⚜ Chapitre 9 : Point de bêtises ⚜

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Paris, mois de mai

Liberté

Plusieurs jours avaient passés. Peu, mais suffisamment pour que je puisse nouer de solides liens avec Marie et Philippe. Ce dernier n'avait jamais reparlé de leur altercation dans les jardins, et nous n'en avions pas fait allusion non plus. Philippe et moi passions presque tout notre temps ensemble, dans les jardins ou à parcourir le palais de long en large jusqu'à ce que je le connaisse par cœur. Dès qu'elle pouvait se joindre à nous, c'était à dire dès qu'elle ne travaillait pas, Marie passait son temps à nos côtés. Isabelle, elle, ne venait que lorsque sa mère nous rendait visite. Et bien sûr, nous étions retournés plusieurs fois à la garnison.

J'avais fait plus ample connaissance avec Gabriel d'Artagnan, le garçon qui avait provoqué Philippe en duel. Antoine lui, était bien trop souvent prit dans ses occupations de cadet, mais son frère se laissait parfois entraîner jusqu'au palais par Marie. Ainsi, plusieurs fois, Gabriel traînait avec nous, sous les regards désapprobateurs des nobles, ne comprenant pas comment le prince de France et une duchesse pouvaient passer du temps avec une roturière et un futur mousquetaire.

Il fallait dire que notre groupe était bien singulier ! « Les héritiers des quatre plus grands mousquetaires que la terre n'ait jamais compté ! » chantonnait souvent Philippe. « Le fils de d'Artagnan, l'héritière de Porthos, la fille de Tréville... Et oui, bon, je ne suis pas le fils d'Aramis, mais je suis l'héritier de sa beauté ! ». Ce à quoi Marie renchérissait souvent qu'il ne manquait plus qu'un des enfants d'Athos pour que notre cercle soit complet. Je n'avais passé que peu de temps avec eux... Mais je les appréciais déjà énormément.

- Libby ? Fit soudain la voix de Marie, me sortant de mes pensées. Tu m'écoutes ?

Je levai les yeux de ma broderie, et lui sourit effrontément.

- J'avoue que non, je n'ai rien écouté.

Devant mon regard malicieux, Marie s'esclaffa. Elle tournait en rond dans ma chambre, observant les livres que j'avais apporté de Ligueux et ceux qui étaient déjà là à mon arrivée.

- Elle parlait des jardins, je crois, m'apprit Gabriel, avachi sur un de mes sofas. Bon, pourquoi on ne sort pas ? Le prince peut bien nous rejoindre dehors, non ?

- Il nous a demandé de l'attendre, lui répondis-je distraitement en faisant un nouveau point de croix.

Je souris, satisfaite de mon travail. Je tentais de représenter les belles fleurs des jardins sur le tissu à grand renfort de fils colorés... Et je pensais bien m'en sortir. Marie et Gabriel étaient arrivés quelques minutes plus tôt, Philippe désirant nous montrer quelque chose dans une des combles du palais. Connaissant le prince exubérant, cela vaudra sans doute le coup d'œil... Mais il était en retard.

- Je disais aussi que papa reviendra demain, chantonna Marie. Que j'ai hâte ! Cela fait bien deux semaines qu'il est parti.

- Ce qui m'inquiète le plus est surtout ces espagnols, cracha presque Gabriel.

Aussitôt, Marie lui tapa gentiment derrière la tête, et le garçon d'un an mon cadet la fusilla du regard.

- Les espagnols ne sont plus nos ennemis, Gabi, le rabroua-t-elle. Et le général Alvarez sait à quel point une alliance serait favorable à nos deux pays.

- Alvarez peut-être, grimaça le garçon. Mais j'ai entendu père se plaindre de la sottise de l'ambassadeur Hernando, et c'est avec lui qu'Aramis devra négocier...

J'écoutai à présent leur conversation avec attention. Il fallait dire que l'engouement de Marie pour cette ambassade me faisait m'intéresser à elle. J'avais aisément compris que le général Alvarez de Rivera était respecté par les parents de mes amis ainsi que par Aramis, contrairement à l'ambassadeur.

L'héritage de l'Espionne - Livre IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant