Moïra - Tome 1 : La Malédiction des Dunn

Chapitre 9

          La foi. Elle est au centre des civilisations depuis l'Antiquité. Elle est un facteur de cohésion sociale. Les Hommes cherchaient un moyen d'expliquer leur présence sur Terre et sa formation. Les Égyptiens, les Grecs et les Romains croyaient en plusieurs dieux et déesses. Aujourd'hui, la plupart des religions vouent leur foi à un seul dieu.

          Lorsque j'étais enfant, chaque dimanche, mes parents et moi allions à l'Église. Nous chantions et écoutions le Pasteur faire son sermon. C'était également un moment de partage avec les gens de la ville. Les adultes discutaient entre eux et les enfants jouaient. 

          Quand j'y repense, mes parents devaient prier pour que je ne leur sois pas retirée. À présent, je me rends compte que j'aurais dû prier pour qu'aucun mal ne leur soit fait.

          La vie a le don de nous faire revenir en arrière, et de nous faire repenser à toutes les choses que nous n'avons pas faites. Les regrets et les remords reviennent nous hanter même si nous nous efforçons d'aller de l'avant. 

          Tant bien même nous voulons retourner dans le passé et changer les choses, c'est impossible. Ce don ne nous est pas accordé. Ce qui est fait est fait et ne peut être défait.

          Après les paroles de Madame Greenwich, je n'ai pu me résoudre à prendre mon vol et ai renvoyé le taxi sur une autre course. Sur le chemin me menant à la demeure des Dunn, je passe devant l'Église. Je n'y suis retournée, seulement, que lors des funérailles de mes parents. 

          Je crois que j'ai perdu ma foi lorsque ma mère est morte. Je ne comprenais pas pourquoi Dieu aurait laissé la femme la plus importante pour moi mourir. Maintenant, je sais. Il n'était pas le seul à avoir un œil sur elle. Il n'était pas le seul... Madame Greenwich et ses paroles toujours si justes...

          Suite à un long débat avec moi-même, je décide de rentrer dans le bâtiment sacré. Personne n'est à l'intérieur. Alors que je me dirige vers un des bancs du bas-côté, seul le son des roues de ma valise transperce le silence. Je ne sais pas trop ce que j'attends, ni ce que j'espère. J'ai passé tant de temps à oublier ma foi et à me dire que Dieu n'existait pas que je redoute les retombées.

          Depuis mon arrivée ici, tout est remis en question. Comme le "Prince des Ténèbres" l'a dit, je ne peux pas croire à l'un sans croire aux autres. Cela semble si hypocrite de revenir ici pour prier alors que des années de doute ont passé. Puis-je vraiment espérer de l'aide venant de quelqu'un que j'ai repoussé ?

          Lorsque quelqu'un s'assoit à côté de moi, je pousse un cri de surprise.

— Révérend ! Vous m'avez fait peur, sursauté-je.

— Ta réflexion doit être importante pour que tu viennes te recueillir ici, constate l'émissaire de Dieu.

— Vous n'imaginez même pas, éludé-je.

— Dieu sera toujours là pour toi Beth, même si tu as douté de lui.

— Comment... ?

— Je te connais depuis ta naissance. Tu adorais venir ici mais tu as arrêté lorsque ta mère est décédée. Il est normal que tu aies douté. On passe tous par cette étape, où notre foi est mise à rude épreuve, reconnaît-il.

— J'ai raté le test, Révérend. J'ai perdu la foi, avoué-je, presque en m'excusant.

— Pourtant, tu es ici.

— Disons que je suis désespérée.

          Le silence est de nouveau présent dans l'Église. Quelques minutes passent avant que le Révérend n'ose reprendre la parole.