⚜ Chapitre 36 : Le baiser ⚜

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Paris, mois de juin

Liberté

Je rejouais la scène, encore et encore dans mon esprit, allongée sur mon lit. Cela s'était passé quelques heures plus tôt, mais je n'y cessai d'y revenir mentalement... Nous avions étés collés l'un à l'autre, presque coincés dans une petite cavité... Et je l'avais embrassé. Je. L'avais. Embrassé. J'avais embrassé Julien. Même seule dans ma chambre, j'avais l'impression de sentir encore la douce pression de ses lèvres sur les miennes, comme si elles y étaient encore.

Je plaçai un coussin sur mon visage pour étouffer mon cri de joie. C'était une réaction puérile, je le savais, bien trop pour une adolescente de dix-sept ans mais... Je retirai le coussin de mon visage pour le serrer contre moi.

- Mon premier baiser, murmurai-je à mi-voix. Mon. Premier. Baiser.

Je n'arrivais à y croire. Surtout avec ce qu'il s'était passé après... Je ne savais pas si on pouvait considérer le premier comme un baiser ; j'avais à peine effleuré les lèvres de Julien. Mais le second... Je m'étais d'abord éloignée, autant que je le pouvais, en attendant avec appréhension sa réaction. Il s'était penché une seconde fois vers moi pour cette fois déposer lui-même ses lèvres sur les miennes, d'un mouvement un peu plus assuré que le mien. Nous nous étions embrassés une deuxième fois. Puis une troisième.

Et au final, nous nous étions brusquement séparés en sortant de la cavité parce que des pas s'approchaient de notre cachette ; juste après, Marie et Ninon avaient surgis et nous avaient trouvées ensemble, encore rougissants et essoufflés, et elles avaient mis ça sur le compte de la course. Nous étions rentrés tous les quatre jusqu'à la clairière, Julien et moi nous lançant de discrets regard en coin. Qu'avions-nous fait ? Qu... Qu'est-ce que l'on était, à présent ? Des amis ? C'était tout ? Ou autre chose ?

Je finis par pousser un long soupire. Nous n'avions plus pu être seuls tous les deux durant le reste de la journée ; Rose avait toujours traîné entre nous. Enfin, nous étions retournés à Paris après une journée bien trop remplie... et je n'avais cessé d'y réfléchir. Tellement que j'avais l'impression que ma tête allait explosée.

La porte de ma chambre s'ouvrit et je me redressai pour voir Philippe entrer comme s'il était chez lui, jonglant avec une pomme qu'il avait dû voler dans le bureau d'Aramis. Il m'offrit un sourire radieux et prit une chaise pour s'asseoir à côté du lit.

- Ça s'est bien passé ? Demanda-t-il en croquant dans la pomme.

- Oui, soufflai-je. Tes cours sont déjà finis ?

- Bien sûr que non, ricana mon ami. Mais pour l'instant, je ne vois aucune utilité à apprendre le Portugais.

Je souris distraitement alors que le prince continuait inlassablement de parler.

- J'aurais tant aimé venir avec vous ! Se plaignit-il. Mais non, il fallait que Mère et Aramis soient d'accord pour me punir plus que de raison.

J'haussai un sourcil. Plus que de raison ? Nous nous étions enfuis de Paris sans même une escorte...

- Mais en attendant, j'ai pu voir des choses croustillantes ! S'exclama Philippe en se redressant d'un bond. Tu te souviens de Marie Mancini ? Je l'ai vu se promener dans les jardins au bras de Louis, sous le regard jaloux de toutes les dames de la cour. Et mon frère souriait comme un nigaud ; je ne l'avais jamais vu semblant si heureux ! Peut-être que Marie, notre Marie, hein, la fille de Porthos, avait raison : peut-être que Louis n'est pas insensible à notre italienne...

- J'ai embrassé Julien.

Je l'avais brusquement coupé, mais je n'avais pu m'en empêcher. Il fallait que je le dise à Philippe. Ce dernier se redressa d'un bond et sauta sur le lit à côté de moi.

L'héritage de l'Espionne - Livre IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant