Chapitre 3 - Partie 2

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          J'entre à l'intérieur du bâtiment. Le café est vide, mise à part la serveuse au bar. Je lui adresse un sourire et lui fais part de mon envie d'amertume et de douceur.

— Ça vous fera trois dollars quarante-cinq. Merci. Allez-vous asseoir, je vous apporte votre commande.

          Je la remercie et me dirige vers la table du fond. Comme à mon habitude, j'allume mon ordinateur et vérifie mes mails. Apparemment, mes patients vont bien. Les autres internes me disent que je n'ai pas à m'inquiéter, de prendre tout le temps qu'il faut pour surmonter ma perte. Quel ramassis de conneries ! Ils sont juste trop heureux de me voir en dehors de la course et d'enfin montrer leur valeur aux supérieurs. Je prends ma tête entre mes mains et souffle bruyamment. Qu'est-ce que j'aimerais m'inquiéter de cette compétition au lieu de revenir sans cesse sur mon passé.

— Mauvaise nouvelle ?

— Hm ? Jordan ? Qu'est-ce que tu fais ici ? m'exclamé-je, surprise.

          Je ne cesse de le regarder avec des gros yeux, ahurie. Comment a-t-il su que j'étais là ? Ah oui, c'est vrai... mon message... Je me lève pour l'embrasser et le prendre dans mes bras. Je suis tellement heureuse qu'il soit là. 

          Cela peut paraître quelque peu "neuneu" mais lorsqu'il est à mes côtés, je me sens plus légère, comme si tout le poids sur mes épaules n'existait plus. Dans ses bras, je me sens en sécurité, comme si plus rien ne pouvait m'atteindre. Il est mon bouclier humain, dur sur la face externe mais tellement confortable et chaleureux sur la face interne.

          Après notre étreinte, je l'invite à s'asseoir.

— Au début, je me suis dit que je devais te laisser gérer ça, comme tu me l'as demandé. En y repensant, j'ai réalisé que je ne pouvais pas te laisser seule dans un moment comme celui-là, surtout après tout ce que tu as vécu.

— Je suis contente que tu sois là.

          Jordan me sourit et embrasse mon poignet.

          Je lui souris tendrement et nous commençons à discuter. L'avoir auprès de moi, parler de notre vie à Baltimore me donne l'impression d'être à la maison.

          Je ne peux que remarquer à quel point il est beau dans son costume. Il a dû se changer après être descendu de l'avion car il n'y a aucun pli sur sa veste noire ou sa chemise blanche. Il avait prévu de m'accompagner et je l'aime d'autant plus qu'il ne m'a pas écoutée.

          Il n'évoque pas les funérailles. Il sait que cela va être un moment difficile pour moi. Il cherche juste à me changer les idées. Je peux dire qu'il a réussi puisque, lorsque nous sortons du café, nous nous rendons compte que nous sommes en retard.

          L'église a bien changé depuis l'enterrement de ma mère. Le chœur et l'abside ont été rénovés. Les vitraux ont été remplacés, ainsi que les bancs des bas-côtés. Jamie a fait du bon travail, que ce soit à l'extérieur ou à l'intérieur de l'église. Toute la ville semble être présente.

          Certaines personnes restent debout dû au manque de place sur les bancs. Leurs regards sont braqués sur moi. L'air de l'église, qui devrait être si apaisant, comme à son accoutumée, me coupe la respiration alors que j'observe les visages tristes et remplis de compassion. Certains restent de marbre, d'autres ne peuvent s'empêcher de laisser couler leurs larmes. Ils font le deuil d'une personne qu'ils appréciaient tandis que mon cœur souffre pour une personne que j'ai haï et qui me donne l'impression de suffoquer.

          Je traverse la nef auprès de Jordan. Tante Faith m'attend avec Charles devant le transept. Elle a l'air soulagé de me voir. Je ne peux pas la blâmer. Je suis partie tôt ce matin sans la prévenir et n'ai répondu à aucun de ses appels. Le fait d'avoir Jordan à mes côtés m'a permis de m'échapper de la réalité pendant un petit moment au dépens de ma tante.

Moïra - Tome 1 : La Malédiction des DunnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant