après nous, Renard sur ses talons. Je ne voulais pas voir ce dernier. Je ne voulais même pas croiser son regard.

- Sir, fit le duc en s'inclinant poliment devant Philippe. Votre frère le roi se repose dans sa chambre, et Carsel veille sur lui. Mais nous avons besoin de vous pour gérer la situation. Livigne est encore dans la forêt. Il faut faire sécuriser les environs, et rappeler toutes les équipes. Et seul vous pouvez-vous en occuper.

Philippe me glissa un regard.

- Mademoiselle de Tréville a été blessée... fit-il, hésitant.

- Nous avons tous vu ce qu'a fait mademoiselle de Tréville pour sauver la vie de notre roi, et nous l'admirons tous pour cela, assura Rivoire. Winter sait comment soigner une plaie ; et nous avons besoin de vos ordres pour éviter que cette situation de reproduise.

Je fermai les yeux. « Winter sait comment soigner une plaie. » Génial.

- Vas-y, Philippe, soufflai-je néanmoins. Livigne nous a demandé de lui envoyer quelqu'un. Vas-y, va aider Rivoire.

Mon ami déposa un baiser sur mon front encore poisseux de sang avant de sortir précipitamment à la suite du futur duc. J'ouvris les yeux. Renard était là, à mélanger quelques plantes sur la table.

- Debout, ordonna-t-il.

- Sortez, sifflai-je. Sortez, je ne veux pas vous voir.

- Non, gronda-t-il sans me regarder. Je vous soigne, puis je sors. Debout.

Je le foudroyai du regard. Il le sentit, se retourna et me rendit mon regard. Immédiatement, je le détestais. Je le détestais pour le fait qu'il soit là, le fait qu'il connaissait mon plus grand secret, le fait que nous ayons couché ensemble... Et le fait qu'il avait poussé ce cri de terreur quand je m'étais jetée sous le sanglier.

- Debout, répéta-t-il plus durement.

- Ne me donnez pas d'ordre ! Aboyai-je.

Il se précipita vers moi et posa brusquement ses mains contre les accoudoirs de ma chaise.

- Bordel, que voulez-vous à la fin ? Hurla-t-il.

- Vous avez crié ! m'exclamai-je, folle de rage, en le repoussant.

Je me levai d'un bond et ne prêtai pas attention à ma tête qui tanguait dangereusement. Renard s'était décomposé.

- Q... Quoi ? Bégaya-t-il.

- Vous avez crié, répétai-je, plus durement. Quand je me suis jetée sous le sanglier, vous avez crié. Et pas mon nom, ni mon prénom. Vous avez crié « Libby ».

Winter eut une grimace.

- « Mademoiselle Liberté de Tréville » est plus long à crier dans une situation comme celle-ci, railla-t-il.

- Taisez-vous ! grondai-je. Vous n'aviez pas à crier ! Vous n'aviez pas à faire comme si vous vous préoccupiez de moi ! Comme si vous aviez eu peur pour moi !

- Pauvre idiote, bien sûr que j'ai eu peur pour vous ! Tonna Renard. Que croyez-vous, que je n'allais rien dire en vous voyant vous précipiter sous un sanglier en charge ?

L'héritage de l'Espionne - Livre IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant